Magazine Société

Il y a 100 ans, Pégoud inventa l'acrobatie aérienne...

Publié le 25 septembre 2013 par Toulouseweb

… et la rivalité franco-russe !
Si, en ce mois de septembre 2013, on a beaucoup parlé du centenaire de la traversée de la Méditerranée par Roland Garros, on a peu parlé de Célestin Adolphe Pégoud qui fut Ť officiellement ť le premier ŕ effectuer une boucle, le 21 septembre 1913, ŕ bord d’un modeste Blériot XI…
Quelques semaines avant cet exploit, personne n’aurait osé imaginer qu’un avion pouvait voler autrement qu’ŕ plat. Qui plus est, c’était une époque oů les accidents aériens étaient si fréquents, qu’imaginer voler sur le dos relevait de la pure folie, et n’était d’ailleurs pas du tout envisagé…
Cependant, ŕ cette époque déjŕ, la sécurité était un sujet préoccupant et Pégoud, alors pilote d’essai pour Louis Blériot, avait pour mission de prouver qu’un pilote, seul aux commandes, pouvait s’échapper d’un aéroplane, grâce ŕ un parachute. Le constructeur Blériot lui fournit alors un appareil en piteux état qui pouvait ętre sacrifié et, aprčs une premičre tentative avortée le 16 aoűt, le saut fut finalement réalisé le 19 aoűt 1913. Pégoud Ť sauta ť (en réalité, il fut littéralement arraché de son sičge), son parachute se déploya et alors qu’il était encore suspendu dans les airs, le pilote aperçut le vieux Blériot XI décrire seul, Ť d’étranges arabesques ť, pendant une trentaine de secondes, avant d’atteindre son inéluctable destination : le crash.
Interrogé par la suite, le pilote déclara, hilare : Ť Mon coucou a fait le guignol tout seul ! ť
Ŕ partir de cet instant, l’aviateur fut persuadé qu’il était possible de reproduire volontairement ces figures et ainsi, d’évoluer librement dans les trois dimensions… Non sans peine, Pégoud réussit ŕ convaincre Louis Blériot qu’en cas de succčs, cela constituerait une formidable publicité pour ses avions, vantant notamment leur robustesse. Celui-ci lui confia alors un Blériot XI flambant neuf, cette fois.
Ainsi, le 1er septembre 1913, il entreprit de réaliser les premičres acrobaties aériennes de l’histoire de l’aviation. Juste avant le décollage, Pégoud déclara : Ť Qu’importe si je meurs, ce ne sera qu’un aviateur de moins ; mais si je réussis, combien d’existences précieuses seront conservées ŕ l’aviation ? ť.
Arrivé ŕ 850 mčtres d’altitude, le pilote coupa son moteur et effectua un passage dos par l’avant. Il vola environ 500 mčtres en position inversée, puis effectua une sortie dos par une demi-boucle. En somme, il réalisa un Ť S ť vertical.
Pour l’anecdote, aprčs s’ętre posé en vol plané, tout le monde remarqua que le pionnier était couvert d’essence, et Pégoud dut se faire apporter une combinaison propre, avant d’aller sabrer le Champagne.
Dans les jours qui suivirent, il multiplia les démonstrations, repoussant de plus en plus loin les limites de son Blériot XI. Et, ce 21 septembre 2013, devant une foule de curieux et un parterre de journalistes, il conclut son vol en effectuant pour la premičre fois, ce qu’on appelait ŕ l’époque le Ť looping-the-loop ť.
Ce fut un succčs total et Pégoud fut une nouvelle fois porté en triomphe. Il fut ainsi officiellement le premier ŕ effectuer une boucle…
Oui, le premier Ť officiellement ť, car quelques jours avant, le 9 septembre, un jeune lieutenant Russe, Pyotr Nesterov, jaloux des premičres acrobaties de Pégoud, l’homme qui Ť volait la tęte en bas ť, avait décidé sur un coup de tęte, de tenter le fameux Ť looping-the-loop ť, ŕ bord d’un monoplan Nieuport. D’aprčs de nombreux témoignages, Nesterov réussit l’exploit mais n’en tira cependant aucun honneur. En effet, le jeune pilote de l’armée du Tsar, n’étant pas autorisé ŕ réaliser ce vol, fut condamné ŕ 10 jours de prison…
L’histoire retiendrait donc le nom de Pégoud comme étant le premier ŕ avoir réalisé un Ť looping-the-loop ť, puisque contrairement ŕ Nesterov, son vol avait été minutieusement préparé dans ce but. Mais n’allez pas dire ça ŕ un Russe, il vous rirait au nez… et il n’aurait peut-ętre pas si tort !
Ŕ propos de Ť Russe ť, depuis que les compétitions internationales existent, les Russes se sont trčs souvent montrés les meilleurs. Depuis 1960 et la création du World Aerobatic Championship (WAC) de la Fédération Aéronautique Internationale (FAI), la domination Russe, des pays du Bloc de l’Est et de leurs redoutables Zlin et autres Yak, fut quasi totale jusqu’ŕ… 1986 !
Avec l’explosion du Bloc et l’apparition d’appareils occidentaux performants comme le Mudry Cap 230 par exemple, les Français se positionnčrent en rivaux trčs sérieux. Il y a bien quelques Américains et Allemands qui sortirent du lot, mais depuis 1988, on peut affirmer sans rougir que Français et Russes ne laissent pas grand-chose aux autres nations…
La rivalité et le talent de Pégoud et Nesterov seraient-ils héréditaires ?
Nous aurons une nouvelle fois l’occasion de le vérifier trčs prochainement, puisque les 27e championnats du monde de voltige de la FAI sont sur le point de débuter. Cette compétition se tient tous les deux ans, et ŕ chaque fois, dans un pays différent. Cette année, ils se dérouleront sur le North Texas Regional Airport (USA) du 9 au 20 octobre.
Du fait de l’éloignement géographique, ce n’est pas une mince affaire que d’acheminer l’équipe de France et ses avions sur place. Certains le seront par voie aérienne, d’autres par voie maritime, mais il fallait bien ça… on n’allait quand męme pas laisser tout le gâteau aux Russes !
Pégoud s’en serait Ť retourné les galoches ť dans sa tombe…
Bastien Otelli – AeroMorning

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Toulouseweb 7297 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine