La guerre et la paix (Charles-Philippe David)

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Voici la troisième édition de « La guerre et la paix », le manuel de Charles-Philippe David, paru aux presses de Sciences-Po. Le sous-titre a légèrement changé depuis la première édition (2000) et s’intitule désormais « Approches et enjeux de la sécurité et de la stratégie » (au lieux de « Approches contemporaines… »).

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Il se trouve que j’avais acheté et lu la première édition et que j’ai trouvé intéressant de comparer les deux.

Mais tout d’abord, de quoi s’agit-il ? Car finalement, le livre ne dit pas exactement ce qu’il est. Il ne s’agit pas d’un simple manuel de relations internationales, comme on en trouve beaucoup : en effet, il est centré sur la conflictualité, et ses variations entre « la paix » et « la guerre ». S’agit-il pour autant d’un manuel de stratégie ? Pas non plus, surtout si l’on compare au traité de Coutau-Bégarie. Un ouvrage de géopolitique ? Encore moins, puisque la discipline est à peine mentionnée.

Certes, l’auteur parle de stratégie, et notamment des débats contemporains sur le sujet (Révolution dans les affaires militaires, terrorisme, contre-insurrection). Il parle de relations internationales, évoquant les grands courants animant la discipline. La notion de « sécurité » est finalement appropriée, même si la définition qu’il en donne (absence de menaces militaires et non militaires qui peuvent remettre en question les valeurs centrales que veut promouvoir ou préserver une personne ou une communauté, et qui entraînent un risque d’utilisation de la force) peine à convaincre.

L’auteur est canadien, donc imprégné d’une double culture, à la fois nord-américaine et européenne. Certes, comme le principal du débat est animé par les auteurs américains, il y fait beaucoup référence, mais on repère quelques auteurs francophones (Aron, Badie, Battistella, Boniface, Challiand, Colson, Courmont, Coutau-Bégarie, Delpech, Dumoulin, Haine, Hassner, Le Gloannec, Montbrial, Moreau-Desfarges, Prémont, Raisson, Ramel, Roche, Salamé, Smouts, Sur, Tardy, Tertrais, Thual, Todd, sur une bibliographie exhaustive et impressionnante de 120 pages !).

Autant la première édition était marquée par l’école idéaliste, autant celle-ci constate le retour de la guerre. En effet, en 2000, nous étions à la fin de la décennie 1990, avec le succès, mais aussi les relatifs échecs des opérations de maintien de la paix. Toutefois, à l’époque, le modèle onusien restait en débat.

Treize ans plus tard, on a le sentiment que le réalisme a triomphé. Certes, le découpage des quatre parties (I L’ordre sécuritaire, II L’ordre militaire, III Les stratégies de sujétion, IV Les stratégies de paix) demeure inchangé, tout comme l’articulation des chapitres et le principal du texte. L’introduction a été sensiblement allongée. Mais surtout, depuis 2000, deux événements majeurs sont intervenus : la question du terrorisme d’une part, et celle des guerres irrégulières et donc de la contre-insurrection. A cet égard, on constate que le nouveau texte ajoute cinq pages sur la question terroriste (pp. 116-120) et trois pages sur la question de la contre-insurrection (pp. 209-211). Des notions nouvelles comme la « responsabilité de protéger » (pp. 102-105) ou l’asymétrie (p. 205) sont développées, mais pas la notion de sécurité énergétique, citée une fois, comme il y a treize ans. Très curieusement, le cyber n’est pas mentionné !

Voici donc un manuel fort utile, très complet, et qui rendra de grands services à tous les étudiants et spécialistes des questions de stratégie. Résolument contemporain, extrêmement bien documenté, il constitue un ouvrage de référence. On appréciera notamment l’ajout, par rapport à la première édition, d’un index très développé, ainsi qu’un glossaire des principaux termes : voici deux outils qui viennent heureusement compléter l’ouvrage qu’on se doit de posséder.

O. Kempf