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Le Québec remet en question certaines mesures de protection du jeu à risque

Publié le 08 juin 2013 par Alain Dubois

La responsabilité sociale de Loto-QuébecÀ la demande des partis de l'opposition, le Gouvernement du Québec tiendra ces jours-ci des consultations particulières sur la vente, le service et la consommation d'alcool à l'intérieur des aires de jeu (des casinos de Loto-Québec). L'Association des centres de réadaptation en dépendance du Québec (ACRDQ), qui regroupe tous les établissements publics ayant une mission de centre de réadaptation en dépendance, lesquels assument 90% de l'offre de services faite aux joueurs pathologiques, profitera de l'occasion pour réclamer au Gouvernement qu'il mette en place au Québec un Observatoire des comportements à risque ou de dépendance aux jeux de hasard et d'argent.

Alors qu'une large proportion de la population du Québec joue aux jeux de hasard et d'argent (JHA), un très petit pourcentage développera au cours de sa vie un problème de jeu pathologique. En 2002, le taux de prévalence du jeu pathologique au Québec était de l'ordre de 0,8%. Les études plus récentes menées par Louise Nadeau et Sylvia Kairouz indiquent (avec des outils différents) que ce taux se situe aujourd'hui autour de 0,7%. À cela, il faut ajouter qu'un peu plus de 1% de la population est considérée à risque (ou problématique) de développer un problème de dépendance aux jeux. Bien que cette population de «joueurs à risque» demeure actuellement mal connue et que la littérature soit encore peu éclairante sur leurs motivations, nous savons que certains facteurs engendrent un risque pour les gens de développer un problème de jeu ou, à l'inverse, les protègent contre un tel sort.

Les joueurs pathologiques présentent de hauts niveaux de comorbidité. La concomitance de problèmes de santé mentale est importante et il existe une forte association entre une participation problématique au jeu et l'abus ou la dépendance à des substances comme l'alcool, la drogue et le tabac. Les résultats de certaines études suggèrent un effet d'interaction entre les problématiques liées au jeu et à l'alcool.

On sait donc que l'alcool agit comme un désinhibiteur qui généralement augmente la prise de risque chez le joueur compulsif. Plusieurs études ont démontré que l'association de l'alcool et du jeu pouvait conduire à des pertes de contrôle. L'obligation pour le joueur de devoir quitter l'aire de jeux pour consommer des boissons alcooliques agit souvent comme un frein et constitue par le fait même une mesure de protection du jeu à risque.

Le Québec a mis en place au fil du temps un certain nombre de mesures qui agissent comme des facteurs de protection du jeu à risque ou du jeu problématique. De notre point de vue, ces facteurs de protection expliquent sans doute en partie les faibles taux de prévalence du jeu pathologique au Québec. Mentionnons parmi ceux-là la concentration des aires de jeu dans les salons de jeu ou les casinos, le fait que ces aires de jeu soient encadrées et réglementées par l'État, le fait que des mesures d'autoexclusion ainsi que des mesures de gestion de crise aient été mises en place dans ces aires de jeux afin de prévenir les problèmes associés au jeu problématique.

Il en est ainsi des règles qui prohibent la vente, le service et la consommation de boissons alcooliques à l'intérieur des aires de jeux. Ainsi, la décision du gouvernement du Parti québécois de permettre la consommation d'alcool aux tables de jeux risque de conduire certains joueurs ayant des comportements problématiques à augmenter la prise de risque et la perte de contrôle. Nous sommes particulièrement préoccupés par la tranche de 2% de la population qui, soit en tant que joueurs à risque, soit en tant que joueurs pathologiques, est susceptible de développer des problèmes encore plus importants.

De l'avis de l'ACRDQ, les différentes mesures de protection mises en place au Québec pour prévenir, protéger ou traiter les joueurs à risque ou pathologique, expliquent en partie les faibles taux de prévalence de ces problématiques. La décision du Gouvernement de remettre en cause une de ces mesures risque d'affecter une partie de la population aux prises avec un problème de dépendance au jeu ou à risque de développer une dépendance. Ceci dit, si le Gouvernement souhaite aller de l'avant, l'ACRDQ suggère de mettre en place une instance de surveillance de ces problématiques, tel un Observatoire du jeu, et d'investir dans des programmes spécifiques pour les joueurs dits à risque, lesquels ne reçoivent aucun service à l'heure actuelle.

Lisa Massicotte
Directrice générale de l'Association des centres de réadaptation en dépendance du Québec

Témoignages de ACRDQ en Commission parlementaire: Alcool dans les aires de jeux


Alcool dans les aires de jeux: Association des centres de réadaptation en dépendance du Québec ACRDQ

Note les parenthèses avec soulignement ont été rajoutées par la rédaction de jeuenligne.ca afin d'améliorer la compréhension du texte



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