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Prescription et juste titre

Publié le 23 octobre 2013 par Christophe Buffet

Un arrêt rendu en matière d'usucapion relativement au juste titre : 

"Vu l'article 2265 du code civil applicable en la cause ;



Attendu que celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans, si le véritable propriétaire habite dans le ressort de la cour d'appel dans l'étendue de laquelle l'immeuble est situé, et par vingt ans, s'il est domicilié hors dudit ressort ;



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 9 décembre 2008) que, par jugement irrévocable du 17 novembre 2003, régulièrement publié au bureau des hypothèques, le tribunal de grande instance de Bayonne a annulé les actes authentiques des 23 octobre et 22 décembre 1978 contenant échange de parcelles passés entre Mme X... et M. Y... ; que, sur la parcelle lui revenant après échange, Mme X..., aux droits de laquelle vient M. X..., a fait construire un immeuble à usage d'habitation et de bar restaurant ; que M. Y... a assigné M. X... aux fins d'obtenir la restitution de sa parcelle à la suite de l'annulation des échanges intervenus et la démolition de l'immeuble construit dessus sur le fondement des articles 544 et 545 du code civil ;



Attendu que, pour accueillir ces demandes, l'arrêt retient que M. Jean Y... n'a pas consenti à l'échange des parcelles, son frère Louis Y... n'ayant pas reçu mandat de sa part pour passer l'acte et aucun acte sous seing privé n'ayant été conclu au préalable entre les parties ou leurs auteurs, et que le titre invoqué par M. X... serait susceptible d'avoir une incidence sur l'existence ou non de sa bonne foi, mais pas sur la réalité du transfert de propriété ;



Qu'en statuant ainsi, alors que l'acte portant échange de parcelles conclu pour le compte d'un propriétaire par un mandataire non pourvu d'un pouvoir régulier constitue pour le cocontractant un juste titre, au sens de l'article 2265 du code civil alors applicable, lui permettant de prescrire la propriété du bien, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;



PAR CES MOTIFS :



CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 décembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Pau, autrement composée ;



Condamne M. Y... aux dépens ;



Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de M. Y... ; le condamne à payer à la SCP Boré et Salve de Bruneton la somme de 2 500 euros ;



Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;



Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt



Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour M. X... 



Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné Monsieur André X... à restituer à Monsieur Jean Y... la parcelle sise à IHOLDY cadastrée AB n° 66 dans un délai de huit mois à compter de la signification du jugement et d'AVOIR condamné Monsieur André X... à procéder dans le même délai à la démolition de la construction édifiée sur cette parcelle ;



AUX MOTIFS QUE « Monsieur X... soutient avoir acquis la parcelle litigieuse par prescription abrégée du fait de l'existence d'un juste titre et de sa bonne foi ; que le juste titre est celui qui serait de nature à transférer la propriété à la partie qui invoque la prescription ; qu'en l'espèce, tel n'est pas le cas ; qu'en effet, Monsieur Y... n'a jamais consenti à l'échange des parcelles, Monsieur Y... n'ayant pas reçu mandat de sa part pour passer l'acte et aucun acte sous seing privé n'ayant été conclu au préalable entre les parties ou leurs auteurs ; qu'enfin, l'invocation de ce titre par Monsieur X... serait susceptible d'avoir une incidence sur l'existence ou non de sa bonne foi mais non pas la réalité du transfert de propriété ; qu'en conséquence, il convient de confirmer la décision déférée y compris sur le délai fixé par le Tribunal et le débouter des demandes en astreinte et en exécution par Monsieur Y... des travaux de démolition non justifiées en l'espèce » ;



ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « aux termes de l'article 2265 du Code civil « celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans, si le véritable propriétaire habite dans le ressort de la Cour d'appel dans l'étendue de laquelle l'immeuble est situé, et par vingt ans, s'il est domicilié hors dudit ressort » ; que l'article 2267 du Code civil prévoit que « le titre nul par défaut de forme ne peut servir de base à la prescription de dix et vingt ans » ; qu'il est admis que ce texte vise en réalité essentiellement les actes entachés de nullité absolue et non les seuls actes dont la validité est subordonnée à l'existence de conditions de forme ; qu'en l'espèce, le jugement du 17 novembre 2003 rendu par le Tribunal de grande instance de BAYONNE a déclaré les actes authentiques d'échange d'immeubles ruraux et de constitution de servitude conclus entre Monsieur Y... et Madame X... nuls et de nul effet au motif que « dans son rapport d'expertise, Madame Z... relève que la signature Y... figurant sur la procuration en date du 8 avril 1978 n'est pas de la main de Monsieur Jean Y... » ; que sous réserve même de la possibilité d'appliquer l'article 2265 du Code civil qui protège l'acquéreur par juste titre et de bonne foi contre le défaut de propriété de celui dont il tient son droit en la présente espèce où le bien avait été acquis du véritable propriétaire, en tout état de cause, les actes d'échange et de constitution de servitude étant entachés de nullité absolue, ne peuvent servir de base à la prescription abrégée ; que l'absence d'un juste titre suffit au rejet de la demande sans qu'il y ait lieu de s'interroger sur la bonne ou la mauvaise foi de Madame X... ; qu'il y a lieu de constater que Monsieur André X... n'a pas acquis la propriété de la parcelle AB n° 66 par prescription et que l'action de Monsieur Jean Y... est recevable » ;



1°) ALORS QUE constitue un juste titre, l'acte susceptible de transférer la propriété d'une bien, auquel l'une des parties n'a pas valablement consenti ; qu'en affirmant que l'échange consenti au profit de Marie-Jeanne X... ne pouvait constituer un juste titre dès lors que l'une des parties, représentée par un mandataire qui n'avait pas valablement reçu de pouvoirs, n'y avait pas consenti, quand cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce que cet acte soit considéré comme un juste titre, la Cour d'appel a violé l'article 2265 du Code civil ;



2°) ALORS QUE l'acte conclu par un mandataire apparent, dépourvu de pouvoirs, n'est atteint que d'une nullité relative ; qu'en déduisant de la fausseté du mandat grâce auquel l'acte d'échange avait été conclu au profit de Marie-Jeanne X..., la nullité absolue de cet acte d'échange, quand l'absence de consentement du prétendu mandant ne peut être sanctionnée que par la nullité relative des actes subséquents, la Cour d'appel a violé les articles 1108 et 1984 du Code civil ;



3°) ALORS QUE celui qui a acquis de bonne foi un immeuble d'un tiers qui avait en apparence tous pouvoirs pour le lui céder peut s'opposer à l'action en revendication du véritable propriétaire du bien ; qu'en l'espèce, Monsieur X... faisait valoir que son auteur, sa mère, Marie-Jeanne X... avait cru que Monsieur Louis Y... était mandaté par son frère Jean pour céder la parcelle cadastrée n° 66 lui appartenant ; qu'en se bornant à énoncer, pour condamner Monsieur X... à restituer à Monsieur Jean Y... la parcelle cadastrée n° 66, que ce dernier n'avait jamais consenti à l'échange de cette parcelle dès lors que son frère Louis n'avait pas reçu mandat de sa part pour passer un tel acte, sans rechercher, comme elle y était invitée, si Madame X... n'avait pas pu légitimement croire aux pouvoirs du prétendu mandataire, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 544 et 1998 du Code civil."


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