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Chlorophydien.

Publié le 27 juin 2013 par Rolandbosquet

chlorophyle

   L’homme a besoin de verdure. La femme préfère le sable des plages où elle étale sa longue serviette de bain aux couleurs vintage en attendant le coucher du soleil. L’homme, lui, a porté son choix sur la verdure. C’est chez lui chlorophydien ! Cette appétence remonte à la nuit des temps, lorsque, pour échapper aux lions et aux éléphants, il se réfugiait au milieu du feuillage vert des albizzias et autres baobabs. Plus tard, lorsqu’il en descendit pour gambader dans la savane, il garda, rivé à l’âme, le souvenir de ces jours heureux.  Il installa son courtil au cœur de vastes prairies d’où émergeaient, çà et là, des cacatoès, des palmiers-dattiers et des pommiers. Ève ne connaissait pas encore les plaisirs du bronzage et partageait gaiement avec Adam les joies des courses folles dans les hautes herbes. C’est ainsi qu’elle découvrit, un jour, une Granny-smith tombée de sa branche. Instinctivement, comme elle le faisait pour les fraises des bois, les myrtilles et les framboises macro, elle la porta à sa bouche. On sait ce qu’il en advint. Chantal Thomass n’avait pas encore inventé son ravissant "string". Ève fut obligée de se contenter d’une feuille de vigne sauvage. Ce fut, entre autres, le début de la culture du vignoble. L’homme, quant à lui, fort déçu de cette mascarade, décida de tondre les pelouses à hauteur de cheville afin de bien dégager le paysage. Il peine depuis à entretenir son jardin. Car, pour qu’il demeure bien vert comme aux premiers temps, la pluie est indispensable. Et c’est une course permanente entre averses et beau temps, ondées et soleil, giboulées et ciel d’azur. Aujourd’hui encore le jardinier en est tributaire. Ève a troqué sa feuille de vigne pour le manteau de fourrure en hiver et la robe à carreaux en été. Elle ajoute un bijou, parfois, un collier, une bague, rarement une couronne. L’homme, quant à lui, coiffe son chapeau de paille et arpente les salons de jardinage à la recherche de la tondeuse automatique qui lui permettrait de s’allonger dans sa chaise longue. Son rêve serait d’avoir le temps de regarder l’herbe pousser. Hélas, il doit, le plus souvent, soit s’abriter sous l’auvent de sa terrasse soit chevaucher son engin qui pétarade avec tant d’ardeur qu’il éloigne les merles et les mésanges. L’homme garde au cœur la nostalgie du passé. L’homme est triste. C’est pourquoi, après avoir remisé sa machine sous son appentis, il boit un verre de vin pour oublier. Pour oublier qu’il devra recommencer demain. Et encore demain sans doute. Si le ciel le lui permet. On voit par là combien manger des pommes peut être lourd de conséquences ! Mais comme dit le proverbe bantou bien connu : mieux vaut pour l’homme boiter de la jambe droite qu’entendre sa veuve pleurer dans la clairière.

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