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La crise accélère la hausse des inégalités

Publié le 16 mai 2013 par Labreche @labrecheblog

The-Rich-Get-Richer-Income-Inequality[1].jpgLes dernières données sur les inégalités rendues publiques par l'OCDE dressent un tableau terrible de l'évolution des économies développées.

Hausse continue depuis 40 ans, accrue depuis 2008

La hausse des inégalités, continue dans les pays développés depuis le milieu des années 1970, s'est accélérée depuis le début de la crise. C'est ce que conclut l'OCDE dans ses derniers résultats publiés, qui compilent des données allant jusqu'en 2010.

Les inégalités de revenu se sont ainsi davantage creusées dans les trois premières années de la crise (2008-2010) que dans les douze années précédentes.

Consulter gratuitement en ligne : le rapport, les données et graphiques du rapport et la base de données sur la distribution des revenus.

Infographie en fin d'article.


Les différentes mesures des inégalités (coefficient de Gini, taux de pauvreté relative, comparaisons entre déciles) aboutissent à la même conclusion. Entretenue par des politiques d'austérité au service des plus fortunés, la crise actuelle joue un puissant rôle anti-redistributif. En d'autres termes, elle ne nuit pas à tout le monde mais principalement aux plus fragiles, et à l'inverse renforce la richesse des plus riches. Autrement dit, elle détruit les modèles sociaux élaborés dans la première moitié du XXe siècle et renforcés dans l'après-guerre.

Le basculement de la France vers l'inégalitarisme

La France n'échappe pas à ce noir tableau et voit également les inégalités s'accroître. L'hexagone présente d'ailleurs une évolution particulière qui renforce l'idée selon laquelle la crise actuelle sert de façon étonnamment efficace l'idéologie anti-égalitaire et les intérêts des plus fortunés. La France a ainsi longtemps figuré parmi les pays les plus inégalitaires (bien plus que l'Allemagne ou le Royaume-Uni, rappelons que la France a attendu 1988 pour créer un revenu minimum garanti, contre 1933 pour le Danemark, 1948 pour le Royaume-Uni et 1961 pour la RFA). Puis, à partir des années 1960 et plus encore dans les années 1970, les inégalités ont décru en France, mouvement qui s'est poursuivi jusque dans les années 1990.

Le modèle social français a ainsi la particularité d'être dans les faits plutôt récent, et d'avoir été soumis à une inversion de la tendance dès le lendemain de sa réalisation. La hausse des inégalités en France a ainsi été plus rapide depuis le début de la crise que la moyenne de l'OCDE. La France, qui n'est pas parmi les pays les plus égalitaires mais tout juste autour de la médiane (tableau suivant) est en bonne voie pour retourner côtoyer le Royaume-Uni et les États-Unis dans le classement. Une tendance confirmée par les derniers chiffres de l'INSEE, qui indiquent une forte baisse du pouvoir d'achat moyen des Français (-1,5 % par unité de consommation en 2012), du jamais vu depuis 1984.

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Un miracle islandais ?

Les seuls pays à échapper quelque peu à ces tendances au sein de l'OCDE sont intéressants à examiner, mais même lorsque les inégalités y stagnent, on constate une rupture de la tendance précédente à les voir se réduire. C'est le cas en Slovénie, en République tchèque, ou encore en Norvège, malgré la manne pétrolière : là aussi, les inégalités se sont creusées depuis le début de la crise. Les pays les moins touchés par la hausse des inégalités sont en revanche, pour plusieurs d'entre eux, hors de la zone euro (Norvège, Danemark, République tchèque, Islande).

Le cas de l'Islande est très particulier, puisque les inégalités y ont spectaculairement décru depuis le début de la crise. Un argument en plus pour considérer l'avantage d'une politique monétaire autonome dans le contexte actuel. En refusant de prendre en charge les créances extérieures des banques islandaises en faillite, en dévaluant la couronne et en ajustant ainsi les coûts et revenus de façon presque indolore, l'État islandais a non seulement permis à son économie de rester totalement en-dehors de la crise (croissance du PIB de 3,5 % en 2012), et à sa dette publique de rester sous contrôle, mais a également fait progresser l'égalité sociale.

Une preuve supplémentaire que cette hausse des inégalités est non seulement injuste, mais totalement inutile, si ce n'est à ceux qui en profitent en haut de l'échelle des revenus.

Rappel des définitions :

Le coefficient de Gini mesure les inégalités de revenu, après impôts et transferts. Plus il est élevé, plus l'inégalité est élevée : à 0, le revenu est parfaitement égal entre individus, à 1 un seul individu concentre l'ensemble des revenus du pays considéré.

La pauvreté relative mesure la proportion de la population située sous le seuil de pauvreté du pays considéré, soit en-deçà de 50 % du revenu médian (seuil OCDE), après impôts et transferts.

La courbe « riches contre pauvres » établit le ratio entre le revenu moyen (après impôts et transferts) des déciles extrême, c'est à dire des 10 % les plus riches par rapport aux 10 % les plus riches.

Crédits iconographiques : 1. D.R. | 2. OCDE.


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