Les hauts-fonctionnaires américains peuvent interférer dans les choix financiers des acteurs médicaux, ce qui produit des situations absurdes sur le point médical.
Par A. Barton Hinkle depuis les États-Unis.
Un article de Reason Magazine.
Les défenseurs du droit à l'avortement se sont indignés à la Virginia Attomey General Ken Cuccinelli que le tout puissant Conseil de la Santé ait approuvé de nouvelles réglementations médicales. Ces défenseurs craignent que les bureaucrates n'alourdissent la législation en vigueur et ne réduisent ainsi l'accès aux soins.
En vérité, les bureaucrates restreignent déjà l'accès au soins. Et ils en ont désormais l'aval judiciaire. La semaine dernière, un juge de district fédéral a rejeté la poursuite judiciaire de deux médecins qui contestaient le contrôle arbitraire et capricieux de l’État sur les traitements médicaux. Le juge a rétorqué que l’État était parfaitement en droit de réduire l'accès des patients aux soins.Le premier médecin, Mark Baumel, pratique une méthode de dépistage du cancer du colon bien moins invasive que celle recommandée par le gouvernement. Lorsqu'il a tenté d'offrir les mêmes services en Virginie, l’État s'y est opposé. Il ne s'y est pas opposé pour la dangerosité de la procédure ; elle n'est pas dangereuse. L'Etat s'y est opposé parce qu'il ne voulait pas que Baumel achète le CT scanner nécessaire à la procédure. Pourquoi ? Parce qu'il y avait aux alentours d'autres centres médicaux dotés de CT scanners et les fonctionnaires ont donc jugé l'achat – accrochez-vous – non nécessaire. Une même chose est arrivée au Dr. Mark Monteferrante. Longtemps auparavant, il avait aidé les propriétaires du centre de radiologie de Virginie du Nord où il avait travaillé à acheter une deuxième machine IRM. Il lui aura fallu attendre 5 ans pour obtenir une autorisation de l’État et plus de $175,000 de frais. Par la suite, le centre de radiologie a été vendu. Monteferrante veut donc en démarrer un autre par lui-même. Mais cela nécessite d'acheter de nouveaux équipements et surtout de reproduire une longue et coûteuse procédure.
Tout ceci est le résultat de quelque chose appelé le processus du certificat de nécessité (CDN). Le régime du CDN de Virginie (appelé Certificat de Nécessité Publique) donne aux hauts-fonctionnaires le pouvoir de décider si, dans leur sagesse infinie, un équipement ou une machine médicale est nécessaire dans une aire donnée. L'idée sous-jacente est qu'en restreignant l'approvisionnement des services médicaux, l’État peut diminuer les montants des dépenses de santé.
C'est la théorie. En pratique – comme toujours – ça ne fonctionne pas. La Federal Trade Comission et le Département de la Justice ont récemment conclu dans un rapport sur ce problème : les régimes de CDN « ne remplissent pas leurs objectifs de réduction des coûts de santé » et « des études empiriques ont prouvé que le programme CDN échoue à maintenir les coûts et tend même parfois à les augmenter. » Le rapport a également indiqué que les exigences du CDN peuvent être anti-compétitives. Pourquoi ? Parce que le processus donne aux fournisseurs d'équipements de santé déjà installés l'opportunité d'écarter toute compétition naissante sur le marché.
Cas typique : il y a 5 ans, le centre de radio-oncologie de Richmond voulait déplacer un équipement de traitement par radiations utilisé à l'hôpital St Mary vers un centre contre le cancer à Hanovre. Ce déplacement nécessitait l'approbation du CDN. L’État a répondu par la négative : le centre contre le cancer VCU de Massey proposait déjà des services de radio-oncologie à Hanovre et – dans leurs termes - « les administrateurs du VCU s'y sont opposés, car ceci pourrait détourner une partie de leur clientèle. »
Il y a quelques mois, Baumel et Monteferrante – à l'aide de l'Institut pour la Justice basé à Arlington – ont poursuivi en justice le système CDN de Virginie. Ils ont démontré, entre autres arguments, que ce système n'assure plus un traitement égal à tous devant la loi. Le système CDN de Virginie s'applique à certains services mais en dispense beaucoup d'autres de réglementations : médecins libéraux, services des grands brûlés, ambulances, maisons de retraite, guérisons par ultrasons, centre de soins pour toxicomanes, etc...
Ils ont également montré que le régime CDN interfère avec l'économie inter-États. Ce qui est le cas, à en croire la logique de l'Obamacare. Si une seule personne refusant de payer pour une assurance maladie peut affecter l'entièreté du système d'assurance maladie national, alors le refus de la Virginie d'approuver la construction d'un tout nouvel hôpital affecte le marché dans une toute autre mesure.
La semaine dernière, le juge Hilton a examiné l'affaire. Les restrictions économiques imposées aux acteurs du marché sont très facilement justifiables par un test dit de « base rationnelle » même lorsque ceux-ci affectent la liberté de choisir du patient. Comme l'a expliqué Hilton, la seule condition nécessaire à la validation du test est la croyance que quelque chose a besoin d'être corrigé. Si tel est le cas, il se pourrait qu'une mesure législative aille dans ce sens. « Un choix législatif n'est plus sujet de recherche de faits et de la vérité mais de croyances qui peuvent être invalidées empiriquement ». En d'autres termes, les commissions peuvent ordonner des restrictions pour la plus petite justification concevable. L’institut pour la Justice nous dit que Baumel et Monteferrante vont faire appel. S'ils ne le font pas, ou si (plus probable) les tribunaux défendent Hilton, l'affaire tombera dans les mains de l'Assemblée Générale qui décidera de l'avenir du système CDN.
Mener l'attaque pour l'abrogation revient donc aux militants favorables aux droits à l'avortement qui insistent quotidiennement sur le fait que les choix médicaux devraient revenir au patient et à son médecin. Ces militants pensent que de tels choix ne devraient pas être laissés à de tierces parties imposant leur vagues idées du bien commun. Ces militants ont raison. Mais en Virginie, ce que désire le patient n'est pas pertinent. Tant que le système de CDN persistera, l’État aura toujours le dernier mot.
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Traduction : Eriul pour Contrepoints
Sur le web.