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Jules Renard et le « Mont Sabot »

Publié le 04 septembre 2013 par Jlhuss

"Un pays clair, facile à comprendre ..." Au soleil couchant en septembre

Jules Renard et le « Mont Sabot »

Jules Renard et le « Mont Sabot »

Jules Renard, le célèbre écrivain de l'autre Chitry de la Nièvre (Chitry-les-Mines, non loin de Corbigny), a visité le Mont Sabot en 1898 et en 1906; il en a fait la description dans son Journal :

6 juillet 1898 - Mont-Sabot (Nièvre). Une butte à pic. De quoi mettre une chapelle, quelques arbres et quelques tombes.
Les portes garnies de clous sont fermées par l'âge. Une partie de la chapelle est encore couverte en pierres plates. Des sapins où, d'en bas, on entend, par cette belle journée, souffler le vent, un vent de mort. Des tilleuls et des ormes foudroyés, énormes, des tombes dans l'herbe, des roses, toute une flore que je ne connais pas. Une servante enterrée à côté de son curé avec qui elle a vécu 45 ans : ça attendrit, et ça fait sourire. On a presque les nuages sur le front, un peu de vertige. On regarde à travers les barreaux de la petite fenêtre de la sacristie avec la peur d'y voir des choses. De vieilles croix de pierre finement fouillées par un artiste du Moyen Age. J'ai peur de mettre un morceau de croix de fer dans ma poche. Un clou que je veux arracher d'une porte me pique.
Une rose mord jusqu'au sang un doigt de pierre.
Tous ces arbres, c'est le même, qui se promène au bord de l'eau.
Regarder l'horizon, c'est regarder loin, mais c'est aussi regarder quelque chose de faux.

21 août 1906 - Voyage à Mont-Sabot par Combres, Ruages, Moissy, retour par le Mont-Bué, route de Lormes, Bailly, Reunebourg, Corbigny. J'étale ma mémoire comme une carte géographique, et je m'efforce de revoir ce que j'ai vu : perpétuel etonnement.
Deux châteaux à tours carrées qui peu à peu s'adoucissent et deviennent des fermes.
Chitry-Mont-Sabot avec ses toitures de paille et ses beaux noyers. Il n'en a pas l'air, dit le voiturier, mais c'est un pays riche. Une jeune fille apporte en dot un noyer.
Un chaos de maisons, de jardins et de tas de fumier. Des murs neufs de granit rouge.
Mont-Sabot. Un sabot droit, au nez fendu. Des tilleuls dont l'un est foudroyé, mort. On y enterre encore. L'église, couverte en pierres plates, est fermée. Vieilles tombes, dont les plus vieilles sont les mieux ouvragées. Vue magnifique : Montenoison, le château de Vauban, l'immense grange de Vézelay, Lormes. Les morts n'ont qu'à se lever sur un coude pour voir tout ça.
Un pays clair, facile à comprendre : une butte, un vallon, une butte, un vallon. D'une pente à l'autre, les paysans se voient travailler. C'est la première église que j'aie envie de voir : elle est fermée.
Un sentier tourne autour de la butte comme une jarretière au-dessus du genou.
Puis, l'heure rose, l'heure tendre, l'heure divine arrive. C'est une surprise que Dieu nous fait chaque soir. Il faudrait se coucher dans tous ces prés, boire à toutes ces fraîcheurs, vivre là, là, mourir partout.
Être né, là, au pied du Mont-Sabot, quelle enfance pour un poète !

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