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Pire que les mensonges, ces sujets dont on ne parle pas

Publié le 27 juin 2013 par Lino83

Pire que les mensonges, ces sujets dont on ne parle pas  

Jeudi 27 Juin 2013 à 07:00

Laurent Neumann - Marianne

 

Ils sont légions les adeptes de cette nouvelle stratégie consistant à mettre sous le tapis tout ce qui peut déranger. Mentir est une perte de temps. Mieux vaut ne pas parler du tout des sujets qui fâchent ou de l’actualité qui gêne. Des exemples ?  


DSK sur Tf1 - DURAND FLORENCE/SIPA
  DSK sur Tf1 - DURAND FLORENCE/SIPA     En voici un, énorme, caricatural. Pour expliquer la Bérézina de Villeneuve-sur-Lot,  les socialistes ont dégainé tout l’arsenal de leurs habituelles balivernes : la faute à l’affaire Cahuzac (sans doute, un peu), la faute à la multiplication des candidatures (ils nous avaient déjà fait le coup en 2002 en prétendant que la candidature de Christiane Taubira avait causé la perte de Lionel Jospin), la faute à la crise, la faute à la météo dominicale…
La faute à tout le monde, sauf aux socialistes, sauf à la politique menée par le gouvernement. Les socialistes, comme hier la majorité UMP, sont devenus champions du monde toutes catégories pour battre leur coulpe sur le torse du voisin.
  Evidemment, aucune de ces explications n’a convaincu personne et l’angoisse reste entière : quelle réponse politique, sociale, économique, morale, civique, citoyenne, apporter à l’inexorable progression du vote Front National ? Bonne question, merci de me l’avoir posée. Sauf que… silence.
  Au Parti socialiste, le sujet est jugé bien trop grave pour en parler. Pas un mot ou presque lors des réunions des groupes parlementaires au Sénat et à l’Assemblée. Pas le moindre débat lors du bureau national du PS rue de Solférino, mardi. Quand le FN faisait 20% en 2002, la gauche descendait dans la rue ; à 47% dans l’Oise ou à Villeneuve-sur-Lot, elle se tait. Circulez, il n’y a rien à voir, rien à dire, rien à faire. Le PS est un tramway nommé Harlem Désir qui fonce droit dans le mur… en silence !
  A l’UMP aussi, ils sont légions les adeptes de cette nouvelle stratégie consistant à mettre sous le tapis tout ce qui peut déranger. L’affaire Guéant  ? No comment. La « bande organisée » de l’affaire Tapie  ? Pas d’avis. Takieddine – oui, celui qui accueille Copé dans sa piscine ! - avoue avoir financé la campagne de Balladur en 1995 avec des rétrocommissions   en liquide provenant de ventes d’armes à l’Arabie Saoudite et au Pakistan ? Silence. Sarkozy et l’argent de Kadhafi ? En privé, on dit craindre le pire, mais en public, pas un mot. La bataille idéologique Copé-Fillon ? Motus.
  Et quand l’un d'eux, Bruno Le Maire en l’occurrence, s’avise de vouloir sortir la tête de la tranchée, ils le flinguent d’une balle en plein cœur. Anonymement, évidemment.
  L’ancien ministre de l’Agriculture a eu le malheur de proposer la fin du cumul des mandats dès 2014, la démission automatique de la fonction publique de tout haut fonctionnaire élu au Parlement, la limitation à trois du nombre de mandats nationaux successifs ou, pire, le strict contrôle de l’immigration clandestine et la révision des critères d’attribution de l’aide médicale pour les étrangers.
  Et d’ajouter : « Je propose qu’à droite, nous parlions de manière moins provocante, mais qu’on aille au bout de nos idées (…) Quand des gens du voyage restent sur un terrain interdit et que le préfet ne fait rien, le FN prend dix points de plus ». On peut être d’accord ou pas avec Le Maire, mais tout cela mériterait au moins un débat, serein, courtois, respectueux. Non, débat interdit.
  Aussitôt, Lemaire s’est retrouvé exécuté en place publique. Le journal Le Monde   dresse le bûcher : « Bruno Le Maire, rattrapé par la droitisation de l’UMP ». Un ami de Copé craque l’allumette : « il ne sait pas où il habite. Le souci avec lui, c’est que l’on ne sait pas ce qu’il propose, puisque cela dépend de la saison ». Un proche de Sarkozy met le feu sous la paille : « Avec son double discours, il fait preuve de schizophrénie permanente ». Un dernier souffle sur les braises : « C’est un type intelligent qui dit des choses intelligentes, mais il a le charisme d’une huître ». Le Maire, rentre chez toi, tu gênes !  
Et l’on pourrait ainsi multiplier les sujets dont il ne faut surtout pas parler.
  La loi bancaire qui n’aura aucun effet sur les by Text-Enhance"> by Text-Enhance"> by Text-Enhance"> by Text-Enhance">banques : la gauche ne veut pas dire qu’elle s’est reniée, la droite ne veut pas dire que ça l’arrange.
  La suppression de 3200 postes de fonctionnaires en 2014 : la droite refuse d’admettre que la gauche – forcément dépensière - coupe dans les effectifs ; la gauche – qui fait de l’austérité sans le dire - a honte de l’avouer. Donc, pas un mot.
  Dominique Strauss-Kahn qui revient jouer les oracles économiques au Sénat : parlons d’autre chose.
  Le commerce des armes qui, malgré la crise, a augmenté de 30% depuis 2008 pour approcher la barre des 100 milliards de dollars : silence, on tue !  
Encore un petit non-dit, avant de se quitter. Dans L’Express,  Pascal Lamy, le directeur général de l’OMC (jusqu’au 31 août prochain), déclare : « C’est la Chine qui a fait le moins d’erreurs économiques ». Oui, la Chine, qui pollue la terre entière, qui se moque du droit du travail et des droits de l’homme. De Pascal Lamy, on attendait plutôt qu’il dise : « C’est la Chine qui fait le plus d’horreurs économiques ».
Rappelons en effet qu’officiellement, Pascal Lamy est de gauche, que son nom a circulé – et circule encore - comme premier ministrable possible en lieu et place de Jean-Marc Ayrault, qu’il est l’idole des patrons – et pour cause ! - et que des élus (de gauche et de droite) se démènent dans les allées du pouvoir pour faire sa campagne.
  Mais de cela non plus, il vaut mieux ne pas parler trop fort… Ca étoufferait la droite d’admettre qu’elle soutient des gens officiellement estampillés à gauche ! Ca défriserait la gauche d’avouer qu’elle compte des personnalités comme Pascal Lamy dans ses rangs.

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