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Le tabac fait 200 morts par jour

Publié le 28 mai 2013 par Seifenblase @Pointe_d_Actu

A l’approche de la Journée mondiale sans tabac, l’Institut de veille sanitaire publie ce mardi matin un numéro spécial sur la situation en France, où un adulte sur trois fume.

Les Français et la cigarette, c’est encore et toujours une grande histoire d’amour, d’après le dernier bulletin épidémiologique hebdomadaire de l’Institut de veille sanitaire. Et le gouvernement ne semble pas s’en émouvoir plus que ça. Dans un éditorial, le professeur Yves Martinet se montre d’ailleurs sévère, appelant à un nouvel « élan politique ». Et sa légitimité ne tient pas seulement au fait qu’il est président d’honneur de l’Alliance contre le tabac ; les chiffres qu’il indique font froid dans le dos.  « En France, le tabac tue 200 fois par jour, en faisant perdre en moyenne 10 à 15 ans d’années de vie confortable à chaque fumeur.» Concrètement, d’après ce bulletin, les fumeurs ont un taux de mortalité trois fois plus élevé que les non-fumeurs. Mais alors, pourquoi le gouvernement ne réagit-il pas plus ? Parce que l’Etat a cruellement besoin des 14 milliards d’euros qu’il prélève sur la vente du tabac. Et tant pis si le coût global pour la société s’évalue à 47 milliards d’euros. On peut aujourd’hui légitimement s’inquiéter de l’augmentation exponentielle de la consommation du tabac chez les femmes.

Une consommation de tabac en hausse

La consommation de tabac ne cesse de progresser,  notamment chez les femmes et chômeurs .

La consommation de tabac ne cesse de progresser, notamment chez les femmes et chômeurs .

Mais il n’y a pas que chez les femmes que cette consommation augmente. Elle avait commencé à diminué dans les 70 avant de ré-augmenter à partir de 2005, notamment, donc, chez les femmes et les classes socio-économiques défavorisées. Résultat : près de 34% des adultes fument. Comment expliquer cette ascension alors qu’au Royaume-Uni, aux Etats-Unis ou au Canada, suite à l’application des recommandations de l’OMS, il n’y a plus que, respectivement, 21%, 15% et 13% d’adultes fumeurs ? Un des éléments de réponse est la mauvaise applications des lois en France, comme celle de l’interdiction de vente du tabac aux mineurs. Pour eux, outrepasser la loi n’est pas compliqué. Taxer des cigarettes aux amis fumeurs, jouer sur son apparence pour paraître plus adulte et même, dans certains cas, fausses cartes d’identité… des méthodes pour acheter des cigarettes, ils en trouvent. 

L’une des rares lois véritablement appliquée en France est celle de l’interdiction dans les lieux publics. Elle avait fait grand bruit à sa mise en oeuvre en 2007 et, même si certains établissements tentent plus ou moins bien de frauder, dès 2008, le tabagisme à l’intérieur d’endroits clés comme les bars et les restaurants a été quasiment totalement éliminé. Il semblerait que les pouvoirs publics se soient donnés les moyens de l’application. Cinq ans plus tard, les chiffres sont globalement restés stables. « Le tabagisme sur le lieu de travail a diminué de façon significative après la loi, passant de 42,6% à 19,3%, et a continué ensuite » d’après une étude. 

Suite aux augmentations successives du prix du tabac et notamment à l’interdiction de fumer dans les lieux publics, contraignante pour les fumeurs, ils sont de plus en plus nombreux à opter pour la cigarette électronique, qui agite aujourd’hui tous les débats. Les pneumologues sont réservés et un rapport sorti aujourd’hui préconise l’interdiction aux mineurs et, là encore, dans les lieux publics. Car si elle d’ores et déjà interdite au Brésil, en Turquie, en Argentine et à Singapour, en France, la e-cigarette est dans un vide juridique. Gênant quand elle ferait entre 500 000 et un million d’adeptes. Inventé en Chine en 2005, l’appareil présente à son extrémité une diode simulant visuellement la combustion. Il contient une cartouche dont la solution s’échauffe au contact d’une résistance. L’appareil produit de la vapeur que l’usager inhale. Des flacons de « e-liquides » composés de propylène glycol ou de glycérol, de divers arômes et, éventuellement de nicotine, permettent de recharger la cartouche usagée.

Selon le rapport de l'office français de prévention du tabagisme, l'éventuelle interdiction de la cigarette électronique dans les lieux publics serait lié à la question du vapotage passif, même s'il reconnaît que le risque d’exposition passive, dans le cas de l’e-cigarette, est faible mais en théorie non nul, car il y a diffusion de nicotine.

Selon le rapport de l’office français de prévention du tabagisme, l’éventuelle interdiction de la cigarette électronique dans les lieux publics serait lié à la question du vapotage passif, même s’il reconnaît que le risque d’exposition passive, dans le cas de l’e-cigarette, est faible mais en théorie non nul, car il y a diffusion de nicotine.

Arômes et nicotine

Et c’est là que les spécialistes se méfient. Pour beaucoup de « vapoteurs », cette solution vise à se désaccoutumer de leur drogue habituelle. Pourtant, en 2008, l’Organisation mondiale de la Santé déclarait que ces cigarettes ne pouvaient être considérées comme une thérapie légitime permettant d’aider les fumeurs à décrocher et, le 18 avril dernier, l’OMS a banni la e-cigarette de ses locaux. Alors est-elle réellement sans danger pour la santé ? Difficile de le savoir, si peu de temps après sa mise sur le marché. Quelle est la quantité réelle de nicotine ? Quels sont les arômes utilisés ? Amande, vanille, tabac brun, menthol, pomme… il en existe des dizaines ! Les fabricants risquent d’être obligés d’apporter la preuve de l’innocuité des arômes qu’ils utilisent. Quant à la quantité de nicotine, elle pourrait être limitée à 18 mg/ml contre une concentration maximale actuelle de 20 mg/ml. Un projet de directive européenne propose même d’abaisser ce taux à 2 mg/ml, dissuadant ainsi complètement les fumeurs. 

Un rapport, réalisé par plusieurs tabacologues et coordonné par le pneumologue Bertrand Dautzenberg, président de l’Office de prévention du tabagisme, devrait préconiser la vente de cigarette électronique seulement dans des établissements agréés (aujourd’hui, on ne les trouve qu’en bureau de tabac, sur Internet ou dans certains magasins spécialisés), de ne pas l’utiliser dans les lieux publics et d’en interdire la vente aux mineurs, donc. Ceci dans le but de ne pas créer « un boulevard d’entrée potentiel dans le tabagisme » selon le professeur Dautzenberg. En effet, il semblerait que de plus en plus de jeunes se mettent à la cigarette électronique pour « faire comme les autres » et entrer dans une bande, de la même manière que certains le font avec une cigarette réelle. Enfin, les règles s’appliquant à la publicité pour le tabac devraient être transposées à la cigarette électronique.

Preuve qu’en matière de lutte contre le tabagisme, la volonté politique est un élément clé.

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