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Mélenchon ou la stratégie du conflit permanent

Publié le 13 mai 2013 par Juan
C'est un long billet, le récit d'une épreuve et d'une démarche, que le leader du front de Gauche nous livre ce samedi 11 mai 2013. Après l'attaque tous azimuts, la victimisation serait-elle la tactique alternative, la relève stratégique ?
Une semaine après la manifestation du 5 mai, Jean-Luc Mélenchon "revient au clavier" pour une leçon qui permet beaucoup de choses, et justifie le conflit comme tactique de prise de pouvoir. 
"Quand on est de gauche, on est du peuple. On est bien quand on fait peuple tous ensemble."

1. Il était fatigué, on le comprend. Le blog politique est un exercice également intime. Comme d'autres, Mélenchon a pris l'habitude de relater son "combat" comme dans une émission de téléréalité - au plus près du guidon: "Mon délai pour revenir au clavier est d’abord celui d’une récupération physique élémentaire. Vous l’aviez deviné. Depuis la proposition de cette marche citoyenne le 5 mai, il y a cinq semaines, j’ai accompli un marathon médiatico-politique épuisant."
Le plus étrange est qu'il pense rester "discret", c'est son expression: "Les mouches ayant changé d’âne, je peux donner mes impressions plus discrètement."
2. Mélenchon est une victime médiatique, c'est évident. Mais comme tant d'autres personnages publics. Comme Nicolas Sarkozy en son temps, comme François Hollande plus fortement encore depuis le 6 mai dernier. Le "Melenchon-bashing" prend une autre forme que les précédents: on le "diabolise" pour mieux disqualifier son propos. On le compare à Marine Le Pen qui serait - pour nombre d'éditocrates confortables - son double de gauche. "La presse de la middleclass entretient une allergie notoire pour le leader gauchiste, qui s’exprime abondamment par l’image" explique un confrère. Mais cette "diabolisation" a ses avantages. Elle permet une couverture médiatique régulière, la juste contrepartie qu'il faut taire. Mélenchon est un martyr consentant. Il participe de ce spectacle et le sait, parce qu'il le croit utile. Ainsi des chaînes d'information: "ces médias là font davantage pour le débat public que les petites coteries des donneurs de leçon prétentieux d’une certaine presse écrite officialiste."
3. Mélenchon encourage la conflictualisation de débat politique: "la conflictualisation que nous voulons provoquer pour créer de la conscience, le parlé « cru et dru » qui en est le moyen ordinaire, s’ancrent dans le choc intérieur que reçoit celui qui voit son préjugé percuté de plein fouet." Certains voudraient-ils plaider la complexité du monde, Mélenchon préfère la simplification dans la violence verbale: "nous rassemblons en clivant " résume-t-il. De cette "conflictualisation" permanente, Mélenchon attend une prise de conscience, un retournement des consciences chez les "dirigeants", quel que soit leur grade. Il l'écrit noir sur blanc. "Pendant la marche, je scrutais les yeux et les visages des militants d’Europe Ecologie les Verts qui nous accompagnaient de plain-pied. Et surtout ceux des jeunes dirigeants." Il pense, craint, espère que les soutiens à l'actuelle politique du pays est le résulat d'une méconnaissance, ou, pire, d'un isolement: "Hier tu te sentais si seul, si moqué dans ton milieu politique bien-pensant et conforme, tu finissais par croire que la lutte des places était la voie normale par où passait pour demain ou après demain l’avancée de tes idées, tu croyais tout le reste dérisoire. Et soudain tu découvres que cette flammèche que tu cachais au fond de ton esprit est un brasier tout brulant de mille belles flammes parmi tous ces gens !"
4. Il est dans l'opposition, il n'attend plus rien, pas même une alliance. Sa stratégie d'alliance se résume, pour l'instant, à un double pari: le ralliement sans concession d'une fraction large de la gauche parlementaire, d'une part; la "prise de conscience" que ses options sont la seule issue, d'autre part. Sans attendre la fin de la seconde année du quinquennat qui démarre, il n'est certain que d'une chose: "Bien-sûr" écrit-il quelques jours après le début de l'an II du quinquennat, "c’est le début d’un second temps de sa présidence qui sera sans doute encore plus destructeur socialement que le précédent." Il connaît déjà le résultat de la réforme des retraites ("une nouvelle vague d’agressions contre les acquis sociaux comme les retraites vont dévaster notre paysage").
5. Jean-Luc Mélenchon est dans le récit des évènements. Il n'est pas le seul, mais il est le plus notable. Ce n'est pas indigne, mais c'est risqué. Ainsi en est-il de son compte-rendu de la manifestation du 5 mai, le premier: "La bigarrure des peaux et des âges, la visibilité des gueules cassées, la simplicité et le noviciat des marcheurs me frappa. Combien de cortèges sans bannière, sans mot d’ordre, découvrant les slogans et apprenant à les reprendre en riant comme embarrassé par l’audace !" Et le voici qui continue, plusieurs lignes durant, à décrire cet après-midi sur un mode quasi romanesque. Mélenchon écrit l'histoire en la vivant, et en espérant que ce qu'il écrit sera bien l'histoire. Imaginons un autre leader politique national procéder à telle description subjective de la réalité. Imaginons Nicolas Sarkozy ou François Hollande. Imaginons alors la réaction, la nôtre, la vôtre, la leur. Jean-Luc a le talent de sur-raconter un récit qu'il veut révolutionnaire. Ceci explique aussi cela. Ceci explique aussi les réactions qu'il suscite.
6. Au passage, on s'amuse de la novlangue mélenchoniste, riche en termes censés servir le propos général, c'est-à-dire caricaturer - au bon sens du terme - les enjeux et ses protagonistes. Citons, par exemple, la presse "officialiste"; ou le parti "solferinien". C'est utile, et nécessaire. Car cela aide à clarifier le débat.
7. Où mène tout cela ? On comprend les mots d'ordre. On attend des prises de position plus positives. D'autres, au parti de Gauche ou ailleurs, y travaillent. Mais ils n'ont pas accès aux tribunes avec autant de présence ni de régularité. Pour l'heure, Mélenchon travaille à agrandir une brèche qu'il croit grandissante: "la majorité politique gouvernementale est divisée entre ceux qui sont pour ou contre l’austérité et l’Europe Merkel, de même, d’une façon ou d’une autre, dans le monde syndical, de même dans le monde associatif." Il récuse la démoralisation et la résignation, mais livre peu, toujours très peu.
"Recopier les ragots est facile. Travailler est dur." conclue-t-il.
Oui, pour tout le monde.

JL Mélenchon sur France info " marées... par lepartidegauche Tweeter &alt;=rss

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