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Depuis … je déteste les p’tits vieux.

Publié le 26 août 2013 par Eclectikgirl

Dans les toilettes. La personne avant moi a tiré la chasse d’eau, mais il reste quelque chose, là, en surface.
Une petite boule rose, luisante et spongieuse, qui grossit.
Qui se développe et se transforme en un bébé pas plus grand que ma main, mal en point.

De façon désarticulée, comme une poupée.
La porte des wc est ouverte, je suis en panique, mon père me dit " mais qu’est ce que tu attend pour le jeter".
Je saisi le truc par les cheveux, qu’il a déjà long et poisseux et je le dépose dans les poubelles, sur un lit de serviette hygiénique.

Je me réveille.
en sueur et affolée.
Parceque je sais qui est passé avant moi, dans les toilettes.
Qui a perdu ce petit quelque chose en cours de route.  Rond et rose comme doit l’être un ovaire.
C’est ma mère.
A qui on a annoncé hier que le cancer, cette immonde bête qui se propage dans le corps, s’attaque à elle.

"Cancer des ovaires".
Au premier abord, on se dit :"Bon, ça va, c’est localisé. Une ablation, et basta, c’est rémission"
Oui, mais non. Le cancer est une bestiole qui grignote.
Les organes autour, qui se répand aussi vite que le sang. Il grignote les ovaires d’abord, les intestins ensuite, se dépose en kyste, se multiplie en métastases.
Il grignote aussi le moral, le tempérament, il grignote l’âme.
Du malade et de ceux qui l’entourent.

Depuis … je déteste les p’tits vieux.

Alors oui, depuis cette nouvelle, je déteste les petits vieux, ceux que je croise dans la rue, tout rabougri.
Ceux qui peinent à marcher, qui semblent tout fragiles, qui râlent à tout bout de champs.
Parceque ma mère, à même pas 60 ans, à vu ses chances d’atteindre le statut de "petite vieille fragile"  s’amoindrir.
(espérance de vie de 10 à 15 ans, ou de 1 à 5 an, selon la phase d’avancement du cancer.  Que je ne connais pas)

Depuis l’annonce, il y a quatre jours, je ne craque pas complétement.
J’y pense tout le temps, j’en viens à souhaiter que ce week-end se termine pour retourner me remplir la tête avec les traces et les exigences du bureau. Façon autruche.
Des larmes me viennent d’un coup, à la simple évocation de ce qui l’attend. De la mention de son âge. D’un souvenir qui ressurgit.
Je ne sais pas si je dramatise, ou si au contraire, je ne prend pas toute la mesure de la situation.

Et puis, la culpabilité.
Parce que oui, j’ai une semaine de congé, là, bientôt.
Avec un programme de vacances bien établi, qu’on attend depuis 6 mois.
Pour être à deux, en couple, pour décompresser de cette année mouvementée, et de celle à venir.
Mon père ne m’a pas dit si il y avait urgence. Je ne sais pas.
Il me l’aurait précisé, non ?
Il y a 5h de route pour aller les voir. J’irai lors de mes prochain jours de congé, dans un mois et demi.

Et là, je vais partir en vacances, pas tout à fait tranquille.
Avec mon duo de grignoteuse : la culpabilité qui pince le cœur, et le cancer qui ronge l’âme.

Edit du 08/09/2013 : finalement, je n’ai pas été en vacances.
On est allé la voir. Je vous raconte ça, ici.

 

Depuis … je déteste les p’tits vieux.

gba


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