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Marion Bartoli, un besoin d’émancipation?

Publié le 16 août 2013 par Sportpsy @sportpsy

BartoliL’annonce fait l’effet d’une bombe: Marion Bartoli, récente vainqueur de Wimbledon, annonce sa retraite avec tambour et fracas ce 14 Août 2013. Comment comprendre cette décision alors qu’elle avait annoncé après sa victoire qu’elle avait d’autres objectifs en tête? Est-ce simplement une lassitude logique et une difficulté à retrouver de la motivation? Est-ce une incapacité à vivre avec la pression de gagner à nouveau?

Pourtant, cette décision intrigue car même son entourage ne la comprend pas. Elle a appelé son père en sortant de son dernier match à l’Open de Cincinnati, puis a annoncé sa décision à son sparring Thomas Drouet et à Mauresmo qui témoignent tous leur incompréhension. Ils n’ont rien vu venir et cette décision vient sonner un clap de fin d’une manière totalement inattendue. Au point que tout le monde s’interroge sur sa valeur: si ce n’est qu’un coup de tête ou si cela témoigne d’autres malaises. Mais Marion prend la décision de l’annoncer dans la foulée à toute la presse et vient ainsi enteriner une décision intime. Elle ne le garde pas pour elle, ne prend pas le temps d’y réfléchir plus. Ce n’est pas un coup de tête mais une décision longuement murie qui n’attendait qu’un signe pour se rêvèler: elle annonce que son corps ne peut plus suivre pour ne pas dire que c’est sa tête qui n’en peut plus.

D’un point de vue psychologique, cette décision peut se comprendre et peut également révélée plusieurs explications. Pour moi, cette décision est le témoignage d’une souffrance psychologique qui vient se masquer derrière l’usure du corps. En réalité, je me demande si cette décision n’est pas un besoin d’émancipation. Car Marion cherchait depuis plusieurs mois des moyens de s’émanciper de son père, du tennis et ne pouvait sûrement trouver de solution qu’en quittant les deux. Les changements opérés depuis ces derniers mois démontrent cette envie de trouver ses solutions, de changer de mode d’entraînement, d’accepter de s’ouvrir et sa retraite n’est que l’aboutissement d’une suite logique d’évolution psychologique.

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Début Mars 2013, Marion étonne déjà son monde. A ses côtés, on remarque Jana Novotna, ancienne joueuse qui vient donner un coup de main et vient apporter un autre regard sur Marion. Officiellement, Marion a besoin d’une structure autour d’elle car elle a des objectifs élevés. Etonnement, elle remplace son père par une femme, comme un symbole, comme si aucun autre homme ne pouvait prendre cette place. Marion ne se sépare pas officiellement de son père et ne fait que collaborer avec Jana. D’un point de vue psychologique, cela annonce déjà l’envie de Marion de s’émanciper, d’opérer un changement, de vivre le tennis sans son père, et peut être de tester sa propre motivation. Mais Marion n’arrive pas à vivre son projet sans lui. Elle se sépare de Novotna avec surprise au bout d’une semaine et on dira que ce n’était sûrement pas la bonne personne.

Elle retourne donc vers son père comme une fatalité. Bartoli n’avait-elle plus le choix et trainait peut être sa motivation en essayant de trouver d’autres solutions? Mais force est de constater que la lassitude était déjà de mise. Comme un crève coeur, elle ne pouvait le quitter mais ne pouvait plus rester non plus avec lui. Bartoli cherchait l’émancipation mais ne trouvait pas les moyens de l’assumer. Elle tente à nouveau une nouvelle collaboration avec Gérald Brémond qui ne dura pas plus d’une semaine à nouveau: son père étant encore trop présent, il ne laissait pas la place à un entraîneur. Marion voulait-elle vraiment lui donner cette place?

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Cette relation au père étant tellement marquée, qu’on se demande comment Marion peut réellement évoluer sans lui. Là aussi, elle surprend son monde: elle accepte de revenir en Fed Cup sans la condition qui l’empêchait de venir avant: que son père l’entraîne. Accompagnée par Mauresmo, elle a su se convaincre que son émancipation passerait par là: laisser son père le temps de la Fed Cup. Et Marion s’est épanouie et a découvert l’esprit de groupe avec les autres filles.

Dans sa tête, Bartoli avait donc déjà accepté que ce changement serait salutaire pour elle. Il fallait trouver la bonne personne et c’est certainement la rencontre avec Thomas Drouet, qui venait marquée un renouveau. Un autre homme rentre dans sa vie, elle accepte qu’il prenne la place du père qui est relégué en seconde place. On sent que ce n’est pas serein mais elle commence à montrer qu’elle peut faire sans lui.

Wimbledon vient marquer les choses: elle arrive en finale sans lui. Mais pas question qu’il ne soit pas là pour le jour de la Finale. Il apparaît donc et se joint aux spectateurs pour venir admirer le sacre de Marion. Ca ressemble à une histoire de destin. Peut être qu’en réalisant son rêve, Marion a-t-elle réussi à se prouver qu’elle pouvait y arriver. Elle gagne son seul titre du Grand Chelem sans son père comme entraîneur. Comme un signe que l’indépendance est forcément la voie à suivre. L’après Wimbledon est aussi significatif. Profitant de sa nouvelle notoriété, Marion apparaît dans les journaux, multipliant les expériences hors du terrain: des rencontres avec un Dj Star, l’olympique de Marseille et autres apparitions publiques. Elle commence à connaître une vie autre que le tennis et par cette victoire peut entrevoir un avenir différent.

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Marion a peut être réalisée dans la douleur que si elle continuait le tennis, elle ne pouvait le faire qu’accompagnée de son père. Elle doit savoir que ce n’est plus la voie de la réussite, qu’elle a besoin d’autre chose maintenant. Mais le fait d’être retournée plusieurs fois vers lui démontre cette incapacité à passer à autre chose et à vivre le tennis sans lui. Comme une femme infidèle, elle a l’impression que son projet de tennis était en fait leur projet à eux deux. Donc, elle se heurte à un conflit maintenant: continuer sans lui est aussi impossible que de continuer avec lui. Elle se trouve face à une impasse et le retraite vient comme une solution idéale pour construire cette nouvelle Marion qui ne demande qu’à s’exprimer sans attache.

Cette volonté de s’émanciper ne pouvait donc pas se faire à travers le tennis. Si elle s’émancipe, elle s’émancipe en même temps de ce projet commun et elle brise tout pour vivre autre chose où son père n’aura pas sa place. On peut comprendre alors que ce besoin se soit fait sentir au fur et à mesure et qu’elle attendait juste le moment pour le faire. L’histoire retiendra seulement qu’elle arrête sa carrière à la suite de son plus beau sacre.


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