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Un an de Sarkozy

Publié le 29 avril 2008 par Argoul

Avez-vous remarqué ? Il suffit que le Président parle à la télévision pour qu’on passe d’un jour à l’autre de l’hiver (15°, pluie, vent du nord-est) à l’été (21°, grand soleil, brise légère).* Et lui qui se défend d’être roi ! Guérirait-il des écrouelles ? Pas facile d’être président ; le peuple lui demande tout et son contraire. Si tout va bien c’est grâce à ce qui s’est fait avant ou grâce à la conjoncture – si tout va mal, ce n’est jamais la faute de ceux qui n’ont rien fait depuis 30 ans ni de la conjoncture : c’est de sa faute à lui.

Or un Président, même s’il s’était agi d’une Présidente*, est toujours encadré :

· Par la conjoncture économique, qui ne dépend ni de la France toute seule ni de l’Elysée, ni des yakas incantatoires de l’opposition à Sa Majesté.*

· Par les Institutions de la Vème République. Notamment son Parlement croupion qui a pris, depuis un demi-siècle, l’habitude d’être irresponsable et d’en faire le moins possible tout en criant très fort. Quel temps passé à concocter de vigoureuses lois « mémorielles » et des « communiqués » sur le Tibet, tandis qu’on en passe peu sur l’éducation, la justice, l’armée, la fiscalité, au vu des inepties et du jargon de l’inflation législative ! Mais aussi la Présidence, jamais réformée du temps des Socialistes (Mitterrand était trop heureux de jouer au monarque florentin). De plus entachée de ce « péché originel » (l’expression est à la mode) du quinquennat voulu par Jospin et le PS, qui accentue l’interventionnisme présidentiel et fait voter une Assemblée du même bord dans la foulée…

· Par le système médiatique centralisé parisien, révérent envers les puissants, ne rendant compte que de ceux qui crient le plus fort, adorant les bons mots des « petites phrases » et les potins de Cour, au lieu d’enquêter et de refléter (comme en Allemagne, en Italie ou en Angleterre) la diversité du raisonnable.

Mais dans ces cadres un tantinet rigides reste la personnalité. Des trois P de la politique (Pulsions, Passions, Pensée), Nicolas Sarkozy a fait les trois A : Agité, Ambitieux, Avide d’être aimé :

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· Agité physique, sa volonté se confond avec la sensation musculaire. C’est Louis de Funès à l’Elysée. Pour lui, être c’est agir. Il croit l’autorité autoritaire. Parler suffit pour que tout soit fait. Il s’imagine le servomoteur d’une mécanique. Il ne fait pas confiance, il faut qu’il fasse tout lui-même sinon rien ne va.

· Ambitieux, il est parti de rien pour arriver au sommet. Rien d’incroyable à ce qu’il ait eu, six mois durant, un comportement de nouveau riche. La gauche s’est-elle comportée autrement en 1981 (« La vie quotidienne à l’Elysée au temps de la gauche » reste un délice de lecture). Mais la puissance de l’Exécutif sous la Vème République le laisse sans garde-fou. Sa volonté a eu tendance à se confondre avec sa passion du moment, souvent plus un prénom féminin se terminant en A qu’une bonne réforme négociée et longuement conduite.

· Avide d’être aimé, là est son intime faille. Il l’a trop mis en scène pour que cela reste du ressort de la vie personnelle. D’où, probablement, ce soin maniaque à paraître, à se façonner une image macho, cow-boy (à cheval), pilote (en Ray ban), sûr de lui. Cette exigence à tout maîtriser, y compris son interview à l’Elysée. Mais aussi cette préoccupation un brin démagogique de répondre à tous - du désir de réformes (qui reste très net chez les Français selon les sondages) au désir de protection, nostalgique de l’Etat-providence et d’un vague soviétisme syndical.

Pulsions, passions, pensée, le Politique doit maîtriser tout cela. Nicolas Sarkozy a trop cédé aux deux premières et n’a pas fait évoluer la troisième, malgré le changement majeur de la conjoncture mondiale. Il répète un programme présidentiel automatique comme s’il suffisait de marteler pour que tout advienne. Il reste flou sur l’objectif, entre le non-dit et le jusqu’où ne pas aller. S’il sait présider, Nicolas Sarkozy ne sait pas gouverner. Il n’a pas compris qu’un président de quinquennat est plus chef d’équipe qu’arbitre gaullien au-dessus des partis. Sa majorité n’a pas compris non plus que les institutions ont changé.

Il reste 4 ans pour le faire – tout comme il reste 4 ans aux socialistes pour dégager enfin un candidat crédible sur un programme qui parle d’avenir (et pas des vieilles lunes 19ème)*. Quand on est Président, on n’est pas aidé…

* Je précise aux encultés de l’Eglise des Saints Socialistes des Derniers Jours qu’il s’agit d’une boutade…


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