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Barroso, Draghi, les deux latins d'une Europe libérale

Publié le 10 juillet 2013 par Juan
Elles ont débuté pour deux ans, ce lundi 8 juillet. On se souviendra que l'Union européenne partait avec un chef d'équipe si libre-échangiste et peu convaincant que nous pouvions tout craindre. Il s'appelle José-Manuel Barroso. Quelques heures plus tard, l'un de ses collègues technocrates, le patron de la BCE, promettait des taux bas pour encore longtemps à la zone euro. Il fallait calmer quelques spéculateurs et, accessoirement, aider nos économies européennes.
Libre-échange, jusqu'où ?
Nicole Bricq a encore râlé. Elle a raison. Il le faut. Sur France Info ce mardi 9 juillet, elle réclame davantage de transparence de la part des négociateurs de la Commission européenne. L'épisode Barroso des jours derniers est encore dans toutes les mémoires. La ministre du Commerce Extérieur avait elle-même fustigé l'inefficacité du Président de la Commission le 28 juin dernier: "C'est une commission finissante qui n'a pas fait grand chose de son mandat mais si Monsieur Barroso était là c'est parce que les Etats avaient accepté qu'il le fut." Cette fois-ci, elle en remet une couche: "Ce que je voudrais c'est que la transparence règne. Il faut qu'on puisse surveiller l'avancée des négociations. Il faut que les parlementaires puissent être tenus au courant". 

Car il y a des lignes rouges: l'audiovisuel et la culture, les OGM, le boeuf aux hormones, et le gaz de schiste. Comme un signe du sort pour notre public français, la chaîne franco-allemande dénommée ARTE rediffusait GASLAND, cet édifiant documentaire de Josh Fox sur les ravages de l'exploitation hydrolique du gaz de schiste.
Nicole Bricq évoque aussi des sujets offensifs. Car l'Europe, on l'oublie trop souvent, a besoin d'assouplir des blocages américains. Ah ! Quelle horreur ! Il faudra négocier, sauf à renoncer à assouplir la taxation à 100% de notre Roquefort, ou de 35% de nos fruits et légumes. On nous promet aussi une hausse des PIB américain et européen. Les études s'accumulent, de tous bords. Mais elles convergent sur un point, inquiétant: les Etats-Unis ont davantage à gagner que l'Union européenne. C'est aussi bien normal, presque prévisible tant le déficit commercial des USA vis-à-vis de l'UE à 27 est important (91 milliards d'euros l'an passé).
Bref, nous n'avions pas confiance.  Mais nous avons le temps, on peut espérer que Barroso ne sera plus là pour signer le fichu accord transatlantique sur le commerce et l'investissement (TIPP). Les négociateurs des deux bords se laissent au moins deux ans..

Comment la BCE ne comprend rien 

Ce sont des experts, régulièrement désignés à la vindicte populaire. Les gouverneurs de nos banques centrales nationales de la zone euro, tous rassemblés dans un Conseil au sein de la BCE, attirent davantage les foudres de la critique que des louanges. Ces derniers jours, alors que le Portugal sombrait de récession en crash financier, voici que l'institution aurait pris la bonne décision.
Permettez-nous d'en douter.
Certes, il y avait le feu. Nos gouvernants nous avaient promis que la crise de l'euro était derrière nous. Pour le coup, l'actuel président français rejoignait totalement le précédent. La BCE, donc, a choisi, accepté, confirmé, que ses taux resteraient bas pour longtemps. En langage techno, cela donne:
"Après sa réunion de juillet, le Conseil des gouverneurs a souligné que l'orientation de la politique monétaire va vers un maintien du degré d'accommodation justifié par les perspectives en matière de stabilité des prix et la promotion de conditions de marché stables"
En d'autres termes,  "des taux d'intérêt plus élevés ne sont actuellement pas justifiés."
Et voilà.
Draghi a la trouille d'un embrasement, et il donne des gages.
Comment croire que nous étions tirés d'affaires quand une large fraction de l'euro-zone sombre un peu plus chaque jour ? Le FMI a reconnu que l'austérité brutale et tardive imposée à la Grèce, l'Italie ou le Portugal avait développé un cercle vicieux de récession: moins de recettes fiscales donc davantage de déficits donc davantage d'austérité donc moins de recettes fiscales, etc. Mais la Commission Barroso s'était grandement émue. Pas question de revenir sur ce désastre. Nul mea-culpa, encore moins de changement de lignes.
Lundi 8 juillet, les ministres européens des finances et la patronne du FMI se retrouvaient à Bruxelles pour décider d'une nouvelle aide de 8 milliards d'euros à la Grèce. On apprend d'une agence que les experts de la funeste Troïka (UE, BCE, FMI, réclament "des gages d’Athènes en matière de suppression d’emplois dans la fonction publique et de discipline budgétaire."
Ces dernières semaines, le Portugal a été pris d'un accès de fébrilité. Soigné de la même potion, le pays vit une situation dramatique: déficit budgétaire de 6 %, chute du PIB prévue à 2,3 %, taux de chômage de 17,6 %. Depuis huit jours, la crise est aussi (et enfin) politique: le ministre des finances avait démissionné, suivi ensuite de son collègue des affaires étrangères, avant que la coalition conservatrice au pouvoir évite de justesse de voler en éclat.
Barroso, Draghi... les deux faces d'une même pièce, une triste pièce.


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