Chaque année, les tribunaux pour mineurs traitent plus de 150 000 affaires. Fragilité due à l’âge, carence éducative, difficultés d’insertion sociale… la délinquance juvénile a des caractères qui lui sont propres. C’est pourquoi le droit français a mis en place un régime particulier pour les délinquants âgés de moins de 18 ans. L’objectif pour les institutions judiciaires est d’éviter la récidive et de remettre ces mineurs dans le bon chemin. Ni le sexe, ni la nationalité, ni la religion n’ont d’effet sur la responsabilité d’un délinquant : les juridictions françaises n’ont pas le droit de tenir compte des particularités d’un individu dans leur jugement. Pourtant, il est une caractéristique qui compte en droit français : l’âge du délinquant. Car les moins de 18 ans ont toujours été traités différemment par le droit français.
Jusqu’en 1912, cette différence de traitement prenait la forme d’une « excuse de minorité », sorte de circonstance atténuante que le juge décidait ou non d’appliquer. Les sanctions étaient également différentes puisque les mineurs jugés coupables étaient envoyés dans des « colonies pénitentiaires ». Mais ces colonies pour délinquants, qui avaient pour but de rééduquer les jeunes par le travail de la terre, ont vite ressemblé à des bagnes pour enfants.
A partir des années 1910, les lois ont commencé à changer sur la prise en charge des mineurs délinquants. L’idée générale de ces évolutions a été de faire primer l’éducatif sur le répressif afin d’éviter la récidive. Il s’agissait également de prendre davantage en compte la personnalité du mineur que l’acte lui-même.
Depuis quelques années, la tendance est au durcissement des lois concernant les mineurs délinquants. Cette tendance s’explique essentiellement par une augmentation des actes de délinquance commis par les moins de 18 ans. Alors que les mineurs délinquants représentaient 10% de la délinquance totale en 1970, ce chiffre s’élevait à 20% en 2000. Environ 175 000 mineurs sont mis en cause chaque année.
Pourtant, la tendance pourrait s’inverser. Laurent Mucchielli, chercheur au CNRS, affirme qu’après voir fortement augmentée, la part des mineurs dans l’ensemble des personnes mises en cause par la police et la gendarmerie commence à baisser. Elle serait aujourd’hui inférieure à 20%. La particularité du traitement judiciaire réservé aux mineurs délinquants s’observe sur le plan des sanctions. Pour les délinquants de moins de 18 ans sont prévues, en plus des peines générales, des mesures éducatives. C’est le cas des centres éducatifs renforcés. Crées en 1996, ce sont des structures légères, accueillant un nombre limité de mineurs délinquants qui sont encadrés par des éducateurs pour des travaux en équipe.
Le stage de citoyenneté, crée par la loi Perben II de 2004, va également dans le sens de cet objectif éducatif. Le décret de 2004 pris en application de cette loi précise en effet que ce stage « a pour objet de rappeler au condamné les valeurs républicaines de tolérance et de respect de la dignité de la personne humaine ». La visée de cette mesure prononcée pour un mineur de 13 à 18 ans est aussi de « lui faire prendre conscience de sa responsabilité pénale et civile ainsi que des devoirs qu’implique la vie en société. Il vise également à favoriser son insertion sociale », toujours selon le décret.
Pour les mineurs âgés de 16 à 18 ans, le tribunal peut ordonner un travail d’intérêt général. Le mineur délinquant est alors encadré pour travailler de 40 à 240 heures au profit d’une personne morale de droit public (les collectivités territoriales par exemple) ou d’une association habilitée. Le travail n’est pas rémunéré. Néanmoins, l’objectif éducatif n’est jamais très loin. La loi précise en effet que dans le cas où le juge prononce un travail d’intérêt général, il doit veiller à ce que ce travail soit adapté à l’âge du mineur mais aussi qu’il présente un caractère formateur ou de nature à favoriser son insertion sociale. Les mineurs âgés de moins de 13 ans sont devenus responsables pénalement le 9 septembre 2002, avec la loi Perben I. Avant cette loi, les enfants de moins de 13 ans étaient considérés comme irresponsables car n’ayant pas un discernement suffisant en raison de leur âge. Avec cette loi, ils peuvent désormais être jugés et condamnés. C’est au juge de décider si l’enfant a assez de discernement pour être jugé responsable de ses actes.
Le traitement des mineurs récidivistes a également évolué vers plus de sévérité. Avant 2007, tous les mineurs, même les récidivistes, bénéficiaient automatiquement de peines plus légères que les majeurs. Avec la loi du 10 août 2007, les mineurs récidivistes âgés de 16 à 18 ans ne bénéficient plus d’une « division de peine » par rapport aux majeurs et ils peuvent donc être jugés comme eux. Par ailleurs, la loi distingue la première récidive (où le juge a le choix de juger le mineur comme un majeur) et les récidives suivantes (le mineur est obligatoirement assimilé à un majeur).
Il reste néanmoins des peines qui ne peuvent être prononcées qu’à l’encontre des majeurs. Ainsi, les délinquants mineurs ne peuvent se voir imposer une interdiction de séjour ou une interdiction de territoire. Les peines de prison ne peuvent excéder 20 ans et les amendes ne doivent pas dépasser 7 500 euros pour les moins de 18 ans. Le droit français reste attaché à un traitement spécialement réservé aux délinquants mineurs.