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Accord nucléaire : un laissez-passer vers la bombe

Publié le 24 novembre 2013 par Laurentarturduplessis

Le lâcher prise d’Obama

L’accord sur le nucléaire iranien qui vient d’être conclu à Genève sous la houlette du chef du Département d’État américain, John Kerry, résulte de la volonté du président Barack Obama d’apaiser les tensions entre l’Iran et les États-Unis et, subsidiairement, de rouvrir ce juteux marché aux entreprises américaines. Les desiderata d’Obama ont permis au Guide suprême, Ali Khamenei, véritable maître de l’Iran, d’obtenir un assouplissement de l’embargo et des sanctions qui étouffent l’économie de son pays.
Avec ses 196 kg d’uranium enrichi à 20%, l’Iran n’est pas loin d’être en mesure de fabriquer sa première bombe atomique. Pour cela, il lui faut disposer de 250 kg d’uranium à 20%, et les enrichir à 90%, ce qui est un processus très rapide. Avec ses 19 000 centrifugeuses, dont 1000 de nouvelle génération (cinq fois plus rapides que les anciennes), l’Iran peut enrichir la quantité qui lui manque en un mois ou deux s’il le décide.
Washington a configuré cet accord préliminaire au terme de négociations bilatérales menées depuis six mois avec Téhéran, et l’a imposé à ses alliés, au premier rang desquels la France, dans le cadre de cette signature des « 5+1 » (les cinq membres du Conseil de sécurité de l’ONU et l’Allemagne).
Par cet accord provisoire, le président Obama a souhaité suspendre la marche de l’Iran vers la bombe atomique. L’accord prévoit que l’Iran cesse d’enrichir l’uranium au-dessus de 5 %, d’installer de nouvelles centrifugeuses et d’œuvrer à l’achèvement de son réacteur à eau lourde d’Arak. Ce dernier point est l’unique concession faite à la France. L’Iran promet aussi de neutraliser son stock d’uranium enrichi à 20%. En échange, les « 5+1 » n’imposeront pas de nouvelles sanctions à l’Iran au cours des six prochains mois.

L’enrichissement va continuer

Pour Téhéran, l’essentiel est préservé. À l’issue des négociations, le ministre des Affaires étrangères iranien, Mohammad Javad Zarif, a déclaré à la presse que l’accord contient une « référence claire selon laquelle l’enrichissement va continuer » en Iran, car « nous estimons que c’est notre droit ». Zarif a insisté : « Nous pensons que cet accord et le plan d’action » signifient que « le programme nucléaire iranien va continuer ».
Gageons que, pendant les six prochains mois, se poursuivra l’habituel jeu de cache-cache entre les Iraniens et les inspecteurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), qu’ils ont si fréquemment manipulés. Ce n’est pas l’AIEA, mais les résistants de l’Organisation des Moudjahidines du peuple (OMPI), qui ont révélé au monde, en 2002, l’existence d’un programme nucléaire secret iranien commencé 18 ans auparavant. Ce que l’Iran défera d’une main pour amadouer les Occidentaux, il le refera de l’autre, discrètement. Il pourra se le permettre, puisque l’accord intérimaire ne prévoit pas le démantèlement de ses installations et de ses centrifugeuses, et qu’il a des sites secrets. Par exemple, un tout nouveau site, au nord de Téhéran – nom de code « Ma’adane-e Charq » (« la mine de l’Est ») ou « Projet Kossar », enfoui dans la montagne aux environs de Damavand. Sa construction est en cours depuis 2006. Khamenei a souhaité l’accord de Genève parce que l’affaiblissement de l’économie iranienne résultant de l’embargo et des sanctions était tel qu’il risquait de déstabiliser le régime. Il lui fallait un peu d’oxygène. Ce traité le lui fournit.

Netanyahou pourrait trancher le nœud gordien

Dans six mois, au terme de cet accord préliminaire, les problèmes de fond demeureront. Obama souhaitera-t-il impulser un nouvel accord, en principe définitif, qui permettrait en fait à l’Iran de continuer à poursuivre secrètement son programme nucléaire militaire, fût-ce au ralenti ? Cela correspondrait bien aux arrière-pensées du président américain, titulaire du Prix Nobel de la paix : il ne veut pas d’un bombardement de l’Iran avant le terme de son mandat, qui est le second et le dernier. Mais le Premier ministre d’Israël, Benyamin Netanyahou, pourrait, lui, vouloir trancher le nœud gordien en bombardant l’Iran pendant son mandat de Premier ministre, dont la durée est soumise aux aléas d’un système politique inféodant l’exécutif à des majorités de coalition changeantes par nature. L’objectif principal de cet assaut militaire serait d’entraîner l’aéronavale américaine, très présente à proximité de l’Iran, dans les turbulences qu’il provoquerait. Il obligerait ainsi les États-Unis à bombarder l’Iran à leur tour.



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