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L’UMP en proie à des tortillements de Fillon

Publié le 16 octobre 2013 par Copeau @Contrepoints
Opinion

L’UMP en proie à des tortillements de Fillon

Publié Par Baptiste Créteur, le 16 octobre 2013 dans Politique

Les petites roucoulades libérales de François Fillon ne suffiront pas. S’il veut gagner, il va lui falloir faire bien plus.

Par Baptiste Créteur et h16.

La rumeur voudrait que François Fillon aurait été Premier Ministre pendant 5 ans. Il serait même apparu à des enfants sur le devant de la scène pour donner son nom à une réforme des retraites impopulaire et insuffisante. Impopulaire puisqu’il s’agissait d’une réforme (en France, la réforme est honnie). Insuffisante au point que les socialistes, qui promettaient, toujours constructifs, de l’annuler purement et simplement, se voient aujourd’hui contraints de l’étendre, bouche en cœur.

Rumeur ou fait vérifié, on ne saura pas. Toujours est-il que François Fillon a pris goût au combat, à l’odeur des saucisses en queue de cortège et à la lutte pour un retour doux mais véritable à la réalité. Il n’hésite d’ailleurs pas à poser, en châtelain simple, direct et en famille, devant son manoir de la Sarthe, refusant de s’inventer de toutes pièces une image qui aurait de bonne chance d’être un peu floue et mal cadrée ; il prend même le contrepied des ministres franciscains qui ont fait vœu de pauvreté pour les caméras et prient chaque jour Saint Cahuzac que leurs comptes à l’étranger ne soient pas découverts.

Le patrimoine de Fillon

C’est mignon tout plein, mais notre naïveté ne va tout de même pas au point de croire qu’un homme politique encarté UMP puisse en réalité être, depuis le début de sa carrière, un libéral sous couverture. Son mandat aura vu impôts, taxes et règlements se multiplier avec cette maestria toute particulière que les socialistes pleine peau n’auraient pas renié (et d’ailleurs, ils n’ont retiré aucune des créations fiscales de l’ère précédente, c’est dire). Et philosophiquement parlant, il se défend, encore aujourd’hui, d’être libéral.

Je ne suis pas membre de votre groupe des Réformateurs, mais je ne crains pas les réformes. Je ne me définis pas nécessairement comme libéral, mais ce mot qui vous est cher a ses vertus et ses grandeurs. Sur notre chemin commun, restez vous-mêmes. Vous êtes libéraux : eh bien, n’ayez aucune honte à l’être ! (François Fillon, 2007)

Donc, s’il était libéral (et, comme tout homme politique français, exemplaire) il n’aurait aucune honte à l’être et s’afficherait comme tel, n’est-ce pas, mais faut pas pousser. Le mot avait déjà, en 2007, ses grandeurs et ses vertus, mais là encore, faut pas pousser ce qui explique que pendant ses cinq années de mandat, il a consciencieusement nié les grandeurs et les vertus de la liberté.

Mais ça, c’était avant. Parce qu’avant, il n’avait pas un boulevard devant lui.

Maintenant, la gauche est en pleine déliquescence ; la victoire de Hollande à la primaire et à la présidentielle est, pour les Français, évoquée avec la même joie que le bris d’un miroir ou un weekend en famille à Maubeuge en février. Et la petite bruine d’impôts, de taxes, de ponctions vexatoires et de retenues « libératoires » à la source ou pas fournissent en principe un terreau fertile à un retour de l’opposition.

François Fillon s’est donc réveillé un matin avec un problème en tête : l’échiquier politique français comporte quatre cases. Deux à gauche, qui sont actuellement au pouvoir et pour qui personne n’aurait l’idée saugrenue de voter. Deux à droite, prises également. Sur la route des plus hautes fonctions de notre beau et grand pays (qui a ses grandeurs et ses vertus), il a deux farouches adversaires à affronter : Marine Le Pen et Jean-François Copé.

François Fillon ne peut pas occuper la traditionnelle ligne de l’UMP, dirigiste pour restaurer la grandeur du pays et socialiste sans l’afficher ; Copé s’en occupe, et lui lance quelques peaux de banane au passage. Et, même si personne n’en voudrait pour notaire, Jean-François Copé a trop de poids à l’UMP ; la place actuelle de successeur est prise, que ce soit par l’ami Jean-François ou le retour du Petit Nicolas.

À droite, l’hydre fasciste se dresse plus fière que jamais. Certes, du point de vue de Fillon, la Marine n’est en réalité pas plus fasciste que les autres partis (UMP, PS, Front de Gauche, oui oui) et pas franchement plus inquiétante dans ses idées et son programme. Elle est potentiellement un allié de choix pour les municipales (et pas sectaire, chouette). Oui, mais elle est aussi un adversaire de taille pour les présidentielles.

Zut alors.

Alors, que faire ? Même s’il affiche son ouverture tous azimuts, François Fillon sait qu’il ne sera jamais assez décontracté pour accueillir derrière lui sans douleur tous les politiciens français.

Je veux parler avec tous. Avec Jean-Louis Borloo, pour qui j’ai de l’estime et du respect. Avec François Bayrou, pour qui j’ai de l’amitié, même si je ne peux pas comprendre son choix de voter François Hollande à la dernière élection présidentielle. Avec les électeurs du Front national qui, pour beaucoup d’entre eux, sont des patriotes n’aspirant qu’au redressement de notre pays et à l’exemplarité de ses dirigeants.

Oui, décidément, Fillon est totalement open, sans cependant être l’allié des médias, mais plutôt celui de la réalité :

À défaut d’avoir prise sur la réalité, François Hollande veut avoir prise sur la façon dont cette réalité va être ressentie par les médias.

Une conclusion logique s’impose à l’ami François : la réalité exige des solutions libérales. Cela devrait être une évidence, ne serait-ce que parce qu’on ne peut pas ajouter encore une couche d’État – à moins de recourir aux mêmes solutions rigolotes que tous les dirigeants ouvertement collectivistes ont dû déployer (famines, camps et balles dans la nuque).

François Fillon se demande donc s’il ne serait pas utile de lancer une candidature libérale. Ben tiens.

Maintenant, Fillon fait des calines

Soyons honnête : la plupart de ses propositions sont libérales, son discours orienté sur la baisse de la fiscalité l’est aussi. Mais cela ne suffira pas. S’il veut gagner, il doit être authentique et s’afficher réellement libéral. Il ne peut pas gagner en n’osant pas préférer clairement la liberté à l’égalité, la production à la redistribution, l’échange au constructivisme, bref sans renoncer aux vieilles lunes socialistes habituelles en France.

Il peut en revanche gagner s’il arrive à faire évoluer le spectre du débat. La fenêtre d’Overton est, pour quelques temps au moins, plus ouverte qu’auparavant ; elle se déplace à droite. Les Français n’ont plus peur de voter FN, de soutenir un bijoutier de combat, n’écoutent plus des médias qui cherchent à faire l’opinion et du chiffre et échouent sur les deux tableaux.

Il peut gagner si, pris d’un instant de lucidité, il se convertit réellement au libéralisme, s’il coupe le gros cordon ombilical étatiste qui le relie encore à la vie politique française, s’il est prêt à faire cavalier seul face à tous les dirigistes qui occupent les bancs de l’Assemblée, du Sénat et des partis français. Il peut gagner s’il a réellement des convictions fortes et assez d’intégrité à leur égard pour penser réellement et dire sincèrement que la propriété est un droit inaliénable. Il peut gagner s’il explique que l’État-providence devra progressivement disparaître, qu’il doit dans un premier temps traiter tous les Français de la même façon et leur permettre de le quitter s’ils le souhaitent. Il peut gagner s’il affirme que le citoyen a des droits que l’État doit protéger plutôt que des devoirs envers un État qui ne lui doit rien en retour. Il peut gagner s’il affirme que l’opposition la plus sensée en politique est entre pouvoir et liberté et qu’il est prêt à renoncer au premier pour rendre la seconde aux Français (oui, il peut gagner s’il dit ça, et on peut rêver qu’il le dise).

Et cela commencerait sans doute par un petit soufflet à Christine Lagarde, qui veut confisquer l’épargne. Ça se préciserait nettement avec la présentation d’un programme clair qui laisserait enfin les Français libres d’exprimer leurs préférences. S’il est assez convaincant, il peut même parvenir à rallier derrière lui assez de monde pour convoquer des états généraux de la France à l’issue desquels les guignols actuellement au pouvoir ne termineraient sans doute pas leur mandat.

Comme on le voit, ses petites roucoulades libérales ne suffiront pas. S’il veut gagner, il va lui falloir faire bien plus.

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