Innovation de rupture: entre marchés marginaux et reflexion sur les motivations du client

Publié le 25 juin 2013 par Pnordey @latelier

Afin de pérenniser l’innovation, les entrepreneurs devraient lancer dans un premier temps leurs produits dans les marchés marginaux et penser davantage aux actions que leurs clients souhaitent accomplir avec les produits.

En créant en avril dernier une commission chargée de l’innovation « de rupture » et en y consacrant 150 millions d’euros, la France montre une réelle volonté de stimuler la créativité des entreprises. Au cœur de ce nouveau dispositif, il est essentiel de rappeler que l’innovation de rupture désigne avant tout «  un processus dans lequel des produits complexes et coûteux sont rendus plus abordables et simples à utiliser et de ce fait adoptables par le grand public », précise Clayton Christensen, expert du domaine, qui était à l’origine de ce terme dans les années 90. Lors de la conférence « Peut-on encore innover en France » tenu hier à l’école polytechnique,  il conseille les entrepreneurs français de viser plus petit, au niveau du marché-cible,  et de viser mieux, quant à la fonction du produit, s’ils souhaitent avoir des succès pérennes dans leurs domaines.

Pour s’inscrire dans la durée, il faut commencer par un petit marché

En effet, d’après Clayton Christensen, quand la technologie de rupture n’est pas performante, il vaut mieux la proposer à un marché marginal. Car en effet les géants hésitent à l’adopter car non seulement elle n’est pas fonctionnelle à 100% mais surtout elle ne rapporte pas autant que leurs technologies traditionnelles, limitant ainsi la concurrence.  « Les entreprises bien établies auront tout intérêt de laisser à une startup ce petit marché, où la profitabilité est quasiment nulle face à leurs marchés principaux » analyse Clayton Christensen.  Néanmoins au fur et à mesure que cette technologie se perfectionne, une startup pourra occuper de plus en plus de marché et pourrait même remplacer les géants. « Par exemple, il serait stratégique pour Renault de lancer Twizy, sa nouvelle voiture électrique au prix abordable sur le marché des jeunes adultes, qui justement n’a pas beaucoup de moyens» conseille-t-il, « car une voiture urbaine qui est faite pour parcourir une courte distance n’est pas adaptée au marché traditionnel, là où les entreprises automobiles font la plupart de leurs chiffres d’affaires ».

Adoptez la logique de « get things done »

Environs 95% des nouveaux produits lancés sur le marché ne vont pas rencontrer de succès. « Car leurs créateurs réfléchissent en terme de segmentation du marché ». Selon Clayton Christensen, les entreprises doivent cesser de penser aux profils des clients mais plutôt aux actions que ces derniers souhaitent accomplir avec l’achat de leurs produits ou de services. C’est l’idée derrière la notion de « la réalisation d’une tâche » (get things done) A titre d’exemple, une chaine de fastfood s’est rendue compte que les clients achetaient leur milkshakes, non pas pour le goût, mais plutôt pour remplir les ventres avec quelque chose de non consistant, tout en maintenant un objet dans la main lors de longs trajets ennuyeux en voiture. « Ce que les startups ont du mal à comprendre, c’est que les clients achètent rarement ce qu’elles pensent leur avoir vendu. » conclut-il.