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Replacer le demandeur d’emploi au premier plan

Publié le 10 juin 2013 par Mamzelleb @mamzelleb

Rationnaliser, déconcentrer, réorganiser et simplifier, tels sont les mots d’ordre du rapport d’information sur Pôle emploi et le service public l’emploi rendu à l’Assemblée nationale le 5 juin 2013

assembleenationaleConstituée le 27 novembre 2012, la mission d’information, présidée par Dominique Dord (député de la 1ère Circ. de la Savoie – UMP) et dont la rapporteure est Monique Iborra (députée de la 6ème circ. de Haute-Garonne – SCR), s’est «fixée pour objectif d’apprécier l’efficacité des services rendus par les différents acteurs du service public de l’emploi et, au premier chef, par Pôle emploi, les maisons de l’emploi et les missions locales » aux demandeurs d’emploi.

Cette mission d’information a été réalisée dans un contexte d’augmentation continue du chômage, après la fusion chaotique de l’ANPE-Assédic et l’utopie du « métier unique » qui a engendré une désorganisation certaine et une perte de repères pour les conseillers de Pôle emploi.

La mission d’information est partie du point de vue du demandeur d’emploi et du service qui lui est rendu. En outre, la mission d’information voulait comprendre le peu d’efficience constatée par de nombreuses études sur Pôle emploi et le SPE au vu des moyens humains et financiers importants qui leur sont alloués.

En effet, le rapport est sans appel relevant la complexité institutionnelle et relationnelle qui affaiblie l’accompagnement du demandeur d’emploi par un trop grand nombre d’intervenants qui se retrouvent en « concurrence ». Cette « guerre des chapelles » se fait au détriment des demandeurs d’emploi.

Monique Iborra appelle donc à un changement d’état d’esprit, « à un état d’esprit plus opérationnel et moins institutionnel, plus concret et moins administratif, avec comme souci de chaque instant le retour du demandeur d’emploi dans les délais les plus courts à un emploi durable. ».

Cette simplification du paysage institutionnel contribuera à la fin du « ballotage » du demandeur d’emploi d’une structure à une autre structure ne lui assurant pas un accompagnement efficace ni à un retour à l’emploi.

Aussi, afin d’améliorer l’accompagnement du demandeur d’emploi tant par Pôle emploi que par le service public de l’emploi (SPE), Monique Iborra formule 39 préconisations.

« La réforme du marché du travail, opérée par la loi relative à la sécurisation de l’emploi, en appelle nécessairement une autre. C’est désormais le service public de l’emploi, outil majeur de toute politique de l’emploi, qui doit être réformé dans son ensemble. »

Redessiner l’architecture du service public territorial de l’emploi

Monique Iborra insiste sur la territorialisation du service public de l’emploi en reconnaissant à la région le titre de « chef de file d’un service public régional de l’insertion professionnelle, de la formation professionnelle, de l’orientation et de l’apprentissage. ».

La mission d’information a en effet constaté « l’extrême foisonnement des intervenants ». La juxtaposition des PLIE, des missions locales et des maisons de l’emploi crée un manque de lisibilité du service public territorial de l’emploi pour le public en général, et pour le demandeur d’emploi en particulier. Ainsi, elle préconise de rationnaliser les moyens humains et financiers en créant un « service public d’insertion pour l’emploi » regroupant les missions locales, les PLIE et les écoles de la 2ème chance.

Elle propose également de faire évoluer les maisons de l’emploi vers « un rôle d’agences économiques sous le pilotage des communautés d’agglomération et des conseils régionaux ».

Pour résoudre le chevauchement des compétences, la rapporteure suggère de fusionner les instances représentatives des opérateurs locaux de l’emploi au sein d’une « Union nationale des services publics d’insertion pour l’emploi », regroupant les missions locales, les écoles de la deuxième chance et les plans locaux pour l’insertion et l’emploi (PLIE), et où seraient présents l’État, les collectivités territoriales et les partenaires sociaux.

Pôle emploi

Au cœur de cette mission d’information, Monique Iborra constate à de nombreuses reprises le défaut d’information de Pôle emploi à la fois à ses propres conseillers et aux demandeurs d’emploi.

Elle juge nécessaire de mesurer l’efficience du système d’information de Pôle emploi et d’avoir un budget alloué à la résolution de ces dysfonctionnements, des conseillers connaissant les dispositifs de retour à l’emploi font des demandeurs d’emploi mieux accompagnés.

En outre, Monique Iborra suggère de modifier les pratiques managériales descendantes en donnant de la responsabilité aux directeurs régionaux et territoriaux et aux managers et en octroyant de nouvelles marges de manoeuvre aux conseillers chargés de l’accompagnement des demandeurs d’emploi. Le déploiement opérationnel du plan stratégique « Pôle emploi 2015 » ne peut s’effectuer sans une modification de l’organisation du travail. Il est nécessaire de déconcentrer l’opérationnalité.

Aussi, Monique Iborra insiste sur la territorialisation de Pôle emploi en assurant une meilleure représentation des collectivités territoriales au sein de Pôle emploi, tant au niveau national en prévoyant au sein du conseil d’administration au moins un représentant pour les régions et un autre pour les départements, qu’à l’échelon local.

Quant à la Pôle emploi – entreprises, depuis la fusion ANPE-Assedic, elle s’est distendue du fait de l’augmentation des inscriptions et des indemnisations des demandeurs d’emploi. Les conseillers de Pôle emploi sont submergés comme l’indiquait Christine Brouh, secrétaire Ile-de-France au SNU – Pôle Emploi, sur Europe1 Midi dans « Les clés pour l’emploi » le 31 mai dernier : « Nous ne le faisons plus. Nous n’avons plus le temps. La relation entreprise est maintenant, j’allais dire, lésée…Nous avons des spécialistes. Moi, je sais le faire mais nous n’avons plus le temps de le faire. ».

Toujours dans le cadre de l’amélioration de la relation de Pôle emploi avec les entreprises, la rapporteure préconise de finaliser le projet de portail internet réunissant l’ensemble des offres d’emploi proposées par les entreprises et de développer une offre de services spécifiques pour les petites et moyennes entreprises.

Unédic

La rapporteure demande à l’Unédic de simplifier les règles d’indemnisation du chômage dans le cadre des prochaines négociations sur l’assurance chômage.

Durant son audition, l’Unédic n’avait pas jugée utile de revoir les règles d’indemnisation des demandeurs d’emploi trouvant le système actuel d’une grande simplicité, 1 jour cotisé/travaillé = 1 jour indemnisé :

« M. Vincent Destival, directeur général de l’Unédic, a estimé que la complexité du régime d’indemnisation résultait de celle du droit du travail et de la situation des demandeurs d’emploi. Ces derniers alternent souvent des périodes de chômage et d’activité, ce qui complique particulièrement le calcul de leur indemnisation. De même, Mme Patricia Ferrand, vice-présidente de l’Unédic, a rappelé que la convention de 2008-2009 avait simplifié certaines règles avec la suppression des filières et la règle du « un jour pour un jour » et que la complexité du marché du travail rendait délicate une nouvelle simplification de ces règles. »

Depuis, l’Unédic a fait volte-face et mène une réflexion sur la simplification des règles d’indemnisation chômage dans un groupe de travail.

D’ailleurs, elle vient de publier un rapport fin mai en indiquant que la simplification des textes réglementaires, la suppression des dispositions obsolètes contenues dans certains accords d’applications et annexes, relatives à des métiers qui n’existent plus ou qui connaissent des évolutions législatives, sont nécessaires.

Espérons que cette future simplification des règles d’indemnisation chômage pourra alléger de facto le « Précis d’assurance chômage » de 333 pages sensé résumer la réglementation en un guide pratique dans lequel l’Unédic se parle à elle-même.

En outre, la rapporteur préconise de renforcer le rôle et d’homogénéiser le fonctionnement sur tout le territoire national des instances paritaires régionales (IPR).

Suivi du demandeur d’emploi

Monique Iborra préconise d’améliorer l’accompagnement du demandeur d’emploi en réduisant à moins de 4 mois le délai de convocation du demandeur d’emploi au premier entretien suivant l’entretien d’inscription et de diagnostic (EID).

Il est nécessaire de rassurer le demandeur d’emploi qui se retrouve au chômage, donc dans une situation précaire, à la fois financière et humaine.

Les résultats d’une récente étude de l’Institut Gatard et Associés commandée par l’Unédic est en adéquation avec la préconisation de la mission d’information en permettant au demandeur d’emploi d’avoir une estimation du montant de son indemnisation à l’issue de l’entretien d’inscription et de diagnostic (EID).

Fortement évoquée lors des auditions, la dématérialisation doit être limitée pour les demandeurs les plus éloignés de l’emploi et privilégier l’accueil physique des demandeurs d’emploi peu autonomes. Tous les chômeurs n’ont pas les moyens financiers d’avoir une connexion internet et à défaut peuvent être radié pour non présentation à une convocation uniquement envoyée par courriel. Il est important que le conseiller Pôle emploi indique clairement au demandeur d’emploi lors du rendez-vous d’inscription par quel moyen il souhaite être contacté. Pour les personnes les plus éloignées de l’emploi, il est nécessaire que le conseiller Pôle emploi crée du lien social.

En 2012, 511 749 radiations ont été prononcées. Par conséquent, la mission d’information préconise d’instaurer, pour les décisions de radiation à la suite d’une absence à convocation, un dispositif de gradation ou de possibilité de sursis au premier manquement.

Suite à cette préconisation, Jean Bassères, Directeur général de Pôle emploi, a précisé sur France Info le mercredi 5 juin qu’une instruction était en cours de rédaction pour rappeler le règlement des différents types de radiation.

Prendra-t-il en compte réellement cette préconisation ? En espérant que les motifs d’insuffisance de rechercher d’emploi et de 2 refus à une offre raisonnable d’emploi soient également repensés au vu du marché du travail sclérosé et par des conseillers de Pôle emploi qui ne maîtrisent pas tout le référentiel « métiers » actuels et les compétences y afférentes.

Enfin, pour améliorer le suivi du demandeur d’emploi, le recours systématique aux prestations (atelier pour écrire un CV, une lettre de motivation, définir son projet professionnel) doit être limité et les conseillers de Pôle emploi doivent mieux adapter leur prescription au profil du demandeur d’emploi. Le conseiller Pôle emploi devrait être plus attentif au profil du demandeur d’emploi et de lui proposer un accompagnement en adéquation avec son projet professionnel.

Défense des droits de chômeurs

La rapporteur souhaite logiquement renforcer les comités de liaison mis en place avec les associations de demandeurs d’emploi et les organisations syndicales et rendre publiques leurs préconisations.

La représentation des demandeurs d’emploi doit être assurée au sein du conseil d’administration de Pôle emploi et organiser cette représentation en lien avec les associations existantes.

Les bénéficiaires du RSA

Le rapport soulève les difficultés d’accompagnement des bénéficiaires du RSA dues notamment à une mauvaise articulation entre Pôle emploi et les acteurs sociaux du département.

Monique Iborra préconise donc d’alléger les formalités administratives lors de l’entretien d’inscription et de centrer cet entretien sur l’accompagnement du demandeur d’emploi.

Il est nécessaire de mieux mesurer les moyens consacrés par Pôle emploi au suivi des bénéficiaires du RSA et ceux consacrés par les départements à la politique d’insertion, notamment en faveur des demandeurs d’emploi.

Enfin, le suivi des bénéficiaires du RSA les plus éloignés de l’emploi doit être mieux défini par rapport aux chômeurs en fin de droit afin qu’ils bénéficient d’un « accompagnement renforcé ».

Formation

Suivant les recommandations de Michel Sapin lors de son audition, le rapport suggère d’améliorer la coopération entre les acteurs de la formation professionnelle en développant un lien opérationnel entre la région et les conseillers de Pôle emploi et en mettant en place un véritable pilotage régional de la politique de formation.

Il est temps de généraliser la mise en place d’un système d’information permettant aux conseillers de Pôle emploi de connaître l’ensemble de l’offre de formation ainsi que les disponibilités en temps réel, et en leur offrant un outil de prescription en ligne.

En effet, le retour des demandeurs d’emploi est que souvent le conseiller Pôle emploi n’est pas en mesure de lui proposer la formation adéquate par méconnaissance du système de formation professionnelle.

Pour plus de cohérence, la région serait l’acheteur unique pour son compte, celui de Pôle emploi et des départements. Il serait également utile d’expérimenter d’autres formes d’achat de formation que par le biais de la procédure des marchés publics afin d’améliorer la réactivité du dispositif de formation dans son ensemble.

Enfin, le rapport indique que la POE doit être privilégiée pour améliorer le retour à l’emploi des chômeurs par la formation professionnelle et fusionner la POE et l’AFPR.

Pour conclure, Monique Iborra propose à titre exceptionnel de faire un état de l’évolution du service public de l’emploi à mi-parcours suite à la publication de ce rapport d’information.

Pour aller plus loin :


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