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No sex, no drugs and Indochine

Publié le 03 mai 2013 par Legraoully @LeGraoullyOff

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J’espère que le professeur Blequin ne m’en tiendra pas rigueur, mais comme Indochine fait l’actualité ces jours-ci, je vais être obligé d’en dire du mal. Vous avez sûrement eu le malheur d’entendre « College Boy », le nouveau single des emo/gothiques d’opérette. Peut-être vous êtes vous demandé comme moi pourquoi les amateurs de ce potage infect vous intiment d’être muets et d’essayer de saisir la profondeur des textes de Nicolas Sirkis (« Nous sommes le bruit, comme un cerf en colère », pouf pouf: c’est vrai qu’il brame comme un cerf dépressif, le bougre) alors qu’on crève d’envie de se remplir les portugaises d’huile bouillante pour ne plus jamais subir ce châtiment.

Pourquoi tant de haine à l’endroit de ces jeunes gens au demeurant sympathiques (en dépit du faux air de Jean-Luc Lahaye du chanteur), alors que Saez aussi nous les brise tout menu, me direz-vous si vous aimez Indochine? Je ne sais pas, c’est totalement arbitraire et subjectif, et c’est comme ça. J’en ai autant à l’égard des gens qui prennent leur air le plus solennel, et qui vous traitent quasiment de fasciste quand on dit que c’est une belle merde, alors que la bonne conduite requise en société voudrait que l’on dise « je n’aime pas ». On couperait les bras à un bambin au sécateur en sifflotant qu’ils n’en seraient pas plus choqués. Mais dites qu’Indochine, Saez ou Johnny n’ont pas plus de valeur à vos oreilles que les mânes de votre petit-déjeuner du 23 mai 1986 et ils seront à deux doigts de prendre les armes. Comme quoi, les goûts et les couleurs et la nature qui a prétendument horreur du vide, c’est vraiment des conneries.

Mais bon, fort heureusement, Indochine n’occupe pas les journaux pour sa musique, on a déjà donné lors de leur insupportable promo. C’est la vidéo qui illustre le très émétique « College Boy » réalisée par Xavier Dolan qui fait débat. D’aucuns la trouvent trop violente, d’autres hurlent à la censure, et puis c’est tout, rien sur son intérêt artistique. C’est l’ère de la communication, baby.

Parmi les saintes nitouches qui reprochent au clip sa violence, on trouve Françoise Laborde, honorable membre du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel. La bonne dame a présenté sans sourciller le journal télévisé pendant des décennies, et n’avait même pas remarqué que la réalité est encore pire que la fiction. Et sa frangine qui présente la météo n’arrête pas de dire qu’il fera un temps dégueulasse, sans que le CSA n’y trouve à redire. Elle ose même comparer la vidéo de Dolan à un clip de Marilyn Manson pour justifier sa diffusion à des heures indues. En revanche, tous les clips où des biatches shakent leur booty pour aider un impuissant qui se prend pour un mafieux à vendre des disques, pas de problème, les violences faites aux femmes, tant que ça saigne pas, c’est que c’est pas grave. Je vous épargne les pubs qui nous prennent pour des déficients mentaux ou des bonniches toujours souriants et toujours fiers de consommer.

D’un autre côté, pas de quoi beugler à la censure non plus. Si le clip ne passe pas à la télévision, il est très facile à trouver sur Internet. Réjouissez-vous, la France n’est pas encore une dictature, et si Indochine et Xavier Dolan sont ce qu’il y a de plus subversif sur le marché, la morale publique n’est pas non plus en danger. Le réalisateur québecois a raison quand il dit que la lutte contre le harcèlement à l’école doit se faire avec « des méthodes plus radicales que des clips publicitaires de trente secondes » que personne ne regarde. Cependant, le clip est tellement léché esthétiquement et son dénouement, ou le jeune paria se fait crucifier en disant merci, est tellement ambigu, qu’on aura beau faire du bruit comme des cerfs en colère, je ne sais pas si ça suffira à changer des mentalités bien ancrées dans lesquelles les meutes adolescentes choisissent fréquemment l’individu le plus bête et le plus cruel pour les représenter (ce n’est d’ailleurs pas propre à l’adolescence, mais c’est là que ça commence).

J’accorde quand même le bénéfice de la bonne foi à Indochine et à Dolan, et je m’engage à me trouver une autre tête de Turc. Mais leur musique, c’est quand même sacrément de la merde.

Juste en passant, j’apprends que le Front de Gauche de Sevran souhaite « éradiquer la drogue et les trafics ». Il faut préciser que Stéphane Gattignon, le maire du patelin, est un partisan de l’assouplissement de la règlementation sur le teuteu, ce qui est encore la politique la moins stupide après la légalisation. Et qu’il y a des élections municipales en 2014. Et je peine à m’imaginer comment les dévots de Marx et Mélanchon, avec leurs petits bras, vont démanteler les réseaux et l’économie souterraine qui mine de rien permettent à pas mal de monde de bouffer dans ce qu’on appelle hypocritement les « cités sensibles ».

Le FDG reconnaît lui-même que « le commerce et la consommation de drogues prennent racine dans la crise économique » (un peu comme la violence à l’école, d’ailleurs). Je chipote un peu en remplaçant crise économique par précarité, parce que même avant la crise il y avait déjà des pauvres. Mais alors pourquoi s’attaquer aux effets et pas à la cause? Et pourquoi mettre toutes les drogues dans le même panier dans un élan de populisme qui n’est pas sans rappeler Poujade au mieux de sa forme? Est-ce que le Front de Gauche n’a rien trouvé de mieux à faire que de copier les méthodes Marine Le Pen pour lui piquer des électeurs, alors que sur le même tract, on trouve de bonnes idées?

Chères lectrices, chers lecteurs, si à la prochaine insurrection (celle qu’on nous promet tous les ans en mai, celle qui vient mais qu’on ne voit toujours pas venir), il faut y aller en écoutant la bande à Sirkis et en étant sobres comme des chameaux, et bien je vais vite redevenir pape. Alors qu’un bon petit Nine Inch Nails sous LSD, ça, ça aurait de la gueule.


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