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[The Wire S01] Fuck fuck fuckity fuck fuck

Publié le 27 août 2013 par Laserietheque @laserietheque

[The Wire S01] Fuck fuck fuckity fuck fuck

Jugée par certains sériephiles, journalistes, Président des États-Unis, acteurs, équilibristes, boulangers, Olivier de chez Carglass mais aussi par la grand-mère du mec qui habite au coin de la rue en face du port de Saint-Malo, la meilleure série du monde entier de l’univers intersidéral jamais créée, j’ai récemment terminé le (premier) visionnage de la (première) saison de The Wire. Je ne me joins pas à la hype autour de The Wire mais confirme un niveau de qualité élevé associé à une écriture fine et intelligente.

Actuellement en marathon quelque peu chaotique avec plusieurs twittos-sériephiles (la Wireless Team), cette saison inaugurale de The Wire a été pour moi bien plus une longue mise en route qu’une soudaine révélation divine de la sacro-sainte série parfaite. Ne vous méprenez pas, j’ai énormément aimé. A la fin. Les quatre derniers épisodes. Avant ça, ce n’était pas gagné, le créateur David Simon a dû batailler ferme pour me convaincre.

Récemment, je visitais ma tante pour un petit weekend retour aux sources en Bretagne (Woh, quelle vie fascinante me direz-vous, mais attendez, c’est pas fini…). Très fan de séries télé, elle aussi, je lui en conseillais quelques unes dont j’avais eu vent et qui pourraient potentiellement l’intéresser (comme à son habitude, elle me rétorqua que soit elle regardait déjà soit ça ne l’intéressait pas). The Wire est alors apparue dans la conversation et j’ai eu un mal fou à décrire le show (je n’avais visionné que 5 ou 6 épisodes à l’époque). A bien y réfléchir, c’est vrai que ce n’est pas évident de décrire The Wire parce qu’il y a beaucoup de choses à dire et, à l’inverse, la synthétiser à un simple résumé semble trop réducteur (voyez le champ lexical ici…). Alors par où commencer ?

[The Wire S01] Fuck fuck fuckity fuck fuck

McNulty alias ‘The fuck did I do ?’

Je crois me souvenir que notre conversation s’est déroulée comme ceci :

« Des séries à me conseiller ? Tu regardes quoi en ce moment ?

- Il y a bien The Wire

- C’est quoi ? Sur des avocats, c’est ça ?

- Non, ça c’est Suits, et tu ne voulais pas tester parce que tu n’as pas aimé The Good Wife (Passons sur cette insulte, voulez-vous.)

- Ah. Oui. Exact. Alors du coup, c’est quoi ?

- Hum. Déjà ça se passe à Baltimore et c’est euh… l’histoire… enfin plutôt le quotidien d’une équipe de flics un peu bras cassés genre "Flics fainéants le jour et Bras Cassés la nuit" tu vois ? Non ? OK. Donc en fait ce qui est bien c’est que tu as le point de vue des deux côtés et… Ah oui, c’est sur fond de trafics de drogue, d’intimidation de témoins aussi, et.. et.. Tu m’écoutes plus en fait là…

- Si, si… Mais ça n’a pas l’air super dis comme ça !

- Ouais. En gros, les flics font une enquête sur Avon Barksdale mais le problème avec les flics c’est qu’ils sont soit incompétents, soit abonnés aux bavures, soit plein de bonnes intentions mais sur le terrain c’est pas gagné… L’autre problème étant que le gang de Barksdale est super organisé. C’est tourné façon documentaire donc tu es complètement immergée.

- Hum… Mouais. Je tenterai peut-être. »

Échec total, comme vous pouvez le constater. Pourtant, moi, un pitch pareil, ça me convainc, vraiment je ne comprends pas pourquoi sa réaction était si peu enthousiaste. Je pense vraiment que ce n’est pas ma faute, ça ne peut pas l’être, je suis si à l’aise dans cet exercice… Erm.

Pour celles et ceux qui ont déjà vu la série, cette tentative de résumé colle à peu de choses près (oui, bon, hein…) à la réalité. David Simon, le showrunner-journaliste-écrivain, tente effectivement de nous raconter le quotidien de la Police de Baltimore, peuplée de flics tantôt au placard tantôt gros emmerdeurs (coucou Jimmy McNulty), d’avocats corrompus jusqu’à la moelle, de policiers souhaitant gravir les échelons dans le calme et le silence. Sous ses airs de cop show, The Wire se place en fait du côté de la critique sociale et politique de la ville de Baltimore où se mêlent ambitions, corruptions, justice à deux vitesses et intérêts politiques. Chaque saison a en fait un thème prédominant, vers lequel le récit va se porter. La première saison repose sur la drogue et le gang d’Avon Barksdale ainsi que des meurtres commis pour cacher son vaste réseau. Là où The Wire réussi son tour de force est dans la continuité des épisodes qui, curieusement, ne s’enchaînent pas à une vitesse frénétique. Je n’ai pas, comme c’est actuellement à la mode, binge-watché la série parce qu’il m’a fallu du temps pour me remettre de chaque épisode. Toutes les 60 minutes je trouvais quelque chose à redire mais au final, au moment du générique de fin, c’est le constat d’une qualité indéniable qui l’emporte. MÊME au cours des premiers épisodes, que j’avais d’ailleurs trouvés plutôt moyens. The Wire ne cache pas ses ambitions pour autant, il y a un potentiel dingue dès le début. On sent qu’il faut prendre la série comme un ensemble, on sent que le récit prendra peu à peu forme, on attend impatiemment que les personnages se révèlent, un à un, mais pas trop vite, surtout pas trop vite, parce que le rythme n’est clairement pas soutenu, et pourtant… Pourtant ! La narration est certes lente mais c’est pour mieux coller à la réalité décrite. Les dialogues sont certes étrangement concis mais c’est pour mieux apprécier les images que l’on veut bien nous donner. L’enquête traîne certes en longueur, et prend des détours inattendus, mais c’est pour mieux exposer la galerie de personnages qui donne à la série une dimension à la fois lourde et composite. Jamais clichés, toujours intéressants, parfois touchants, les personnages sont assez nombreux pour nous passionner, nous révolter, nous dégoûter et même nous faire rire. The Wire introduit tout de même, Omar, un dealer-voleur noir et homosexuel. Il n’y a, du reste, pas de bons ou de méchants flics, tout comme il n’y a pas de bons ou de méchants dealers de drogues. Les relations inter-groupe sont tout à la fois complexes et étoffées. La dimension personnelle de chacun d’eux permet au téléspectateur soit de s’identifier soit de le comprendre, sans faire dans la demi-mesure ou le cliché pour autant. Ils ont leurs défauts et leurs qualités, la force du récit réside aussi et surtout dans l’écriture subtile de ses personnages. Notons également que les sujets comme la corruption judiciaire, les enjeux politiques, les petites ambitions de chacun sont peu à peu abordés, avec parcimonie mais toujours en toile de fond d’une enquête qui avance difficilement parce qu’on ne cesse de lui mettre des bâtons dans les roues, preuve des nombreux dysfonctionnements du système. A ce propos, Jimmy McNulty, dans l’épisode The Hunt (1×11) résume assez bien l’enquête de cette première saison :

If only half you motherfuckers at the district attorney’s office didn’t want to be judges, didn’t want to be partners in some downtown law firm… If half of you had the fucking balls to follow through, you know what would happen? A guy like that would be indicted, tried and convicted. And the rest of ‘em would back up enough, so we could push a clean case or two through your courthouse. But no, everybody stays friends. Everybody gets paid. And everybody’s got a fucking future.

The Wire déjoue complètement les codes des cop shows traditionnels où les flics passent les menottes, enfoncent des portes et enferment les vilains méchants. Ici, pas de tout ça, ou très peu, quand il y a intervention des forces de Police de Baltimore il y a probablement une bavure derrière mais surtout une volonté de « marquer le coup » pour faire plaisir aux hautes autorités du gouvernement qui n’hésitent pas à mettre la pression sur les enquêteurs. Beaucoup de choses sont dites, sans détours, afin de coller au plus proche aux rouages d’un système clairement défaillant. The Wire se révèle être sacrément enthousiasmante au bout de quelques épisodes pour ne plus la lâcher avant de se rendre compte qu’il n’y a que 13 épisodes. Mais peu importe, j’ai encore 4 saisons à regarder et je compte bien les savourer.


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