Il est allé clore les Assises de l'entrepreneuriat. Il avait des annonces à faire, quelques messages. Il fallait laisser les polémiques du jour ou du weekend sur l'inutile union nationale ou l'ineffable germanophobie occuper les commentateurs.
A Paris, le "débat" occupait malheureusement encore la scène. Un débat d'experts puisqu'il était sans fin ni objectivité. Il faut y croire pour le voir.
Sous couvert de prétendues attaques contre le "modèle" conservateur allemand, c'est une part du programme de stabilité européen qui est fustigé. On accuse ce dernier de créer un carcan incompatible avec la nécessaire relance de nos économies. Là est le vrai sujet. Le reste n'est que "pugilat" et diversion médiatiques.
1. Ce programme ne date pas d'hier, mais il évolue régulièrement.
Le 17 avril dernier, le plan 2014-2017 a été présenté en conseil des ministres: 14 milliards d'euros d'économies à trouver sur le budget 2014 de l'Etat (y compris collectivités locales), et 6 milliards de "recettes nouvelles", via de nouvelles suppressions de niches fiscales notamment. "Pour rappel, de 2002 à 2012 la dépense publique progressait en moyenne de 2 % par an. La page de ce dérapage est bel et bien tournée. Il en est de même pour la dette. En 2014, celle-ci va malheureusement atteindre son niveau maximal à 94,3 % de PIB" expliquait le gouvernement dans sa communication de l'époque. Moscovici voulait se réjouir d'"inverser la spirale de la dette. "
Rappelons que l'endettement public est l'une des plus sinistres manoeuvres politiques des gouvernements conservateurs. Préférer l'endettement à l'impôt, le créancier - par ailleurs défiscalisé - au contribuable, est une marque de fabrique statistiquement prouvé des différentes formules de politiques conservatrices que la France a connues.
2. Le programme de stabilité est distinct du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, TSCG. Un pacte budgétaire qu'on reproche à Hollande de n'avoir pas renégocié. En juin dernier, nous trouvions positifs qu'une enveloppe de 120 milliards d'euros ait pu être obtenue à côté de ce pacte budgétaire. La croissance était enfin replacée dans l'agenda européen. Pour preuve, les résistances au conservatisme du gouvernement Merkel n'ont cessé de croître. Certes, la chancelière tient bon, elle sera même sans doute réélue en septembre prochain. Et en décembre suivant, les espoirs ont été douchés par une énième réunion des chefs d'Etat européens pour le budget européen 2014-2020. La réticence allemande ne date pas de l'élection de Hollande en mai dernier. On se souvient d'un autre Noël, en décembre 2008. On croyait que notre monde boursier s'effondrait et nos économies avec. L'Europe, pourtant présidée par notre Napoléon de l'époque, le grand Nicolas, s'était doté d'un plan global de relance de 170 milliards d'euros rapidement dégonflé.
3. Réduire l'endettement public faisait presque consensus. Ce sont plutôt les moyens d'y parvenir qui font débat. Prenez Jean-Luc Mélenchon. Lors de sa mémorable intervention télévisée sur France 2, en janvier dernier contre Jérôme Cahuzac, le co-président du Parti de Gauche expliqua: «Voilà ce que dira mon gouvernement: on paiera quand on pourra». Et d'ajouter: «C'est la Banque centrale (européenne) qui va financer si jamais les
taux d'intérêt explosent... La dette, on la paiera à mesure qu'on
pourra. Et d'ici là, ceux à qui on doit attendront.» On l'a connu plus brutal. Pendant la campagne, il expliquait: "En fait
tout dépend en réalité de qui détient la dette et du rapport de force du
pays endetté avec ceux qui lui prêtent." (novembre 2011). En avril, le même leader s'enflamme davantage - sans surprise - contre le programme de stabilité. Puis, devant Jacques Attali, sur France 2 à nouveau, prédit que les seules issues pour se désendetter sont la guerre, la croissance, l'inflation, ou la mort. Et de souligner sa préférence: "Vous préférez l'inflation ou la mort ? Je préfère l'inflation". Pour la première fois, il évoque l'hypothèse fatale: "Pour éviter la chute, la solution serait de ne pas rembourser la dette."
Ne pas rembourser la dette... quelle belle formule...
4. Contre l'endettement, l'inévitable ajustement des prélèvements sur les dépenses que l'on juge nécessaires et solidaires est une question d'importance. On peut se désoler ou se moquer de quelques exonérations partielles de taxation des plus-values de cession d'entreprise promises aux créateurs de PME, l'essentiel des niches fiscales et du déséquilibre de notre système d'imposition est ailleurs. "Un gouvernement n’appliquant pas un impôt suffisant pour couvrir ses
dépenses s’expose inexorablement à toutes sortes de difficultés générées
par la dette" comment un chercheur américain de l'université de Berkeley, publié par les Echos ce 29 avril.
5. La seule vertu de l'agitation anti-Merkel ambiante est qu'elle contribue à consolider un rapport de forces extérieur, et notamment vis-à-vis du gouvernement Merkel. Hollande est paraît-il dans une "lessiveuse européenne", la même qui a lessivé Nicolas Sarkozy en son temps. Car on a oublié ce qu'un ancien candidat à la présidentielle, 18 mois avant le déclenchement de la Grande Crise, osait clamer du haut d'une tribune de campagne...
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