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Pour une renationalisation du monde

Publié le 08 juillet 2013 par Edgar @edgarpoe

La première grossièreté de ce billet consiste à infliger au lecteur un titre peu clair - que j'espère assez intrigant néanmoins pour avoir éveillé la curiosité.

Le deuxième va consister à rattacher sous ce titre un plaidoyer qui n'est pas le mien mais qui vient de Dani Rodrik, professeur d'économie du développement à Harvard.

J'avais déjà cité Rodrik à propos de son triangle d'incompatibilité (billet à lire absolument).

Anecdotiquement, un rédacteur du Taurillon s'était empressé de conclure qu'il nous fallait plus d'Europe, commettant, à mon sens, un magistral contresens.

Le nouvel article de Rodrik, où celui-ci écrit que "donner le pouvoir à des bureaucraties supranationales, comme l'OMC ou l'Union européenne, peut déboucher sur un déficit démocratique et une perte de légitimité", devrait donner à réfléchir aux taurillons (je gage qu'après réflexion, ils en concluront qu'il nous faut plus d'Europe, mais il ne faut jamais désespérer).

Que dit donc Rodrik (qui, accessoirement est turc, donc probablement plus au fait des problématiques européennes que l'universitaire américain moyen) ?

Il plaide pour une renationalisation des politiques publiques mondiales, plutôt que pour une gouvernance globale qu'il juge irréaliste.

Selon lui, les pressions venant de citoyens nationaux préoccupés par des questions mondiales sont bien plus efficaces que les mesures prises par les organes de la "gouvernance globale".

Les décisions des organismes supranationaux sont, par nature, inefficaces : "Parce que leur responsabilité envers les électorats nationaux est indirecte et incertaine, ils ne créent pas l'allégeance - et la légitimité requises, pour des institutions véritablement représentatives". (Au cas où passerait par là un taurillon, je signale que Rodrik ajoute immédiatement : "de fait, les incessantes difficultés de la construction européenne montrent les limites de la volonté de construire un espace politique trans-national, même au sein d'un ensemble, de taille limitée, d'états relativement homogènes".)

Rodrik décrit donc un monde idéal d'activistes à la sensibilité globale, agissant sur des gouvernements nationaux et responsables. Ce n'est que dans un deuxième temps que ces pressions locales influeraient sur le niveau global.

Cela peut paraître irréaliste.

Il me semble cependant que c'est la seule façon de s'assurer que l'on ne mette pas la charrue avant les boeufs : transférer des pouvoirs exercés démocratiquement à des entités irresponsables est le moyen le plus sûr d'arriver au rien actuel.

Si la chouette de Minerve ne s'envole qu'à la tombée de la nuit, on pourra peut-être plus tard reprocher à la construction européenne d'avoir voulu prendre son essor dès l'aube.

Que l'erreur de cette construction soit un rythme fautif plus qu'une visée injuste, n'en fait pas moins une erreur.


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