Il serait presque possible de croire que la « communication » remplace l’action ; elle prend de toute évidence un ascendant prépondérant dans les cercles du pouvoir. Rien de très nouveau certes, mais l’omnipotence des armées de communicants peut emprunter des chemins très variés et quelquefois déroutants.
Avec Hollande et Ayrault, si le communiquant est toujours « roi », la technique pourrait apparaître plus aléatoire aux observateurs peu attentifs. Elle atteint au contraire un degré très subtil de la perfidie. Avec cette nouvelle technique, le président n’est jamais en première ligne ; il peut tancer, distribuer bons et mauvais points, donner l’impression de réfléchir.
Au bout du compte ayant entendu tout et son contraire, le « sujet », gavé de contradictions, ne sait plus bien quoi procède de qui, qui est responsable de quoi.
Le dernier exemple est fourni par le psychodrame entretenu entre Valls et Taubira à propos des emprisonnements pour les récidivistes, l’une voulant les exonérer d’un retour systématique sous les verrous, quand l’autre plaide pour une rigueur inchangée.
Ainsi Taubira enchante les phobiques de l’ordre au PS et l’on peut lire :
« Manuel Valls sait-il que la France a voté le 6 mai 2012 ? Et qu’elle a voté majoritairement pour que le changement, ce soit maintenant ? Notamment pour les moins considérés et les plus démunis : les jeunes qui ne seraient plus victimes de contrôles au faciès, les musulmans qui ne seraient plus assimilés au terrorisme, les Roms qui ne seraient plus stigmatisés, les immigrés dont le vote local serait reconnu. Piétinant allègrement ces promesses du candidat François Hollande sans être rappelé à l’ordre, le ministre de l’intérieur frappe le nouveau pouvoir d’une marque indélébile : le reniement. »
Dans le même temps Valls enchante les autres, « reprenant les refrains ultra-sécuritaires de la droite après avoir donné crédit aux polémiques sur le voile. »
Il en est de même avec les questions économiques quand Moscovici annonce (sur off) mais assez fort pour qu'on l'entende des chiffres de croissance radicalement différents de ceux envisagés par le président : manière de ne pas effrayer les uns tout en garantissant une certaine lucidité aux autres.
Ainsi les messages sont complétement « brouillés », indéchiffrables véritablement. Ils ouvrent toutes les interprétations, chacun s’empressant au PS de ne retenir que celle qui lui sied.
Cette communication « bonneteau » est aussi une communication du mépris, celle qui consiste à croire que le peuple se laissera abuser longtemps par ces subterfuges indignes. Les nouveaux communicants « jouent avec le feu »