Il y avait le pari de Pascal, il y a maintenant le pari de Jean - Yves Le Drian. Certes il ne s’agit pas de mettre en cause la personnalité du ministre de la défense, trčs fin connaisseur de ses dossiers et ŕ l’écoute des états – majors de nos armées. Mais financer une partie de la fameuse loi de programmation militaire en incluant Ť les futures ventes de Rafales ŕ l’export ť relčve bien d’un pari périlleux. Un petit rappel historique : la LPM précédente avait-elle aussi été construite sur l’hypothčse de succčs ŕ l’export aux Emirats, au Brésil, en Lybie et en Suisse. On sait ce qu’il en est advenu.
C’est vrai que les négociations entre l’Inde et Dassault sont bien engagées. Eric Trapier, le nouveau patron de Dassault Aviation donne volontiers des indices aux journalistes. Ť Nos équipes sont en contact chaque jour avec les hauts responsables indiens et les négociations avancent ť nous disait-il récemment. Il semble que l’on soit quasiment d’accord sur les transferts de technologie que Dassault acceptera de donner ŕ ce client, un client particuličrement important pręt ŕ signer pour 126 exemplaires de l’avion Ť qui n’a jamais été vendu ŕ l’export ť selon la phrase rituelle des commentateurs.
Cependant, il faut avoir la plus grande méfiance sur l’issue de ce contrat tant qu’il n’est pas définitivement signé. Tout peut s’arręter brutalement pour un problčme de politique intérieure ou pour un problčme de ralentissement de la croissance économique, ce qui est le cas actuellement en Inde, bien que le PIB soit toujours dans le vert. Et puis, l’histoire montre que męme signés les contrats n’ont pas toujours été honorés, nos Ť amis ť américains ou russes guettant toujours la faille qui leur permettrait de revenir dans le jeu. Ce n’est pas ce que l’on souhaite bien sűr au Rafale, sans doute le meilleur avion de combat jamais produit dans le monde pour sa polyvalence mais qui a toujours raté ses finales ŕ cause de considérations politiques. Et Jean-Yves Le Drian va męme plus loin. Ses services expliquent que Dassault discute Rafale avec la Malaisie, le Qatar, les Emirats arabes unis. Une façon de dire que si l’on rate l’inde, nous avons des plans B C et D…
Pour le reste disons rapidement que la LPM 2014/2019 sanctuarise le budget des équipements des armées, les entreprises de défense vont recevoir globalement un chčque de 100 milliards d’euros ce qui devrait permettre ŕ la France de garder son rôle de grande puissance, alors que certains redoutaient le fameux déclassement. 34 000 personnes vont devoir quitter l’uniforme et les élus des territoires concernés tendent le dos, la liste sera connue au début du mois prochain.
Pour conclure, et sans froisser nos amis indiens, je vous dirais que dčs mon retour ŕ Paris, j’irai porter en voisin au Dieu Gančsche, une jolie poignée de bâtonnets d’encens. Gančsche, c’est le dieu sympathique ŕ la tęte d’éléphant qui porte bonheur et qui protčge nos foyers; mais vous pouvez choisir d’autres divinités, il en existe 330 millions en Inde !
Gérard Jouany