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Barroso en ligne de mire

Publié le 28 juin 2013 par Lino83

Toussaint Gilles Publié le vendredi 28 juin 2013 à 05h42 - Mis à jour le vendredi 28 juin 2013 à 05h42

International Le président   de la Commission est ciblé par la France. A raison ?Union européenne

Réactionnaire", d’un côté. "Carburant du Front national", de l’autre. L’Europe ne sort pas grandie des récents échanges d’amabilités qui ont opposé la France et José Manuel Barroso. Le sommet européen des chefs d’Etat et de gouvernement, qui se tient ces jeudi et vendredi à Bruxelles, s’est ainsi ouvert sur un petit parfum de guerre froide entre François Hollande et le président de la Commission, même si les deux camps semblent jouer la carte de l’apaisement.

Alors qu’une partie des pays européens s’enlisent dans une crise sociale qui alimente une lame de fond populiste, cette querelle illustre une tendance qui risque de se confirmer dans les mois à venir. A un an des élections européennes, la personnalité de Barroso va concentrer les rancœurs des déçus de l’Union européenne. Ou du moins de ce qu’elle est devenue.

"On est un peu désolé de cette guerre des mots", glisse un diplomate belge. "Pour certains Etats membres, Barroso incarne l’ultralibéralisme. Mais d’un autre côté, il est aussi critiqué par les Britanniques parce qu’il ne serait pas assez proactif. C’est un peu le punching-ball de tout le monde", enchaîne-t-il, soulignant que, quelle que soit la personne qui la chapeaute, ce qui importe à notre pays, "c’est avant tout la Commission dans son rôle de moteur de la législation".

Le problème justement, c’est que le Portugais  "n’a pas réussi à mobiliser les ressources fantastiques de ce corps de fonctionnaires d’élite qu’est la Commission" , juge un autre fin connaisseur des arcanes européens.  "Il a plutôt joué un rôle d’étouffoir par son excessive prudence. C’est un homme qui génère du conformisme autour de lui" , poursuit-il, déplorant son  "style autoritaire, mais sans leadership" . Résultat des courses :  "Il ne domine pas la scène"  et n’a pas su apporter les impulsions nécessaires à l’UE, car "il va dans le sens du vent et n’est pas habité par un désir de changer les choses". Mais il est trop facile de tirer sur le pianiste, relève encore notre interlocuteur. "Dire que tous les malheurs de l’Europe viennent de Barroso, c’est ridicule. Il est la partie visible de l’iceberg", à savoir l’impasse dans laquelle se trouve notre système économique basé sur la croissance.

Si M. Barroso concentre une partie des critiques, "c’est parce qu’il est l’instrument d’un conflit ouvert entre l’Europe du Nord qui défend la rigueur et celle du Sud qui plaide pour une stratégie un peu plus attentive aux souffrances sociales considérables des populations", commente de son côté Renaud Dehousse, directeur du Centres d’études européennes de Sciences Po à Paris.

La Commission actuelle - composée non plus de techniciens comme jadis, mais d’anciens responsables politiques nationaux - est la plus à droite de l’histoire de l’intégration européenne, note-t-il. "Mais Barroso ne l’a pas imposée, elle est le reflet du choix des gouvernements nationaux qui sont dans leur majorité de droite. Il est donc normal que cela suscite des réactions au sein des gouvernements qui ont une ligne plus à gauche". Pour le Pr Dehousse, le président de l’exécutif européen a néanmoins choisi de faire jouer à celui-ci "un rôle relativement effacé", se contentant de relayer la ligne dominante. Comprenez, celle d’Angela Merkel et des pays partisans de la rigueur. Un point de vue partagé par son collègue Quentin Michel (Université de Liège) pour qui M. Barroso est aussi " soumis à un phénomène d’usure, car c’est l’une des rares personnalités politiques actuelles qui soit en place depuis si longtemps".

La virulence de la charge française a surpris au Berlaymont. La Commission  a d’ailleurs riposté avec une vigueur inédite, refusant de laisser passer des attaques ad hominem. D’autant que le président doit encore assumer la fonction pendant un an et demi. Selon une source européenne, la nervosité française s’explique par les difficultés de ce pays à entreprendre des réformes profondes, "alors que le gouvernement et le président sont  affaiblis". "Ils n’aiment pas ce qu’ils doivent faire et ils ne peuvent pas attaquer frontalement l’Allemagne, alors ils s’en prennent à la Commission".

S’il est loin de faire l’unanimité, José Manuel Barroso peut néanmoins se targuer des compliments prononcés publiquement ce jeudi par le président du Parlement: "J’ai été longtemps ton opposant, mais je dois dire que tu as joué ton rôle d’honnête faiseur de deal" (sur le budget européen), a ainsi déclaré Martin Schulz. Un social-démocrate… allemand.

G.T. et OleB.


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