Magazine Environnement

Voyage, voyage

Publié le 03 juin 2013 par Rolandbosquet

voyage

   Heureux comme le gnou qui revient de voyage, dit le proverbe bantou ! Tout casanier qui rêve de partir vers de nouveaux horizons est ainsi averti des périls qui guettent les téméraires. Pourtant, un jour, voila qu’il décide malgré tout d’abandonner son courtil, ses chèvres naines, les écureuils qui courent dans ses fayards et les pigeons ramiers qui hantent les bois alentours. Il chausse ses escarpins et prend la route en direction de la mer. Il est Jean-Paul Kaufmann qui remonte la Marne, sac à dos sur les épaules et coupe de Champagne à la main. Il est Marco Polo sur la route de la soie au milieu des embouteillages de caravanes… et de camping-cars. Il s’imagine surtout en Jean-Christophe Ruffin dont le récit de son pèlerinage à Saint Jacques de Compostelle est encore bien présent dans son esprit. « Il faut toujours se méfier des régions vertes. Une végétation si drue, une herbe si éclatante ne peuvent avoir qu’une origine : la pluie… Mon visage s’est couvert d’une courte barbe, mes vêtements se sont maculés de boue… J’ôtai bientôt mes chaussures, mes chaussettes et me plongeai dans l’examen de mes orteils… ». Le risque est donc grand qu’avec ses guenilles de jardinier, le voyageur ressemble bientôt aux chemineaux dépenaillés et épuisés de fatigue qui hantent les grands chemins ou même à l’épouvantail qu’il dresse auprès de ses framboisiers pour effrayer les moineaux et les merles. En un mot, le risque est grand pour lui de se voir revenir à l’état sauvage. En réalité, il n’est pas un véritable aventurier. Point de croisière sur un rafiot de fortune en perspective. Point de traversée de la savane au milieu des gazelles, des lions et des éléphants. Point de fouilles sous un soleil de plomb à la recherche des petits-enfants de l’homme d’Olduvai. Son expédition le conduira tout benoitement sur le vieux port de La Rochelle. La seule faune qu’il y contemplera sera celle des touristes qui défilent devant la terrasse abritée de la brasserie de la Marine. Il dressera son bivouac chez des amis qui hissent leur pavois en bord de mail. Grignotera chez Coutanceau quelques langoustines de la Cotinière, du civet de homard breton et du filet de turbo au beurre. Entendra à la salle de l’Oratoire Harmonia Voce et l’orchestre symphonique Amadeus pro musica interpréter Vivaldi, Bach et Mendelssohn. Et il arpentera les allées du jardin de simples et de plantes médicinales du musée d’Orbigny-Bernon, humera l’odeur de café de la bignone capreolata, admirera les fleurs blanches de la staphyllea colchica, parcourra les sept hectares du parc de Mireuil et visitera les serres municipales de la Bergerie aux pratiques écologiques avancées. Et c’est en Ulysse heureux de retrouver son Ithaque qu’il regagnera son courtil avec plein d’idées de fleurissements nouveaux dans la tête.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Rolandbosquet 674 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte