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politiques hors sol

Publié le 05 juillet 2013 par Mister Gdec

nourrisseur_porcAlors que le paysage oligarchique est en train de se craqueler de partout, que les citoyens doivent se saigner aux quatre veines et payer les frais d’une crise dont ils ne sont pas à l’origine sinon par leur passivité, nos braves député(e)s semblent se faire plus que tirer l’oreille pour respecter certaines exigences démocratiques de premier niveau. Ainsi, un grand nombre de nos élus nationaux, et plus particulièrement à droite (et au mal nommé PRG),  ont eu des états d’âme quant à la nécessité de voter ou non un projet de loi réduisant une pratique démocratiquement toxique :  le cumul de mandats, ou l’art de rester vissé sur ses multiples sièges pour sauvegarder ses avantages acquis quand tout le monde ailleurs se serre la ceinture.

Hier, les parlementaires ont cependant adopté un projet de loi en première lecture,  mais elle a été tellement édulcorée ¹ qu’on se demande en quoi elle va vraiment changer les choses… D’autant plus qu’il n’est pas du tout certain qu’elle voie le jour, puisqu’il lui reste à franchir un obstacle, et de taille : le barrage des sénateurs, encore plus opposés que les parlementaires à ce projet, et dont la composition n’est majoritairement "de gauche" que dans une proportion très serrée…

On peut m’accuser de populisme de bas étage (je sais, j’insiste, exprès), mais personne ne m’ôtera de l’idée que ce que voient avant tout les gens non politisés à travers la pratique du cumul des mandats, c’est  la volonté étrangement obstinée de certains élus, d’ailleurs essentiellement masculins, de voir se superposer plusieurs couches de ressources financières. Alors qu’à eux,  "gens de peu" (d’argent, pas de richesse…), on leur demande sans cesse de nouveaux sacrifices, ce que je tiens à marteler volontairement ici puisque certains ne semblent pas encore avoir compris à quel point ce sentiment d’injustice est fort dans la population.

La résistance au changement constitué par cette lutte contre le cumul des mandats est d’autant plus forte qu’elle est alimentée par un réflexe corporatiste.  Normal, politique est devenu une profession, ce que je condamne, et à ce titre la corporation politicienne utilise les mêmes ficelles que celles du privé, ce qui est particulièrement contraire à l’esprit démocratique : je veux parler du lobbying. Qui de mieux placé qu’eux pour en user et en abuser ?  Quelques exemples fort instructifs nous ont été fournis hier par Médiapart ², dans un excellent travail que l’on doit au courage d’un homme, "Hervé Lebreton, citoyen lambda choqué par l’opacité qui règne sur cette fameuse « réserve »".  Médiapart nous fait profiter utilement des documents qu’il a obtenus. Où l’on apprend qu’un certain Gérard Larcher, ci-devant ancien président du Sénat (UMP), a utilisé sa « réserve parlementaire » de manière électoraliste lors des dernières sénatoriales de 2011 : des maires qui s’apprêtaient à glisser un bulletin dans l’urne ont été chouchoutés.

[...] Rappelons qu’aux sénatoriales, ce ne sont pas les citoyens lambda qui votent, mais les maires, conseillers municipaux, généraux, etc. Ainsi, quand Gérard Larcher (ou tout autre sénateur) accorde 10 000 ou 20 000 euros à tel ou tel village, c’est-à-dire à tel ou tel maire, il fait directement une fleur à un électeur. [...] Gérard Larcher a distribué 83 % de sa « réserve », soit 2 600 891 euros, dans des communes « votantes ». CQFD. (vous pouvez consulter le détail des sommes allouées dans sa grande générosité désintéressée, dans le seul souci de l’intérêt collectif par Mr Larcher ici)

De toute évidence, le dégraissage du mammouth politique institutionnel français doit commencer. Et vite. Collectivement, par notre passivité et notre impuissance, nous sommes en train de donner à nos concitoyens une image du travail politique (c’en est un !) la plus désastreuse qui soit. Urgent, agir.

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¹… ainsi, une disposition pourtant proposée par la commission parlementaire elle-même, l’interdiction d’exercer plus de trois mandats parlementaires de suite, a été repoussée. Et de plus, la loi ne s’appliquera pas avant… 2017. Un calcul politicien pour permettre au futur gouvernement (certainement pas socialiste au train où vont les choses) de supprimer cette loi,  qui dessert bien trop les intérêts particuliers des députés de droite comme de gauche ?

² Merci à Brian de Palma, qui se reconnaîtra, d’avoir eu la gentillesse de m’envoyer le contenu (payant) de cet article. Sans lui j’en aurais été privé…  c’eût été particulièrement frustrant.


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