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Assurance : enrichir le cadre prudentiel au-delà de la solvabilité

Publié le 30 avril 2013 par Sia Conseil

Assurance : enrichir le cadre prudentiel au-delà de la solvabilité Le cadre prudentiel européen de l’assurance se restreint pour l’instant principalement à des exigences en termes de capitaux propres auxquelles les compagnies d’assurance/réassurance doivent se conformer (pilier I de la directive Solvabilité II).

Ces exigences sont supposées garantir leur solidité, i.e. leur capacité à tenir leurs engagements vis-à-vis des assurés, même en cas de choc extrêmement important.Ce cadre ne prévoit aucune structure européenne de gestion commune de sinistres extraordinaires, s’ils survenaient. En effet, si les sinistres ne s’arrêtent pas aux frontières, les réponses apportées restent actuellement nationales, chaque pays ayant ses structures vers lesquelles les assureurs peuvent se tourner en cas d’événement catastrophique. Pourtant ces réponses purement nationales peuvent ne pas suffire. Des compagnies d’assurances pourraient se trouver en difficulté, par exemple en cas de marée noire comme celle dans le golfe du Mexique (pour laquelle les Etats-Unis ont mobilisé des moyens exceptionnels) ou suite à une paralysie totale du trafic aérien, sans même parler des situations les plus extrêmes type tsunami en Asie du Sud-Est en 2004. Dans tous ces cas, des sinistres de nature transnationale peuvent avoir un impact sur la solvabilité des compagnies d’assurances.

Puisque les Etats peuvent être amenés à intervenir en cas d’événement de type catastrophique, soit directement ou par le biais de services publics, pourquoi ne pas également mettre en place au niveau européen des mécanismes d’assurances qui permettraient de garantir la solvabilité des assureurs même si un sinistre de très grande ampleur survenait ?

Différentes structures nationales selon les pays

Pour faire face à des événements catastrophiques, certains Etats ont mis en place des structures de réassurance spécifique, par exemple le Consorcio de Compensacion de Seguros en Espagne ou, plus spécifiquement pour les risques liés aux séismes, la California Earthquake Authority et la Japanese Earthquake Reinsurance.

En France, c’est la CCR, société anonyme de réassurance créée en 1946 et entièrement détenue par l’Etat qui a pour particularité de proposer :

  • de la réassurance dans des domaines atypiques, comme le spatial ;
  • une couverture illimitée avec la garantie de l’Etat pour certaines branches spécifiques (catastrophes naturelles ou nucléaire).

En termes d’ordre de grandeur, le montant des sinistres enregistrés par la CCR au titre de l’exercice 2011 s’est élevé à 811 millions d’euros, alors que les provisions techniques atteignaient 6.2 milliards d’euros.

Quid d’une structure à l’échelle européenne

De la même façon que la CCR en France ou, au niveau européen, que les fonds de secours européen[1] et mécanisme européen de stabilité créés en 2010 pour venir en aide à la Grèce ou à tout autre état membre défaillant sur le plan financier, ne pourrait-on pas imaginer une structure d’assurance/réassurance à l’échelle européenne qui interviendrait dans des cas extrêmes de sinistres transeuropéens ?

Suivant les types de risques couverts, la nouvelle structure européenne pourrait soit remplacer les institutions nationales existantes, soit les compléter pour couvrir des cas extrêmes.

Enjeux

Mais pourquoi les états membres de l’UE seraient-ils solidaires à travers des programmes de réassurance alors qu’ils ont par exemple des fiscalités différentes ou offrent des prestations sociales différentes ?

La solidarité précédemment mentionnée serait ponctuelle, à mettre en Ĺ“uvre dans des conditions spécifiques. Il s’agirait notamment d’éviter l’effet domino, quand les difficultés de l’un s’étendent à l’autre. Ce phénomène de contagion est bien connu sur les marchés financiers. De plus, les défaillances d’une compagnie d’assurance, de par sa fonction d’investisseur institutionnel, auraient des répercussions sur l’ensemble du système financier : l’instauration d’une solidarité fait bien partie des objectifs d’un cadre prudentiel. Néanmoins, les limites de cette solidarité devraient être précisées en amont, pour éviter des atermoiements qui n’auraient d’autre résultat qu’une aggravation de la situation, comme ce fut le cas par exemple lors de la crise financière en Grèce.

En plus du gain d’efficacité en situation de crise, mettre en place des structures européennes qui pourraient, à terme, remplacer certaines structures nationales, permettrait de répondre à un deuxième objectif du cadre prudentiel européen de l’assurance : réduire, sur les marchés de l’assurance/réassurance,  les distorsions de concurrence causées par les différences de réglementation entre pays. Ce deuxième objectif, certes secondaire dans un contexte d’événement catastrophique, se rattache aux fondements de la construction européenne : le développement du libre-échange et de la coopération économique entre pays-membres.

Ainsi, selon le type de structures mises en place, deux orientations a priori contradictoires peuvent être données, voire se conjuguer : d’un côté,  un interventionnisme plus important des Etats pour aboutir à une solidarité accrue ; de l’autre, une plus grande libéralisation de l’Europe, à travers l’harmonisation de systèmes souvent nationaux.


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