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Peillon: le retour d'un ministre devenu discret

Publié le 04 septembre 2013 par Juan
La rentrée scolaire est devenue un spectacle obligé. L'occasion de re-découvrir l'un de ces ministres qui a disparu des radars médiatiques depuis quelques mois.
Vincent Peillon était sur tous les plateaux.
Mardi 3 septembre 2013, jour de rentrée scolaire, la France qui rentre se montrait donc sur les ondes. La chose concernait notre avenir, des élèves d'école maternelle, primaire et secondaire. Les étudiants reprendront plus tard le chemin des facs et des établissements d'enseignement supérieur. L'exercice médiatique meublait une actualité autrement marquée par l'incroyable suspense d'une non-intervention en Syrie.

Vincent Peillon est devenu un ministre discret. Quelques bourdes la saison dernière (une réforme annoncée trop vite, un propos personnel sur le cannabis) ont renvoyé le personnage dans ces dossiers. Un portrait cruel du ministre fut livré dans les colonnes du Monde il y a peu, par Maryline Baumard, du Service éducation. Peillon serait "flou"; un ministre et un philosophe, mais qui n'a pas choisi lequel des deux personnages il préférait être.
Ce mardi, il était sur iTélé, après la visite de François Hollande dans une école à Denain. Micro en main, personnel enseignant sagement souriant derrière quelque part vers 16 heures de l'après-midi, le ministre répondait à des journalistes pour une fois tout sourire. Son président était venu enfoncer le clou, insister sur l'argument: la réforme des rythmes scolaires est une première étape pour lutter contre l'inégalité scolaire.
Oui, cette rentrée se passe mieux que les précédentes. Non, tout n'est pas résolu. Oui, il a encore beaucoup à faire. 
L'Education nationale est l'un de ces mastodontes du secteur public qu'une droite au pouvoir ou dans l'opposition adore caricaturer. Les prof y font un sale boulot, celui d'enseigner à des gamins désormais ultra-sollicités et sur-divertis par une société qui a dépassé le spectacle pour l'outrance voyeuriste. L'ancienne équipe au pouvoir s'était régalée de tous les clichés - trop de profs / moins d'élèves ; trop d'heures travaillées/ trop de vacances - pour sabrer dans les effectifs. Le plus triste est que l'effort, détestable pour l'éducation de nos progénitures, à raison de 15.000 suppressions de postes par an, n'eut finalement que peu d'impact sur le rééquilibrage de nos comptes publics. "Entre 2008 et 2012, les mesures prises dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP) n’ont pas eu pour conséquence de réduire le budget de l’éducation nationale" notait la Cour des Comptes en mai dernier.
Le pire fut d'attendre l'alternance pour découvrir une multitude de rapports internes mais tenus secrets sur la gravité de la situation: effondrement de la scolarisation des enfants de 2 ans (34% en 2000/2001 à 15% en 2009/2010), délabrement de l'enseignement des langues anciennes, échec de la semaine de 4 jours, etc.
De tous les secteurs, l'Education nationale fut donc celui le plus soigné par la nouvelle équipe Hollande. Cette saison, quelques 43.000 recrutements ont été lancés. Les effets se feront sentir plus tard. Pour l'heure, cette rentrée s'accompagne déjà de quelques changements.
- des  renforts d'enseignants sont déjà là: près de 7.000 (3 350 en primaire, autant pour le secondaire);
- il y a davantage d'adultes dans nos écoles avec, rapporte le blog Sauvons l'Université, "10 000 contrats aidés pour assister les directions d’école, 10 000 pour l’encadrement dans le second degré, et 8 000 contrats aidés pour l’accompagnement des élèves en situation de handicap".
- les nouveaux rythmes scolaires concernent 20% des élèves (4 jours et demi par semaine pour mieux étaler la charge éducative et réintégrer dans l'enseignement public et gratuit des activités péri-scolaires à l'accès inégalitaire).
- une prime de 400 euros a été octroyée aux enseignants du primaire.
Il reste encore trois années, expliqua le ministre, pour réécrire les programmes scolaires, former ces nouveaux enseignants en cours de recrutement; revoir les zones d'éducation prioritaire, décharger les classes. Le cartable du professeur Peillon est "bien chargé". Reste aussi le gel des rémunérations (général dans la fonction publique), la réorganisation des remplacements (déstructurés à la hâche par l'ancienne Sarkofrance), et la gestion des effectifs enseignants - critiquée en mai dernier par la Cour des Comptes.
L'allègement des programmes d'histoire/géographie en classe de 3ème et en terminale (pour les séries économique et sociale, littéraire et professionnelle) sera mis en oeuvre cet année. La surprise vient que la coupe interviendra dès cette année, sans attendre la révision générale des programmes. En avril d'avril, cinq syndicats enseignants l'avaient réclamé, fustigeant le "survol indigeste" des thèmes.
Mardi matin, Vincent Peillon était sur France Inter. Son contradicteur, l'animateur Patrick Cohen, confondait la pugnacité avec le commentaire. Qu'importe. Peillon ne commit aucune bourde, et conserva son calme devant un journaliste qui lui reprochait de ne pas aller assez vite. Peillon résiste à l'hystérisation. 
"Cette action est une action de long terme et je le revendique. "

Il y a quelques jours, le 27 août, il intervenait à l'Université d'Eté du Parti socialiste. Son intervention fut peu médiatisée. Il parlait pourtant de l'obligation d'accueil des enfants Roms. Un exact contre-pied du discours anti-Rom ambiant.
"Il faut que tous les enfants soient accueillis scolairement et il ne doit pas y avoir de rupture scolaire. Donc quand il y a des déplacements qui peuvent être tout à fait nécessaires de camps de Roms, il faut avant qu'ils aient lieu s'assurer que les enfants ne vont pas avoir de rupture de leur scolarité."
Pour d'autres, cette rentrée fut encore pire que les précédentes. Ainsi, 350 personnes, délogées d'un hébergement d'urgence qui n'avait plus les moyens faute de subventions, ont-elles trouvé refuge dans des campements de fortunes. Finalement, ce mardi 3 septembre, le "spectacle" valait la peine pour les caméras d'iTélé ou de France 3. Il y avait des enfants, dans ces familles expulsées.
Les images étaient fortes.


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