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ACAP: FEDER et la Montagne

Publié le 01 octobre 2013 par Baudouindementen @BuvetteAlpages
Bruno-Besche-Commenge : " Selon Bruno Besche-Commenge, porte-parole de l’ADDIP, les brebis effrayées par les ours ont chuté. Il y aurait eu «plusieurs dizaines de bêtes au tapis, des agneaux lacérés par les oursons qui suivaient la mère, une brebis trouvée avec trois pattes cassées»." (DDM) Des comportements "vulgaires et irrationnels", c’est en ces termes que Nathalie Marthien, préfète d'Ariège dénoncait le 24 septembre la sortie de personnes qui n’avaient pas à se trouver sur l’estive de Pouilh lors du constat effectué par les agents de l’ONCFS. Il me semble qu'elle vise particulièrement un des stratèges et haut responsable de l'ADDIP, "chargé de mission recherche". En tout cas, Bruno bessche-Commenge vient de réagir en annonçant une conférence de presse de l'ADDIP le 9 octobre à Oust.
Alors que l’ADDIP-ASPAP déclarait avoir trouvé des « agneaux lacérés par les oursons qui suivaient la mère”, curieusement  la préfète annonçait que “l’ONCFS a constaté que les brebis mortes n'avaient pas été agressées directement par le plantigrade.”
La gifle aux pastorâleurs était cinglante. On parlera de « l'estive de Pouilh » comme on parle de la tentative d'escroquerie toute aussi glorieuse des « veaux d’Aston »: les quatre des veaux retrouvés morts dans le massif d'Aston, en Haute-Ariège, le 30 août 2006, avaient été victimes d'une maladie «de type charbon symptomatique» et non pas d'une attaque d'ours, comme l'avait annoncé le même responsable "vulgaire et irrationnel". C'est ce qu'on avait appris le 15 septembre 2006 ,auprès de la préfecture de l’Ariège, après autopsie des animaux. Comme quoi, il faut toujours vérifier ce que l'ADDIP raconte, surtout s'ils le crient fort. L’histoire a furieusement tendance à se répéter, puisque cela marche (le berger sera dédommagé "à son bénéfice et à celui du doute".
On aurait pû croire que les revendications des pastoraleurs allaient se calmer, qu’ils allaient se tenir à carreau au moins quelques jours, histoire qu'on oublie au plus vite. Que nenni !
Deux jours plus tard, la Dépêche, pas du tout génée de prendre la préfète pour une c..., en remet une couche et publie un communiqué de l’association des chambres d’agriculture des Pyrénées (ACAP) sans la moindre allusion au démenti de la préfète, sans commentaire, analyse ou mise en contexte; du journalisme à la "pyrénéenne". Quand ça vient du monde du pastoralisme, c’est comme si c’était “vu à la télé”, une pure vérité vraie, 100% appellation d'origine contrôlée.
Alors que les dégâts des ours diminuent de 36% en 2013, le bureau de l’ACAP, qui jusque là était parvenu a rester incognito dans le dossier de l'ours, communique dans le plus pur style Ipéhachebé: 

« La rentrée 2013 est marquée par une reprise des attaques de prédateurs sur les estives pyrénéennes. La dernière en date, sur l’estive de Pouilh, a particulièrement interpellé les élus de l’ACAP qui ont souhaité afficher leur solidarité vis-à-vis des éleveurs concernés. (...)
l’accroissement des risques pesant sur l’activité d’élevage en montagne contredit les dynamiques de structuration des filières et de développement de l’agriculture sur le massif. Ces événements interrogent clairement la continuité de l’activité de l’élevage sur les territoires concernés ».

J’avais lu cet article de la Dépêche, mais cela n’avait pas fait tilt dans mon cerveau embrumé par une nuit passé en forêt à écouter les amours du cerf...

Le bureau de l’ACAP

Mais cela n’a pas échapé à l’ADET. Le bureau de l’ACAP « parie », (ce qui n’est pas mon cas) « sur le développement durable des zones de montagne. Ambition ou abandon pour la montagne à l’heure des arbitrages nationaux sur la politique agricole commune? C’est la question que se pose l’association des Chambres d’Agriculture des Pyrénées dont le siège est à Foix. »
Le siège de L’ACAP est situé 32 avenue du Général de Gaulle, à Foix... tout comme le siège social de… l'ASPAP (Association pour la Sauvegarde du Patrimoine d'Ariège-Pyrénées) et celui de... la Chambre d'agriculture de l'Ariège, avec qui l’ACAP partage d’ailleurs le serveur téléphonique (seuls les deux derniers chiffres du numéro de téléphone changent) et le serveur mail (les adresses mail de contact possèdent le même nom de domaine …@ariege.chambagri.fr).
Tout ce petit monde se croise dans les couloirs et partage sans doute la même machine à café! 
Pour l’ADET: “l’ACAP récupère la tension créée par ses amis de l’Addip-Aspap pour négocier un plan d’aide à l’agriculture pyrénéenne de plusieurs dizaines de millions d’euros, dont plusieurs millions leur reviendront (NDLB: à l'ACAP) pour « l’animer ».”  En effet l’ACAP présente ses missions:

  • "Etre en veille sur les évolutions des politiques et être force de proposition (niveau régional, massif et national, et européen) dans les politiques agricoles ou territoriales qui concernent la montagne ;
  • Développer une capacité d'observation et de prospective sur l'agriculture pyrénéenne et son évolution et savoir en tirer les implications 1. Politiques : savoir mieux la défendre ; 2. Techniques : mieux l'orienter vers les systèmes les plus durables (viabilité économique, réponse aux attentes de la société; qualité de vie; etc...) ;
  • Améliorer l'image de l'agriculture de montagne et démontrer son intérêt pour les territoires et la société : impact sur les paysages, sur l'aménagement du territoire, sur la biodiversité, sur la sécurité des territoires. Rétablir la légitimité des aides en faveur de l'agriculture de montagne."

« Répondre aux attentes de la société », défendre la Nature, protéger effectivement les espèces sauvages dites "protégées" par la loi, partager la montagne avec les autres utilisateurs, répondre aux demandes des clients de la filière par exemple et « rétablir la légitimité » (ce qui montre bien qu'ils sont conscients que la légitimité est perdue) « des aides en faveur de l'agriculture de montagne ». Comprendre faire du lobbying en faveur du pastoralisme et partir à la chasse aux subsides générés par la présence d'ours.

Les liens entre subsides et ours ont toujours été inavalables pour eux. Il se sont battus des années pour obtenir le décrochage de l'ours et de son argent (sommes payées entre autres par le Ministère de l'écologie) pour le faire passer (pas le supprimer bien sûr) dans le giron du ministère de l'Agriculture,  beaucoup plus proche du milieu pastoral, ce qui permettait de nier l'importance de l'ours dans leurs revenus et de supprimer les conditionnalités "environnementales". Ils y sont arrivés. C'est sans doute cela qu'ils appellent "répondre aux attentes de la société": vivre sur le dos de la nature tout en la détruisant sans vergogne. Après les brebis, le déluge (au figuré mais aussi au propre, voir les innondations de 2013)!
Pourquoi l’ADET parle-t-elle “des amis de l’ADDIP-ASPAP” en parlant de l’ACAP? Pas uniquement parce qu’ils partagent peut-être la même machine à café et le même parking! La continuité de la stratégie dénoncée par l’ADET dans “Ours : les masques tombent : Tout ça n’était qu’une affaire de gros sous…“ ne vous semblera que plus évidente si on regarde qui on retrouve dans le bureau de l’ACAP:

  1. Comme Vice-président et président de la commission technique ovine (où l’on retrouve aussi Lur berri et la Fédération Nationale Ovine), Francis ADER, secrétaire de l’ADDIP. Le monde est petit. 
  2. On y retrouve Marie-Lise BROUEILH, présidente de l’ASPP65 (Association pour la Sauvegarde du Patrimoine Pyrénéen dans les Hautes-Pyrénées), par ailleurs présidente de l’AOP Barèges-Gavarnie, et « chargée de mission à l’ADDIP », tout cela en plus de son élevage. C’est aussi elle, la jument de Troie pastorale qui avait essayé de rentrer dans le PNP en essayant de se faire passer pour représente des associations "de défense de l'environnement", sans succès. 
  3. Et enfin, Bernard MOULE, président de la commission technique foncière, représentant de la FDSEA 65, membre élu à la Chambre départementale de l’Agriculture des Hautes-Pyrénées.

Tous les 3 ont un lourd pédigree anti ours.

Ce qui nous permet de mettre le doigt sur un point où la préfète de l’Ariège se le met dans l'oeil. Ils sont peut-être "vulgaires" mais pas « irrationnels »! Tout est murement préparé. Avec les conseils avisés de Laurent Garde, ils ont créés des associations multiples, pleines de "vice-présidents" pour donner à chaque "grande gueule" des casquettes multiples; ils se partagent les tâches et des missions de communications: les uns vont faire le coup de poing sur le terrain, les autres manipulent la presse à chaque attaque ou prétendue attaque pendant que les mêmes, ailleurs, changent de casquette pour partir récolter les fonds, l'argent de l'ours toujours! Pour preuve, la demande de soutien financier au pastoralisme prononçée par l'ACAP à l'occasion du dérochement d'une trentaine de brebis à Pouilh. (lire çi dessus).

On se trouve devant un véritable réseau, un “système” qui n’a rien envier à ce qu’on trouve à la tête du département de... l’Ariège.
L’ACAP a rapidement réagit au communiqué de l’ADET, poussant l’association ursophile d'Arbas (financée à hauteur de 130.000€, ils le lui reproche) à préciser : “L’ACAP, nous demande de préciser que ce n’est pas elle qui touche les millions d’euros « d’animation » intégrés dans les programmes d’aide à l’agriculture pyrénéenne”. Maladroite, L'ACAP reconnait de ce fait l’existance des millions d’euros d’argent public.  L’ACAP précisant que l’argent “est distribué à des structures « d’animation pastorale » partenaires de l’ACAP"
Soit, les millions ne sont pas directement pour l’ACAP, qui sur sa page statuts précise ses ressources de manière fort vague. Les ressources de l'association sont constituées "d’apports en fonds propres", de "cotisations annuelles", de "revenus des prestations ou services vendus"», des "revenus et intérêts des biens, fonds et valeurs lui appartenant" et de "subventions ou dotations de toute nature dont peut être bénéficiaire l'association". On n’en saura pas plus sur ces dernières...

“Fédérer pour la montagne”

Fédérer pour la montagne, une des mission de l'ACAP. Et dans Fédérer il y a FEDER, “Fonds européen de développement régional
A quelles structures est redistribué le pactole, si ce n’est pas l’ACAP qui en bénéficie? Qui sont les “partenaires” de l’ACAP? Rentrons dans le “système” soigneusement mis en place.

  • Des partenaires et réseaux “développement et recherche” dont “l’Institut de l’Elevage” et le “Collectif des races de Massif”,
  • les chambres départementales d’agriculture des Pyrénées-Orientales, de l’Aude, de l’Ariège (dont l'ACAP partage les batiments), de la Haute-Garonne, des Hautes-Pyrénées et des Pyrénées-Atlantiques,
  • Le bien nommé “réseau Pyrénées” dont l’APEM, Assemblée Pyrénéenne d’Economie Montagnarde  quia pour “membre fondateur”, l'APAC ou la Confédération pyrénéenne du tourisme, pour qui Ours est un gros mot et pas un attrait touristique.

Il y a un gros travail d'investigation à faire pour comprendre où et comment l'argent public et l'argent de l'ours innondent le pastoralisme, par le biais d'un réseautage et de cumuls de fonctions des extrémistes pastoraux pluri-actifs dans un dédale d'associations et de liens politiques ou agricoles locaux.

Sans ces artifices politico-pastoralo-comptables, le pastoralisme pyrénéen, serait mort et enterré depuis belle lurette. On se situe bien dans une problématique d'instrumentalisation de l'ours à large échelle. Bienvenue dans les Pyrénées, la dernière frontière sauvage en France.


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