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La presse féminine face au numérique

Publié le 29 avril 2013 par Npcheynel @journalismes
Lundi 29 Avril 2013

C'est un fait commun dans le monde du journalisme : les nouveaux modèles économiques de la presse liés à Internet font peu à peu disparaître la presse écrite. Mais la presse magazine et notamment féminine semble épargnée.
Chaque titre se voit décliné sur la toile et aujourd'hui des petits nouveaux tels que les pure-players font leur apparition. Comment la presse magazine féminine utilise-t-elle le web ?


Le web : un outil qui ne fait pas peur aux grands titres... au contraire

La presse féminine face au numérique Elle, Marie-Claire, Biba, Cosmo, Glamour... autant de titres qui sonnent à l'oreille des femmes pour avoir au moins feuilleté l'un d'entre eux une fois. La plupart sont nés au sortir de la guerre (Marie-Claire en 1937, Elle en 1945) mais tous ou presque ont vu le jour avant le net (version française de Cosmopolitan en 1973, Biba en 1980). Alors quand Internet est apparu, pas question de ne pas en profiter. Chacun s'y est fait sa place. 
Chez Elle, par exemple, un site Internet, une newsletter, un site communautaire, une page Facebook, un compte Twitter, un magazine numérique et une application iPhone ont petit à petit vu le jour. Impossible, donc, de faire un pas sans avoir son magazine à portée de main. 

Plus récemment, de nouveaux titres ont fait leur apparition tels que Be ou Grazia. Pour ces derniers, Internet et ses sites web sont un moyen de toucher le plus grand nombre, de faire de la promotion.

Chaque magazine fait sa propre pub de son site. Pas folle la guêpe : publicité dans ses articles, renvoi à des compléments sur le web...  Promesse d'exclusivités en tout genre, forum et communautés. Voilà le rôle du web. Avec sa web TV, Grazia par exemple propose des vidéos exclusives avec des conseils beauté ou mode que l'on ne retrouve pas dans la version papier. Et il y a aussi les blogs hébergés directement par les sites internet des magazines tels que Be  et qui les met en avant. 

Chez Vogue, "on ne parle pas de site web mais d'univers digital. Le digital inclut les applications, une présence sur les réseaux sociaux et du digital publishing sur tous les stands numériques" explique Sarah Herz, directrice générale des activités digitales de Vogue. Et le web, ou plus généralement le digitial comme on dit chez Vogue, "permet de développer la marque et de toucher des internautes qui ne sont pas que des lecteurs du magazine." Parce que chez Vogue, il y a 30% de lecteurs qui sont duplicants c'est-à-dire des lecteurs du print et du web et autres supports digitaux à la fois. Sarah Herz explique que Vogue est une marque avant tout. De ce fait, "le digital permet de déployer la marque, de toucher autrement des lecteurs ou des non lecteurs." Mais ce n'est pas tout, la toile est un moyen d'avoir une connaissance précise des internautes. Avec les détails que donne le web, Vogue peut savoir ce que les gens consultent ou pas. 

Condenast, le groupe détenteur de Vogue, publie uniquement des mensuels. Pour Vogue, comme pour les autres titres du groupe, Internet permet de continuer à faire vivre le magazine pendant le reste du mois. Certaines lectrices mettent un mois à lire leur numéro mais d'autres le dévorent en quelques jours. Il faut donc faire patienter ces lectrices et leur proposer du contenu. "On a 100% de contenus exclusifs sur le web. On ne reprend pas de contenu du print mais on va parler de la même famille, des mêmes choses."

Le web, une complémentarité

La presse féminine face au numérique Pour Causette,le magazine "plus féminin du cerveau que du capiton" né en 2009, le web n’est en rien un concurrent. Au contraire, un peu comme pour Vogue, "Causette a besoin du web aujourd’hui pour vivre entre deux numéros et pour alimenter une communauté" affirme Grégory Lassus-Debat, directeur de la publication. Causette fait fi de ces discours pessimistes sur la presse papier et sur le tout numérique. Le marché de la presse magazine féminine a beau être engorgé, Causette a réussi en quelques années à se faire sa place. 
Au départ, deux amis : Grégory Lassus-Debat et Gilles Bonjour. Ils décident de créer un magazine féminin et avec, les éditions Gynéthic. Capital de départ : 90 000€. Le magazine, vendu 4,90€ comporte pas ou peu de publicité afin de se financer le moins possible par celle-ci. Et ça marche : Causette est rentable. En 2012, plus de 50 000 exemplaires se sont vendus, trois ans à peine après son lancement. 

Causette "c’est plus qu’un lectorat, c’est une vraie petite communauté" poursuit Grégory Lassus-Debat en expliquant ainsi la nécessité du web comme un prolongement de la version papier. "On a besoin du web pour qu’il y ait une vie à Causette, pour qu’il y ait un échange entre deux parutions". Le magazine mensuel mise tout sur sa communauté et souhaite la faire vivre sur la toile. Toile qui est plus que nécessaire à la survie de Causette. Comme le souligne Grégory Lassus-Debat, le web n’est pas un outil commercial, "bien sûr le web participe à la promotion du magazine mais son modèle économique s’intéresse principalement et avant tout aux kiosques". Causette fait partie de ces magazines qui ont fait le pari du papier sans pour autant évacuer le web. Un pari qui marche plutôt bien mais qui est encore loin des grands titres avec seulement 150 000 exemplaires tirés par mois (voir encadré plus bas). 

Mais en plus d'assurer une transition entre deux numéros et de faire vivre la communauté Causette, Internet permet aussi au magazine de se dévoiler, de se faire connaître et de s'exposer. Pour Grégory Lassus-Debat, le site web, né en même temps que la version papier, est "une version vitrine qui doit tout simplement dire ce que l'on retrouve dans le magazine". Pas de but commercial, donc. Pas question de se servir du site pour attirer du lectorat mais plutôt pour le conserver. 

Et quand on parle de communauté, où en est Causette sur les réseaux sociaux ? Le groupe Causette est vraiment présent en termes de communauté sur le web notamment avec la page Facebook qui regroupe 58 329 personnes aujourd’hui. "Et ces personnes sont très actives" assure Grégory Lassus-Debat. Les réseaux sociaux sont, comme le web, un relais. "Pour nous c’est plus une plateforme où le lectorat peut se retrouver plutôt qu’un outil promotion. C’est certes un outil de promotion parmi d’autres mais on mise beaucoup plus sur l’affichage". 

Le web pour faire vivre son lectorat et la communauté du magazine. Voilà comment Causette s'en sert. 


Un tremplin pour les pure-players

La presse féminine face au numérique Depuis quatre ans maintenant, un petit nouveau a fait son apparition sur Internet. Paulette  est née en 2009 sur la toile. Lisa Delille, directrice de la rédaction revient sur les débuts du titre : "On avait la volonté de créer un magazine différent mais on l’a fait un peu comme ça, à la sortie de nos études sans vraiment de contacts ni de savoir-faire. On a d’abord créé une page Facebook, puis un blog et bien plus tard un site Internet. Et enfin une  version papier et ce, de manière très progressive et en demandant à ce que les internautes prennent contact avec nous et participent au contenu. On s’est créé un réseau grâce au web." Pour Paulette, Internet est un tremplin, un point de départ. Sans le web elle n'aurait sans doute jamais vu le jour.

Et ce n'est pas par choix que Paulette est né sur le web mais plutôt par nécessité, notamment financière : "On n'avait pas les moyens de lancer une version papier directement étant donné qu’on sortait de nos études. On n'avait ni business plans, ni le financement, ni l’expérience. L’idée était vraiment à concrétiser et le meilleur moyen a été de passer par le web pour se faire connaître, rencontrer des personnes qui allaient devenir des contributeurs, mobiliser les talents. Qui dit zéro argent dit zéro rémunération donc c’était très très compliqué de lancer une version papier alors que le magazine n’existait pas à proprement parler."

Mais les créatrices de Paulette savaient d'avance qu'une version papier verrait le jour. C'était leur idée de départ, leur idée première. Le web a juste été un moyen puisque le but n'était pas de créer un magazine digital. Un moyen de se faire connaître mais aussi de connaître du monde. "La première action a été de créer une page Facebook du magazine mais d’un magazine en devenir  avec l’idée de créer un objet papier. On a pu rencontrer des gens motivés grâce à Internet." Grâce au site Internet, Paulette a vraiment pu créer une communauté de lecteurs, imposer un ton , un univers de marque et s’implanter visuellement dans le paysage du web. 
Couverture Paulette numéro de février Couverture Paulette numéro de février Et le pari de Paulette a payé ! Depuis février 2013, le magazine s'est fait sa place dans les kiosques aux côtés de grands titres tels qu' ElleGlamour ou Vogue ! Le numéro 8 du mois de février est même en rupture de stock. Mais cela a pris du temps. "Au tout début on s’était vraiment fait un réseau. Ensuite on a commencé à faire les pilotes papier en parallèle de démarches administratives et financières auprès des banques afin de lever des fonds."

La première version papier de Paulette a donc été vendue avant d'avoir été créée. "On a lancé une pré-campagne d’abonnements à notre version papier qui n’existait toujours pas. Et un an plus tard, en octobre 2011, on a pu grâce aux préabonnements des internautes lancer notre première version papier. Elle était vendue par correspondance et les personnes qui s’étaient pré-abonnées recevait leur numéro par La Poste." Et cerise sur le gâteau, en février dernier, le magazine voit le jour en kiosques grâce à une levée de fonds sur MyMajorCompany qui a permis de récolter 35 000€ pour imprimer le huitième numéro papier et assurer sa diffusion. 

Avec 200 000 visiteurs uniques par mois et déjà plus d'1,9 millions de pages vues, Paulette est dans le bon chemin. 
Internet, une aubaine, donc, pour la presse magazine féminine. Que ce soit une vitrine, un moyen de faire patienter les lectrices ou encore mieux, de lancer son magazine, la toile est un réel atout pour cette presse spécialisée. 
Les dix titres de presse féminine les plus diffusés en 2012

1) Version Femina, hebdomadaire : 3 250 890 exemplaires
2) Femme actuelle, hebdomadaire : 805 353 exemplaires
3) La Parisienne, hebdomadaire : 454 235 exemplaires
4) Madame Figaro, hebdomadaire : 447 551 exemplaires
5) Modes & Travaux, mensuel : 444 404 exemplaires
6) Avantages, mensuel : 441 467 exemplaires
7) Marie Claire, mensuel : 428 367 exemplaires
8) Maxi, hebdomadaire : 412 140 exemplaires
9) Elle, hebdomadaire : 383 905 exemplaires
10) Cosmopolitan, mensuel : 381 873 exemplaires



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