Les récents scandales impliquant le gouvernement Obama – mises sur écoute de communications, contrôles fiscaux d'opposants – sont inquiétants pour les citoyens américains et pour le reste du monde.
Par Daniel Hannan, depuis Oxford, Royaume Uni.
Vous vous souvenez de tous ces survivalistes hirsutes se terrant dans des territoires comme l'Idaho, et de leurs théories du complot paranoïaques anti-État ? Ils ont tout de suite l'air moins paranoïaques...
Par ailleurs, le reste d'entre nous devons brusquement adapter notre vision du monde. La révélation que le gouvernement des États-Unis met automatiquement sur écoute les communications en ligne remet en question ce que nous pensons de la liberté, de la vie privée, d'internet, et, ce qui n'est pas des moindres, ce que nous pensons de l'Amérique.
Voilà, en bref, ce qu'il s'est passé. En 2007, le Congrès a adopté une loi qui autorisait la National Security Agency à intercepter des données étrangères (c'est-à-dire des communications entre deux interlocuteurs non-américains) sans mandat des États-Unis. Il a été dit que ce pouvoir était nécessaire pour la lutte contre le terrorisme. (« La nécessité, disait Pitt le Jeune, est la défense pour chaque violation de la liberté humaine. Elle est l'argument des tyrans ; elle est la croyance des esclaves. »)
Comme toujours, les autorités ont étendu progressivement leur mission. Il s'avère aujourd'hui que la NSA a eu directement accès à des données provenant de Microsoft, Yahoo, Google, Facebook, PalTalk, YouTube, Skype, AOL and Apple.
La plupart des compagnies sus-citées ont nié toute connaissance ou complicité – toutefois, les types hirsutes de l'Idaho ont bien vite souligné le fait que certaines dénégations précisent uniquement qu'il n'a pas été accordé d'accès « direct » aux données à la NSA. Certains conservateurs prennent un air sombre et murmurent à propos du copinage de longue date entre Google et les démocrates, ces derniers étant soupçonnés d'avoir tiré un grand profit des techniques Google de profilage pour cibler leurs électeurs. Il est sûr que l'administration Obama ne s'est pas perdue en excuses à propos de toute cette affaire.
Le scandale n'a pas éclaté dans des circonstances quelconques. Il a suivi la révélation que l’État fédéral recueillait des informations venant de Verizon, le géant des télécommunications. Il n'a suivi que de quelques semaines la nouvelle choquante selon laquelle les autorités fiscales américaines ciblaient volontairement les groupes de pression conservateurs. On se croirait dans un film où les autorités mettent illégalement sur écoute tout le monde jusqu'à ce que Will Smith ne le révèle au grand jour.
Cette fois-ci, le rôle de Will Smith a été joué par le Washington Post et le Guardian – ce qui est tout à l'honneur de ces deux journaux, qui ont fait primer leur dévotion aux libertés individuelles sur leur respect pour Barack Obama. Les jours où les gauchistes laissaient leur soutien tactique à Obama prendre le pas sur tout autre considération sont de toute évidence révolus. Même le New York Times a déclaré dans la première version de son éditorial que le gouvernement « a maintenant perdu toute crédibilité » – bien que sa conscience progressiste se soit manifestée par la suite et que la phrase ait été allongée en « perdu toute crédibilité en la matière ».Pas de risque qu'Obama s'en soucie : après tout, il n'est pas confronté à de nouvelles élections. Nous autres, en revanche, devrions être vivement préoccupés. Les États-Unis sont censés être un pays où de telles choses n'arrivent pas. Petit à petit, au nom de l'anti-terrorisme, les gouvernements successifs ont limité les libertés individuelles. La république américaine, selon l'expression de Russell Kirk, se comporte comme un empire américain.
L'Amérique mérite mieux, et le reste du monde attend mieux d'elle.
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Sur le web. Traduction : Constance Mas pour Contrepoints.