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Regroupement des fichiers de police

Publié le 30 avril 2008 par Uscan

Au cas où vous ne le sauriez pas déjà, il existe de multiples fichiers de police en France. L'un des plus gros est le STIC (plus de 20 millions de personnes fichées) créé illégalement en 1995 par Charles Pasqua, et légalisé en 2001 par Daniel Vaillant. Le JUDEX, qui est son équivalent au sein de la gendarmerie nationale, a lui aussi été créé de façon illégale. Aujourd'hui la question de l'illégalité des fichiers de police se pose beaucoup moins dans la mesure où la CNIL en a été désaisie en 2004. Elle n'a plus rien à dire à leur sujet.

Aujourd'hui il s'agit de regrouper les données contenues dans ces deux fichiers. Le fichier s'appellera Ariane et il utilisera une interface de gestion et de saisie nommée Ardoise, pour "Application de recueil de la documentation opérationnelle et d'information statistique sur les enquêtes". Il s'agit de remplacer le "Logiciel de rédaction des procédures" (LRP) datant de 1995.

Mais Ardoise fait polémique. Sous le choix "état de la personne" le fonctionnaire ou le militaire auront les choix suivants : "homosexuel", "transexuel", "handicapé", "sans domicile fixe", "personne se livrant à la prostitution", "travesti", "relation habituelle avec personne prostituée", "personne atteinte de troubles psychologiques", "usager de stupéfiants", "permanent syndical". Récolter de telles informations pour tout individu ayant un contact avec la police (suspect, témoin, victime) suscite une levée de boucliers, particulièrement de la part des associations anti-homophobie. Michèle Alliot-Marie déclare donc qu'elle allait réfléchir "quelques semaines". Mais elle précise :

Les renseignements sont les mêmes que ceux du logiciel actuel.

C'est là que se situe le réel problème qu'éclipse la polémique. Créé en 1995 de façon complètement souterraine et illégale le STIC recueille déjà ce genre d'information depuis 13 années. Un tiers de la population figure dans ce titanesque fichier ! L'utilisation du STIC ou du JUDEX est entrée dans les mœurs de la Police et de la place Beauvau, qui ne voyaient donc rien de nouveau dans la mise à jour de son logiciel. Mais cette nouveauté porte à la lumière de la population des agissements qu'elle n'approuve pas nécessairement. Gageons que le "temps de réflexion" invoqué par la ministre servira à trouver une bonne méthode pour éviter que la vérité n'éclate.

Je suggère à la ministre de ne plus proposer de choix prédéterminés dans "état de la personne", comme cela était le cas avec l'ancien "Logiciel de rédaction des procédures" (LRP). Le ministère pourra déclarer en toute bonne foi :" nous avons supprimé ces choix", et dans la réalité il deviendra possible de tout inscrire en face du champ "état de la personne". Ce qui était proposé initialement bien sûr, mais d'autres choses encore (noir, arabe, punk, hacker, squatteur...). Cela calmera les craintes des associations tout en élargissant les possibilités de collecte de renseignement. N'oublions pas d'ajouter un champ "renseignements divers" pour y transposer les opinions politiques ou philosophiques des citoyens, car elles figurent déjà dans le STIC.

Ce n'est pas la CNIL qui va s'opposer en profondeur à ce projet (ce qui ne l'empêche pas de gesticuler et de conférer une caution morale). Relisons le Canard Enchaine du 14 avril 2004.

Heureusement, la Cnil n’est pas dirigée par un sauvage. Son nouveau président, Alex Türk, sénateur divers-droite, ex-RPR, est un spécialiste des fichiers de police. Il les adore, surtout interconnectés. Il a assuré la présidence des autorités de contrôle du fichier de l’espace Schengen, et des relevés d’empreintes digitales des demandeurs d’asile. Il a plaidé avec fougue pour le regroupement, demandé par Sarkozy, des fichiers de police et de gendarmerie.

Et, à présent, devant le Sénat, il propose que l’Etat puisse se passer de l’autorisation de la Cnil pour créer des fichiers de sécurité. On pourrait même se passer de la Cnil. Mais ce serait dommage pour son président..."

En effet, la loi du 6 août 2004 désaisira la CNIL des fichiers de police en cantonnant l'organisation à un rôle consultatif.

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