Les perspectives de l'Islande viennent de s’éclaircir : retour à l'état d'indépendance.
Par Daniel Hannan, depuis Oxford, Royaume Uni.
Félicitations à Bjarni Benediktsson : Independence is back.
Un décalage dans le temps déforme la perception que nous avons des pays étrangers. À chaque fois que je mentionne, par exemple, à quel point la Norvège s’en sort bien en dehors de l'UE, une douzaine de gauchistes semi-habiles ripostent : "Ouais, vous voulez les niveaux de dépenses norvégiens, non ?" Bien évidemment que je préfèrerais avoir le niveau des dépenses norvégiennes (40,2% du PIB) plutôt que le niveau de dépenses britannique (47,3%), bien que nous pourrions certainement faire mieux que ces deux exemples. Mais les chiffres ne semblent pas avoir d'importance aux yeux des gens : l'idée que la Norvège est un État socialiste est désormais une évidence pour les Anglais, et il est difficile de les en défaire.
Dans le cas de l'Islande, la distorsion de perception est encore plus extrême. Il y a quatre ans, le reste du monde a eu l'impression d'un pays anéanti par la crise bancaire. Le secteur des services financiers islandais, comme le raconte l'histoire, avait, comme un coucou, poussé tout le reste à l’extérieur du nid de sorte que, lorsque la crise du crédit est arrivée, l'économie a été dévastée. L'Islande est devenue synonyme de faillite. Les syndicalistes écossais narguent Alex Salmond en disant qu'il va transformer leur pays en une "autre Islande". Les détracteurs de Londres l'appellent "Reykjavík-sur-Mer".
En fait, l'Islande est plus riche que 22 ou 23 (selon la mesure utilisée) des 27 États membres de l'UE. Plus précisément, elle connait la croissance : l'économie islandaise est actuellement en augmentation de 2,5% par an tandis que celle de la zone euro se contracte.
Pourquoi cette motte congelée de roche volcanique se porte-t-elle si bien ? Pour trois raisons. Tout d'abord, l'Islande a été assez sage pour laisser ses banques faire faillite plutôt que de les renflouer. Deuxièmement, l'Islande n'était pas dans la zone euro, et pouvait donc absorber une partie du choc de la dévaluation dans son taux de change plutôt que dans la production et l'emploi. Le taux de chômage est actuellement de seulement 5,3%, et la couronne se remet bien avec le retour de la croissance. Troisièmement, les Islandais sont un peuple courageux, deux générations la séparent de l'agriculture de subsistance et de la pêche. Quand ça va mal, ils ne vont pas se plaindre auprès de l’État, ils se retroussent les manches et se remettent au travail.
Les perspectives de l'Islande viennent de s’éclaircir (au propre comme au figuré : nous atteignons la saison où le soleil continue d’éclairer après 23h00). Après une brève aberration de gauche, les électeurs sont revenus à ce que nous pouvons à juste titre appeler l'ordre naturel. Le Parti de l'Indépendance, qui avait remporté toutes les élections depuis 1929, sauf celle de 2009, a repris sa place de leader lors du vote d’il y a deux semaines. Il semble maintenant certain qu’il formera une coalition avec le Parti du Progrès, centriste mais eurosceptique. Les Islandais attendent avec impatience un démantèlement des réglementations anti-commerciales imposées par la coalition précédente, des réductions d'impôt importantes, et une mise au placard de la demande ridicule de l’UE.
Comment le Parti de l'Indépendance a-t-il pu revenir au pouvoir si rapidement après la crise qui s'est produit alors qu’il était aux affaires ? Eh bien, les Islandais ont un sens des réalités. En 1991, quand David Oddsson a entamé les 18 ans au pouvoir du Parti de l’indépendance, le pays était encore faible par rapport aux standards de l'Europe occidentale, l'inflation était en hausse et le déficit budgétaire était important. Il a réduit les impôts de façon drastique et a privatisé des actifs publics, créant un boom économique sans précédent qui a été suivi en 2008 par une correction. Les Islandais savent parfaitement que, même après la correction, ils sont mieux lotis que leurs parents auraient pu l’imaginer. Et ils savent qui remercier pour cela. Les ministères successifs du Parti de l'Indépendance ont déplacé des rochers, permettant à l'herbe – tenaces touffes de toundra – de croître.
Le Parti de l'Indépendance organise actuellement le Conseil semestriel de l'Alliance des Conservateurs et Réformistes Européens, dont je suis le Secrétaire Général. Ils rappellent au reste d'entre nous comment les conservateurs peuvent réussir en embrassant les marchés. Contrairement à la plupart des partis européens de centre-droite, le Parti de l'indépendance rejette le corporatisme – et bien sûr, l'Union européenne, qui l’encourage
C'est un message qui trouve une résonance ailleurs. Hier matin, l'AECR (l’Alliance des Conservateurs et Réformistes Européens) a reçu des demandes d’adhésion de plus de trois partis de centre-droit supplémentaires. Contrairement à la plupart des blocs européens, nous sommes silencieusement en pleine croissance. Les gens sont sensibles à l’attrait des nations libres, des personnes libres et des marchés libres.
Ah, le Parti de l'Indépendance. Son nom vous dit tout ce que vous devez savoir. L'état d'indépendance - sjálfstæðis - est terriblement important pour les Islandais. Cela ne signifie pas simplement vivre dans un pays souverain, c'est aussi être autonome, intègre, non-esclave. La raison pour laquelle la demande de l'UE est maintenant, en pratique, morte, est que les Islandais comprennent le lien entre vivre dans un État indépendant et vivre de façon indépendante de l’État. J'espère qu’il en va de même pour mes propres compatriotes.
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Sur le web.
Traduction : Laurett pour Contrepoints.