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Retraites: pourquoi une gauche prépare les armes

Publié le 20 mai 2013 par Juan
Faut-il augmenter de 20 milliards d'euros, par an, les cotisations vieillesse pour résorber le trou de nos régimes de retraites ?
Osons la question, c'est la seule qui vaille. Contre Sarkozy, l'objectif de rééquilibrer les comptes n'était pas critiquable et fut rarement critiqué. Contre Sarkozy, les modalités de "redressement" furent assez rapidement en cause. L'ancien monarque a bâti une réforme injuste car elle faisait porter l'éventuel redressement, qui n'a finalement pas eu lieu, sur les plus fragiles. C'est aussi simple que cela. Le reste n'est qu'agitation d'arguments.
Le Front de Gauche a décidé de se servir de ce projet de réforme des retraites comme d'un nouveau combat. Il "fourbit ses armes". Les propos sont guerriers. "On n'a pas élu cet homme là en particulier pour remettre en cause l'âge de départ à la retraite, le niveau des pensions et voir privatiser les entreprises publiques", a dénoncé Jean-Luc Mélenchon.
Il est vrai qu'il y a besoin de mobiliser. Mais l'on craint, ailleurs à gauche et notamment dans ces colonnes, que le débat sur le financement de nos retraites ne soit emporté par des joutes d'étiquettes et autres caricatures. Dans un blog hébergé par Mediapart, Hollande se fait traiter de "salopard". Quel progrès ! Répétons la question:
Faut-il augmenter de 20 milliards d'euros, par an, les cotisations vieillesse pour résorber le trou de nos régimes de retraites ?
20 milliards, c'est justement le montant prévu et voté pour le Crédit d'Impôt Compétitivité Emploi (CICE), à la suite du rapport Gallois de septembre dernier. Quel rapport sinon la coïncidence des montants ? Les revenus du capital ont été par ailleurs déjà plus largement assujettis aux cotisations sociales, dont pour le financement des retraites. Le gouvernement a également abrogé le coup de matraque de TVA initialement prévu dès octobre 2012 par Nicolas Sarkozy, 11 milliards d'euros d'augmentation générale pour théoriquement financer un allègement de cotisations sociales. Le CICE est différent, même s'il ne faut pas l'exempter de toute critique. C'est un crédit d'impôt calculé en fonction de la masse salariale des entreprises, et non une réduction de cotisations sociales. Si la masse salariale baisse, le CICE baisse.  
L'augmentation de TVA décidée pour 2014 par Hollande/Ayrault n'est un renchérissement uniforme du taux plein, mais de certains taux réduits dont celui de la restauration. Où sont passés celles et ceux qui réclamaient l'abrogation du taux réduit de la restauration du temps de Sarkofrance ? Et pourquoi refuser d'admettre que ces taux réduits de TVA sont aussi autant de niches fiscales que d'aucuns dénoncent ?
Sur les retraites, Hollande aurait déjà "trahi". C'est faux. La réforme des retraites faisait partie du programme du candidat. La concertation ne fait que débuter. Et, last but not least, il faut, on doit reconnaître la constance de François Hollande sur le sujet.
L'actuel président défend depuis une décennie au moins l'allongement de la durée de cotisations. En 2003, le PS qu'il dirigeait appelait à une "vaste négociation sur la durée de cotisation en fonction de l'effort contributif de chacun, de la situation familiale et de la pénibilité des métiers." En 2010, lors d'un débat télévisé contre Xavier Bertrand, alors ministre de la santé, il énonce clairement: "l'espérance de vie s'allonge, il faut allonger la durée de cotisation."
Pendant la campagne, il réitère. En juillet dernier, le gouvernement a aussi rétabli la possibilité d'un départ à 60 ans à taux plein pour les cotisations complètes des salariés ayant commencé à travailler à 18 ou 19 ans (contre 62 ans initialement calé par la réforme Sarkozy). Cette préférence pour l'allongement progressif de durées de cotisations est aussi assez largement partagé au sein de l'échiquier politique "interne" du Parti Socialiste, de Martine Aubry, à Michel Rocard ou encore Henri Emmanuelli. D'ailleurs, le Parti de Gauche dénonçait déjà pendant la campagne présidentielle ces positions qui ne sont pas nouvelles. EELV est plus ambigüe. Son secrétaire national Pascal Durand évoquait récemment d'étudier une "mise en retraite" partielle et progressive, plutôt qu'un "départ brutal à 60 ans."
 
Comme d'autres sujets, la réforme des retraites est un épouvantail. Evoquer qu'il faudra travailler plus longtemps suffit à hérisser à gauche.


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