Escapade, hier, dans les Monts pour accompagner un petit groupe de retraités descendus tout exprès de Normandie. Nous nous guidons surs mon premier bouquin constitué de sept récits qui racontent, à diverses périodes de l’Histoire, une anecdote s’étant déroulée dans sept villages différents. Une autre manière de rencontrer un terroir ancré depuis la nuit des temps. Les visiteurs retrouvent avec plaisir l’exubérance naturelle de leur région. Mais, comme écrit Jean-Christophe Ruffin dans son "Pèlerinage à Compostelle", il faut se méfier de la verdure. Si l’herbe est si drue, si les buissons sont si touffus, si les arbres étalent leur ombre aussi largement et si les sous-bois sont si sombres, c’est que la pluie les a copieusement arrosés. Elle arrose aussi, à l’occasion, le voyageur qui admire un panorama ouvert sur la campagne en contrebas. Mais il rabat sa capuche, plaisante dans le patois de sa contrée et lorsque l’averse accorde une accalmie, s’ébroue comme un chien qui sort de l’eau et reprend sa route. Nous pénétrons au cœur de modestes hameaux presque déserts. Les jeunes sont partis à la ville, au collège, au lycée. Quelques enfants jouent, ici ou là, dans des courtils bien fermés. Ils ne sont pas assez nombreux pour constituer des bandes et se jeter à l’assaut des cerisiers pour les piller. Seuls les merles et les geais s’en chargent. Marthe Dumas, du mas du Goth, tout de noir vêtue comme à son habitude, nous ouvre cependant sa porte pour nous conter quelques souvenirs de sa jeunesse autour d’un clafoutis. Sa chatte, en quête de caresses, se frotte contre les jambes fatiguées des "touristes". On parle de traditions, on échange des souvenirs, on rit et on se congratule. Le repas de midi est servi autour de la table d’hôte de ma voisine Hélène. Crudités du jardin en entrée, filet de porc de la ferme et champignons des bois alentours, fromage de chèvre et, bien entendu, teurgoule normande pour caresser les invités dans le sens du poil. L’après-midi est consacrée à l’ascension du Mont par les chemins de randonnée. Quelle altitude, s’inquiète un marcheur lorsque nous parvenons au sommet ? 514 mètres ! Moi, je dirais 714 ! Bah, on donne bien la hauteur qu’on veut, après tout. C’est vrai, qu’à pied, on ne compte pas comme dans les livres. Mais qu’importe ? Le village de Bachellerie, (ici, on appelle village le moindre lieu-dit) nous accueille en grande cérémonie avec goûter obligatoire dans les locaux lambrissés de pin de l’écurie d’un ami. Nous assistons au débourrage d’un jeune poulain de l’année dernière. Applaudissements de rigueur et retour dans la vallée. Soirée avec Jacques Ibert et sa musique symphonique et conclue par un calvados de derrière les fagots. Ils sont repartis ce matin avec plein d’images chatoyantes dans les yeux. Certains reviendront peut-être. Dans le langage marketing des professionnels, on appelle cela une "démo." Quoi qu’il en soit, des liens ont été créés qui devraient perdurer. L’homme est ainsi fait que son instinct grégaire le pousse à se réunir régulièrement autour d’un verre de cidre.
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