Le mercato 2013 est maintenant achevé, place à un premier bilan. L’AC Milan a préféré choisir la continuité, sans gros bouleversements dans l’équipe titulaire et un niveau de compétitivité au moins égal à la saison passée, contrairement aux concurrents qui sortent de ce mercato plus forts qu’avant. L’éventuel saut de qualité dépend essentiellement du niveau qui sera affiché par Kakà, l’élément phare du mercato et seul réel nouveau titulaire fixe. Un mercato très sobre, à l’enseigne de la crise et des finances du club pas encore tout à fait saines.
Il y a eu peu de mouvements et peu d’investissements. Cela s’explique surtout par des finances encore convalescentes après les abus des dernières années. Et puis, s’il y a peu de nouveaux joueurs, c’est avant tout à cause de l’incapacité de vendre les joueurs qui ne font plus partie des plans d’Allegri. Ce problème est à l’origine du déroulement du mercato avec une réaction à la chaine. Galliani n’a pas réussi à vendre ses indésirables, ce qui a empêché de libérer de la place et des ressources pour acheter les objectifs visés par le club. Ces joueurs ont signé ailleurs. Certains d’entre-eux ont renforcé des concurrents et Milan n’a pas eu d’autre choix que de se rabattre sur des joueurs moins jeunes et au salaire plus élevé, faisant preuve d’une certaine incohérence.
Le fameux projet jeune (s’il existe) n’a finalement pas été respecté : Milan n’a pas réussi à engager ses vrais objectifs de mercato (Ljajic et Honda) et a engagé des joueurs encore disponibles après le 28 aout : Matri, 29 ans, remplaçant à la Juventus et Kakà, 31 ans, en marge du Real Madrid depuis très longtemps. Les autres opérations (toutes mineures) ont uniquement servi à compléter, et même surcharger l’effectif. En effet, avec 30 joueurs, on est loin de l’objectif des 25 joueurs visé à chaque mercato mais jamais atteint. Cela s’explique par deux raisons : la première est la colonie d’indésirables impossible à vendre. La seconde est la manie de Galliani de recruter à la moindre blessure. L’effectif se retrouve alors en surnombre. Au total il y a 5 joueurs de trop : Coppola, Zaccardo, Traoré, Birsa et Niang (qu’il fallait prêter). Heureusement ces joueurs n’ont pas un poids trop important sur la masse salariale.
Maintenant qu’on comprend un peu mieux comment Milan en est arrivé à ce mercato, il est temps d’analyser la qualité de l’effectif. Pour ce faire, il y a deux points de vue. D’abord la comparaison avec le groupe de la saison passée. Cela permet de voir s’il y a une amélioration au niveau interne mais cela ne suffit pas de comprendre le potentiel de Milan en championnat. C’est pour cela qu’il faut également jeter un oeil sur les concurrents dans le contexte global du football italien. Et enfin, on consacrera quelques lignes à l’analyse du point de vue financier.
POINT DE VUE SPORTIF
Point de vue interne (vis-à-vis de l’effectif 2012 – 2013)
Au niveau des gardiens rien n’a changé, mis à part l’arrivée de Coppola, 4° gardien suite à la blessure du 3° gardien Gabriel, ce qui ne sert strictement à rien.
En défense, il y a eu très peu de changements alors que c’est un secteur qui a quelques problèmes, avec notamment une défense centrale pas très rassurante. Concrètement, Silvestre, dont le niveau est tout à vérifier, remplace Yepes qui était fiable quand on avait besoin de lui. Pour améliorer la situation sur les flancs, tout soulignant la qualité des titulaires Abate et De Sciglio, la société a choisi une solution interne : Emanuelson remplace Antonini.
Au milieu, pas de grosses modifications non plus. L’unique nouvelle recrue est Poli, venu remplacer Flamini. C’est un élément très utile mais il n’améliore pas spectaculairement la qualité de l’équipe. Le secteur a surtout été renforcé par le retour d’un grand De Jong. Cependant il était déjà présent dans l’effectif et Ambrosini n’a pas été remplacé : Cristante n’est pas un potentiel titulaire comme l’était le capitaine.
Gardiens, défenseurs et milieux, on retrouve à peu de choses près le même Milan. Ce n’est pas le cas en attaque, où, comme à son habitude, Milan a concentré tous ses efforts (et son budget) alors que c’était le secteur le mieux construit et fourni. Avec le départ de Boateng mais les arrivées de Kakà et Matri, l’attaque est en surnombre, avec un recrutement privilégiant l’arrivée de joueurs… disons expérimenté, plutôt que de miser sur la jeunesse, sans pour autant construire une équipe pouvant viser de grands titres. Dans tous cela, El Shaarawy risque d’en être la première victime. Son temps de jeu risque de diminuer fortement et quand on connait son mental fragile, il y a le risque de gâcher un énorme talent. Quant à Niang, les questions qui se posent sont : va-t-il passer sa saison en tribune ou va-t-il être relégué en Primavera? Pourquoi ne pas l’avoir prêté en Serie A? N’oublions pas le jeune Saponara, qui en tant que clone de Kakà mais sans expérience, risque de voir rarement la pelouse de près. Trois jeunes éléments offensifs potentiellement bloqués par des moins jeunes.
Matri, pour lequel Milan a dépensé tout son budget (11M, c’est-à-dire la somme encaissée par la vente de Boateng) sera surtout utile jusqu’au retour de Pazzini. Ensuite, on annonce déjà un énorme problème de gestion pour Allegri et une probable tension entre tous ces joueurs qui espèrent disputer la Coupe du Monde 2014. Si la concurrence est souvent positive, elle peut parfois être explosive, surtout lorsqu’il y a trop de joueurs. Finalement, le seul nouveau joueur titulaire fixe est Kakà. Il est élément phare de ce mercato et aura une importance capitale pour juger définitivement le niveau de l’équipe. S’il se retrouve, il sera une valeur ajoutée. Si c’est un flop, ce sera un gros problème. Il sera l’observé spécial, tout le monde l’attend comme le sauveur… Et enfin, n’oublions pas que Honda rejoindra Milan en janvier : le maillot n°10 l’attend (marketing oblige). Qui sera (seront) sacrifié(s)? Réponse lors des deux prochaines sessions de mercato.
Point de vue externe (vis-à-vis des concurrents)
D’une manière générale, l’effectif a été très légèrement renforcé alors que les concurrents se sont mieux renforcés. La Juventus n’a pas de rival. Napoli était déjà supérieur et même si Milan s’est un peu rattrapé ces derniers jours, ce sera difficile de rivaliser. L’équipe d’Allegri se trouve juste derrière, avec un groupe composé de Fiorentina et Roma mais attention à Inter et Lazio prêts à créer la surprise. L’AC Milan peut prétendre à la 3° place mais la lutte sera acharnée.
POINT DE VUE FINANCIER
Avec un budget de 0, Milan n’a pu faire qu’observer les autres équipes se renforcer durant des mois. Après avoir laissé croire que le mercato dépendait exclusivement des primes UEFA liées à la qualification en Champions League, Milan n’a finalement rien dépensé de ce budget après la qualification. Le transfert de Matri a été financé par la vente de Boateng. D’accord que Vergara a couté 2M, Poli 1,5M, Silvestre 1M (pour le prêt), sans oublier Saponara qui a couté 4M en janvier et Balotelli 24M payables en 4 ans (donc 6M en 2013) mais au final, aucun autre investissement n’a été effectué cet été. Un renfort en défense n’aurait pas fait de tort mais et on s’attendait à un bon milieu technique titulaire. Au niveau salarial, si on compare l’effectif 2012 – 2013 à celui de cette saison, il y aura probablement une légère augmentation. Les primes liées à la Champions League permettront de réduire (ou d’éviter) le déficit du bilan 2013. N’oublions pas que Milan a cloturé l’année 2012 à -7M alors que les 65M empochés grâce aux ventes de Thiago Silva et Ibrahimovic faisaient partie du calcul, ainsi que l’économie de salaires de ces joueurs et des sénateurs pour le second semestre 2012. La masse salariale du bilan 2013 va diminuer de 30-35M (les salaires des sénateurs, Ibra et Thiago du premier semestre 2012) mais le chiffre d’affaires, lui, sera réduit de 65M.
S’il fallait donner une note à ce mercato, elle serait de 5/10 : L’incapacité de vendre les indésirables a empêché d’atteindre les objectifs. La défense et le milieu n’ont pas été suffisamment renforcés, l’attaque est en surnombre et il y avait mieux à faire pour renforcer l’équipe tout en restant cohérent vis-à-vis du projet. Milan n’en ressort pas affaibli, et même légèrement meilleur, mais probablement pas assez pour améliorer les résultats de la saison passée. A voir. L’émotion que procure le retour de Kakà est belle mais c’est du court terme (contrairement à Ljajic par exemple) et c’est avant tout son niveau sur la pelouse qui sera important. C’est lui la variable de ce mercato, qui peut passer à 4/10 ou à 6/10 selon ce qu’il apportera à Milan.
