Magazine Côté Femmes

Quand un chroniqueur du Plus se prend pour un chevalier blanc contre le viol

Publié le 25 octobre 2013 par Juval @valerieCG

Je suis tombée la semaine dernière sur ce billet d'un chroniqueur sexo du Plus, journal qui a déjà eu quelques soucis avec le viol et ferait bien, au passage, de relire certains textes de ses chroniqueurs avant de persister sur un sujet d'évidence pas maîtrisé (et je reste gentille).

On va le dire tout net un homme ne peut pas donner de conseils sur le viol aux femmes. Non il ne peut pas ; qu'il en donne aux hommes sur le sujet s'il veut, qu'il apprenne aux centaines de milliers d'hommes agressés à se défendre, aux dizaines de milliers d'hommes violés à se défendre mais pas aux femmes.

Comme nous l'avons déjà vu, les femmes sont éduquées à inhiber leurs comportements agressifs. Je vous l'avais montré par différentes expériences ; très tôt, on éduque les filles à ne pas être agressives, à ne pas se défendre et à être passives.
Il va ensuite leur être enseigné d'avoir peur et surtout du viol, le méchant loup des filles de plus de 12 ans. Le viol va être vu comme la chose la pire pouvant arriver, devant le meurtre, devant la mort, devant tout. Cette peur du viol peut devenir si paralysante, si présente que des femmes, comme Virginie Despentes, disent avoir tout à fait été capables de réagir quand on les agressait non sexuellement mais qu'il était impossible de le faire lorsqu'il s'agissait d'un viol.
Tout cela, un homme ne le vit pas car il est socialisé différemment. Même si un homme peut être violé, on ne l'éduque pas avec cette peur du viol ; pire on l'éduque avec l'idée que cela n'arrive pas aux hommes, aux faux hommes peut-être.

De plus, avant d'enseigner quoi que ce soit au sujet du viol, il convient de se souvenir d'une chose ; seulement 10% des femmes portent plainte. 90% n'ont pas porté plainte. Ces femmes -là nous lisent et je n'ai aucune envie, à quelque moment que ce soit, de leur faire ressentir l'idée qu'elles n'ont pas fait tout ce qui fallait, qu'elles ne se sont peut-être pas assez débattues ou je ne sais quoi. Avant toute chose, le but est d'inciter les femmes à porter plainte et je doute qu'un texte maladroit qui les culpabilise les incite à le faire.

Revenons donc au texte de notre ami Courbet.

Le mot "animal" qui est employé pour désigner les violeurs est évidemment profondément maladroit. On a suffisamment parlé de culture du viol pour éviter ensuite de parler "d'animal" sous-entendant ainsi qu'il s'agit d'un comportement naturel ou loin de ce que pourrait faire un homme normal.

Courbet nous dit alors "Car les messages de prévention "fais attention", "méfie-toi des gens" sont certes utiles mais insuffisants" ; utile à quoi, utile à qui ? Se méfier de quels gens ? Faire attention à quoi ? Cet espèce de conseil parfaitement vague qui vise juste à distiller une peur prégnante chez les femmes sert juste à limiter leurs mouvements et à les confiner chez elles, dans un des lieux, où, tiens donc, elles ont le plus de risques d'être violées.

S'en suivent une série de conseils qu va du meurtre d'hommes innocents (les hommes assassinées au Mexique l'étaient) . Est-on conne de ne pas avoir pensé à buter tous les hommes pour éviter d'être violées. S'en suit l'antienne autodéfense tiré d'un site qui fait son beurre sur la peur des femmes. Vous noterez l'expression "violeur occasionnel" ; je ne sais pas trop ce qu'ils entendent par là. Est-on censé adapter notre attitude après avoir demandé au violeur s'il le fait occasionnellement ou de façon habituelle ? Rappelons une nouvelle fois que vous risquez peu d'être violée dans un parking, peu d'être embarquée à bord d'une voiture , donc tous ces conseils sont bien gentils mais absolument pas adaptés au cas habituel ; je fais quoi si un mec en qui j'ai toute confiance et que j'ai invité à boire un dernier verre tente de me violer ? Je fais  quoi si c'est mon mec ? mon père, mon cousin ? La réalité est celle-là. Pas un espèce d'Emile Louis qui surgit du fin fond des âges.

Continuons avec les conseils suivants qui m'ont laissée pantoise ; uriner ou déféquer pour dégoûter le violeur. Mais comment vous dire. Dans une situation aussi sidérante que le viol, le corps se met souvent en stand by. je ne sais si Courbet est au courant mais on ne défèque pas sur commande et encore moins dans une situation de stress immense. Quant à cette phrase "Et à moins de tomber sur un scato-urophile, la méthode peut porter ses fruits.", j'en viens à me demander si tout ce texte n'est pas un vaste troll, une grosse plaisanterie où l'on peut, parce qu'on ne se sent pas concerné, vaguement discuter, entre la poire et le fromage (demain tu me feras un sujet sur les sex toys coco) du viol.

Continuons avec le sempiternel "balançons des insanités à un violeur (pardon un bâtard, Courbet n'aime pas les violeurs, il doit nous le dire) et enfin le merveilleux témoignage de Mina tiré du non moins merveilleux site "Apprendre à manipuler les gens".  Alors là j'avoue que je me demande si Courbet a conscience des liens qu'il utilise. On parle du viol, il nous sort un site appelé "apprendre à manipuler" qui utilise les techniques classiques pratiquées par tous les PUA pour arriver à leurs fins.

Enfin on arrive aux accessoires anti viol (qui n'existent pas en France mais détail que voilà) avec le fameux collant anti viol.. Mais qui peut sérieusement penser - à moins d'écrire un texte sans maitriser le sujet - qu'une collant même moche va arrête un violeur ? Qui peut sérieusement écrire ca ? Un collant pareil provoquera juste des réactions hyper agressive de type "vas y salope qui fait sa maligne montre ce qu'il y a dessous".

Enfin le paragraphe de fin. Magique.

"Toutefois, en cas d’agression, et que le viol ait réussi ou non, la priorité reste de dénoncer un tel acte criminel. Dans la mesure du possible, l’objectif serait de pouvoir préserver les preuves : traces de doigt, poils, sang, sperme qui permettront de chopper l’ADN et accélérer l’arrestation. Ne pas sous-estimer le danger sanitaire non plus en vous rendant éventuellement aux urgences pour un suivi médical et/ou psychologique. 
Mais surtout en parler. Le garder pour soi risque de vous peser très longtemps et ne fait que minimiser l’acte et parfois perdurer les mythes sur le viol."

Non ce n'est pas le fait de se taire qui fait perdurer les mythes sur le viol ; il convient de lire et comprendre les textes que l'on lit. A aucun moment, Antisexisme n'évoque le fait que se taire conduit à faire perdurer un mythe. Dire cela c'est juste une nouvelle fois faire perdurer l'idée que la victime, en ne parlant pas, sera responsable des éventuels viols que son violeur pourrait commettre. or, soyons clair, le seul responsable est le violeur.
En parler peut s'avérer extrêmement violent et cela serait mentir aux victimes que de ne pas leur dire. La priorité n'est pas dénoncer un acte criminel mais d'aller bien et de s'en sortir. Ca passera par plein de méthodes dont aucune n'est l'obligation à faire quoi que ce soit. Est-ce qu'on peut ne pas dire à une victime de viol qu'elle risque de s'en prendre plein la figure ? d'être traînée dans la boue ? Reparlons donc de Créteil tiens. Reparlons de toutes les fois où après avoir dit le viol à sa famille, ses amis, des femmes se sont vues interroger, questionner sur leur tenue, leurs fréquentations, leur vie sexuelle passée. Les femmes porteront plainte quand la société toute entière aura compris que quoi qu'elle ait fait, qui qu'elle soit, une victime de viol n'est jamais responsable.

Donc soyons simple. Laissez les femmes discuter entre elles des techniques à adopter. Ne vous en mêlez pas. Ne venez pas, comme la dernière fois, m'expliquer que je devrais être moins agressive et sourire pour demander à quelqu'un de me laisser sa place. Sourire c'est un luxe ; une femme qui sourit à un mec dans le metro risque de se le coltiner sur 20 stations tant il pensera qu'il a une chance.
Si on a envie de vos conseils, peut-être qu'on vous en demandera. Ou pas.
Vous voulez être utiles aux femmes ? Déconstruisez la masculinité. Occupez-vous de déconstruire tous ces comportements expliquant qu'un mec a besoin de baiser sinon il mourra dans d'atroces souffrances, les couilles explosées.

ps ; tout  post conduisant à donner des conseils sans intérêt pour se prémunir du viol sera censuré. oui je ne suis pas ouverte au débat.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Juval 59548 partages Voir son profil
Voir son blog

Magazine