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Les mythes autour du viol

Publié le 29 juillet 2013 par Juval @valerieCG

Les mythes autour du viol désignent les croyances entourant le viol, les victimes et les coupables. On les définit par des attitudes et croyances fausses mais profondément et constamment entretenues qui servent à nier et à justifier le viol. Ces mythes servent à décrédibiliser la personne violée et à excuser le violeur. Ainsi le comportement passé d'une victime peut servir à justifier qu'elle a cherché ce qui lui est arrivé. Une photo de Tristane Banon a ainsi servi à la décrédibiliser (rappelons que DSK a reconnu l'agression sexuelle sur Banon mais qu'il n'a pas été condamné car il y a prescription).

Avant de vous jeter tête baissée sur les commentaires, merci de prendre la peine de lire intégralement l'article et les liens associés.

Buddie et Miller dans Beyond rape myths: A more complex view of perceptions of rape victims. Sex roles montrent que 66% des personnes intérrogées adhéraient aux mythes autour du viol dans une étude utilisant des questions ouvertes. Dans une étude utilisant des questions fermées, (Lonsway et Fitzgerald, Rape Myths. In Review) , entre 25 et 35% des interrogés adhéraient à ces mythes.

Plus ces mythes sont acceptés et partagés collectivement, plus on y croit individuellement et plus l'on risque de violer.

Différentes études ont été menées afin de mesurer la propension au viol (c'est à dire la possibilité que quelqu'un viole). On a posé un certain nombre de questions sans jamais prononcer le mot viol. Par exemple, être avec une femme qui leur dit qu'elle est trop ivre et ne veut pas avoir de relations sexuelles. A un moment donné, elle est tellement ivre qu'elle s'endort. La question dit que l'homme en profite pour faire ce qu'il veut et l'on demande aux personnes interrogées si elles sont d'accord avec son comportement.
A plusieurs reprises, ce type d'études a révélé que 30 à 35% des hommes auraient ce type de comportements.

Les mythes sur le viol servent à justifier l'attitude de ces hommes qui, en acceptant ces mythes peuvent ensuite individuellement se justifier et se dédouaner d'avoir commis de tels actes.

Etudions donc à présent ces mythes :

Les femmes courent davantage de dangers la nuit car on sait bien que les prédateurs opèrent la nuit :

Le comité féministe contre le viol qui gère le numéro vert SOS viols et a pu mener des enquêtes statistiques qui révèlent qu'on viole autant le jour que la nuit. Ainsi selon leurs chiffres, "les agressions sexuelles sont commises le jour dans 45,7 % des cas, la nuit dans 54,3 %." Ce mythe sert juste à contrôler la liberté de mouvements des femmes ; ainsi des cartographies des lignes de métro par fréquentation par sexe montrent que la nuit, le metro devient quasi exclusivement masculin. Pourquoi entretenir des mythes qui sont faux (nous verrons que l'immense majorité des viols se déroulent chez la victime ou chez son agresseur) ?

Les femmes doivent faire attention aux lieux isolés, aux parkings, aux métros :

La même étude montre que le viol a eu lieu dans 67.7 % des cas au domicile de la victime ou de l'agresseur, dans 3.7% des cas dans la rue, dans 0.6% des cas dans un parking. On n'a eu de cesse, ces temps derniers de nous parler de ces imprudentes joggeuses ; le nombre de viols dans un bois ou un bord de route s'élève à 2.2% des cas.

Les viols sont commis par des inconnus :

L'étude menée par le comité féministe contre le viol montre que dans 74% des cas la victime connait son agresseur.

L’enquête Contexte de  la sexualité en France de 2006 souligne que "les agresseurs inconnus restent toujours  une minorité (17%), et que leur proportion décroît dans les générations les plus récentes".

Une étude menée en Angleterre par le ministère de la Justice montre que dans 90% des cas la victime connait son agresseur.

Goaziou et Mucchielli en 2010 montrent que le viol est avant tout un crime de proximité. Les viols familiaux élargis (viols commis par des pères, des beaux-pères, d’autres ascendants, des collatéraux, des conjoints ou des « amis de la famille ») viennent largement en tête, suivis par des viols commis par des copains ou des amis des victimes, par des voisins ou bien encore, à une échelle de plus basse intensité relationnelle, par des relations ou des connaissances, du voisinage ou professionnelles.

Aux Etats-Unis, une étude montre que deux tiers des viols sont commis par une personne connue de la victime.

Les femmes mentent au sujet du viol, parce qu'elles regrettent un coup d'une nuit ou parce qu'elles veulent nuire à un ex partenaire :

Un rapport en Angleterre publié par le ministère de la Justice en juillet 2011 révèlent que sur 5651 accusations de viol, 38 étaient fausses. Le rapport souligne que la moitié de ces fausses déclarations est faite par des personnes très jeunes, souvent en difficulté ou souffrant de maladies mentales. Une partie de ces cas révèle qu'il y a effectivement eu délit ou crime, même s'il ne s'agit pas d'un viol.
Le FBI a mené une enquête révélant qu'environ 8% des accusations de viol étaient non fondées ; cela inclut les non-lieux car rien n'a pu être prouvé.

Les femmes habillées sexy, ou qui vont en boîte de nuit l'ont bien cherché voire ont aimé cela : 

En 2009, le Daily Telegraph du présenter des excuses publiques après avoir fait dire à une étude que les femmes qui sortent, boivent de l'alcool et s'habillent court risquent davantage d'être violées.

Ainsi ce professeur chinois qui affirme qu'il est moins grave de violer une serveuse qu'une "fille bien".

Plusieurs études (dont Rape myth acceptance among college women : the impact of race and prior victimization, Carmody et Washington, Rape myth beliefs and bystander attitudes among incoming college students de Sarah McMahon)  montrent l'importance du mythe de "she asked for it" (elle l'a cherché).
Une tenue vestimentaire, une attitude, un lieu fréquenté, deviennent autant d'éléments prouvant que la victime a, sinon demandé à être violé, un peu provoqué ce viol.

Dans Sexy dressing revisited : does target dress play a part in sexuel harassment cases ?,  Beiner étudie  la corrélation entre une  tenue sexy et des cas de harcèlements sexuels. Elle montre qu'il n'y a aucun lien et que les femmes harcelées ne l'ont pas été pour leur tenue.

Différentes études comme (An Examination of Date Rape, Victim Dress, and Perceiver Variables Within the Context of Attribution Theory de Workman et Freeburg) montrent que ce que cherche avant tout un violeur est une victime qui donne un sentiment de vulnérabilité. La tenue n'est donc pas mise en cause, puisque, d'ailleurs une bonne partie des violeurs ne se souvient absolument pas de ce que portait leur victime. L'interrogatoire de violeurs condamnés montre qu'ils ont tendance à exagérer la tenue portée par leur victime, à la percevoir beaucoup plus provocante qu'elle n'était et à interpréter à peu près n'importe quelle attitude comme provocatrice. Ainsi un sourire ou un salut deviennent, pour le violeur, des éléments de provocation.

Ce sont les jeunes et jolies femmes qui sont violées :

Les victimes sont de tout âge, tout milieu socio-professionnel ; ainsi aux USA, 15% des victimes avaient moins de 12 ans. Les femmes en situation de handicap physique ou mental sont plus sujettes que les femmes valides à subir un viol. Certaines études avancent qu'elles pourraient être 4 fois plus sujettes à des situations de violences sexuelles.
Lorsque Nafissatou Diallo a déclaré avoir été violée, beaucoup ont mis en avant qu'elle était trop laide pour l'avoir été. Les accusés de Créteil ont également mis en avant le physique d'une des victimes lors du procès.

On viole davantage dans certains milieux : 

Viol

Selon l’enquête Contexte de  la sexualité en France de 2006, il y a peu de différence selon la catégorie socio-professionnelle avant 18 ans ; le pourcentage le plus élevé se rencontrant chez les filles de cadres. La fréquence après 18 ans varie de 6% à 10% selon la position sociale personnelle des femmes avec des chiffres un peu plus élevés chez les cadres et chez les artisanes-commerçantes. Les femmes violées existent donc dans toutes les catégories socio-professionnelles.
Si les affaires de viols condamnés par la justice montrent une surreprésentation des auteurs appartenant aux milieux populaires (ce qui est le cas de toutes les infractions), et que les membres des milieux sociaux favorisés sont sous-représentés parmi les personnes condamnées, on peut penser que les faits au sein de milieux aisés sont sous-judiciarisés car bénéficiant d'aides diverses. A l'inverse les populations défavorisées sont davantage surveillées par les services sociaux ce qui permet une plus grande détection.

Les hommes qui violent sont fous : 

S'il a été montré qu'une part des agresseurs judiciarisés a connu une enfance difficile ; carence affective, violences, carence éducative, rien ne conclut qu'ils sont "fous" au sens clinique du terme. Leur passage devant une tribunal et leur condamnation montre d'ailleurs qu'ils sont aptes à être jugés.

Seule une femme peut être violée :

Selon l’enquête Contexte de  la sexualité en France de 2006, 16% des femmes et 5% des  hommes déclarent avoir subi des rapports forcés ou des tentatives de rapports forcés au cours de leur vie (6,8% des femmes déclarent des rapports forcés et 9,1%, des tentatives, et respectivement 1,5% et 3,0% des hommes).

Le viol c'est la testostérone : 

On ne connait pas exactement le rôle de  la testostérone dans le comportement agressif. Une étude sur 146 pédocriminels violents a montré qu'ils avaient un taux de testostérone sensiblement plus important à ceux n'ayant pas été violent (viol sans blessures corporelles). Néanmoins, on constatera qu'il y a eu viol dans les deux cas, que le taux de testostérone a été calculé après les crimes ; il est donc difficile de savoir si le crime a pu faire monter le taux (ou le fait d'être en prison par exemple) ou si le taux a participé au crime. Comme le souligne Fausto-Sterling il est ridicule d'évaluer le comportement d'une hormone isolément des autres ; ainsi l'adrénaline, la progestérone ou la prolactine ont déjà été elles aussi associées à l'agressivité.
Dans l'immense majorité des cas, les violeurs et autres criminels ont un taux de testostérone tout à fait conforme à la norme.
Il n'est guère de discipline scientifique qui continue à strictement séparer nature et culture. L'humain est un animal trop complexe pour supposer qu'un seul de ses comportements serait mu par la nature. Les mâles des autres espèces animales, possèdent pour un certain nombre d'entre eux, de la testostérone, et le viol n'st pas un comportement animal très commun.
Si le viol est du à la testostérone, alors autant convenir que nous ne pouvons rien faire contre et qu'il faut faire avec. Comprenons donc que le viol est éminemment culturel.

Le viol est bien puni : 

Seulement 10% des femmes victimes de viol portent plainte et seulement 10% de ces plaintes aboutiront à une condamnation. Le chiffre est sans aucun doute encore inférieur pour les hommes victimes. Une partie des plaintes pour viol est requalifiée ; c'est à dire qu'on requalifie un viol (un crime) en agression ou atteinte sexuelle qui ne sont plus que des délits  avec, evidemment une peine de prison inférieure.


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