Vendredis du Vin # 61: Il était une fois...

Par Irislisson

... une fille, qui avait tout perdu de ce qui lui semblait important dans la vie. Toute dénouée d’espoir, elle se trouvait au milieu des autres, dans une ville, dont elle avait toujours rêvé visiter les fameux vignobles des alentours, de gravir les pentes du Piémont, gouter au Nebbiolo, muri sous les brumes bienfaisants du petit matin... et maintenant, elle en était si proche, mais le cœur ne lui en disait plus rien, trop grand sa crainte, de ne plus pouvoir partager, ce qu'elle allait peut-être découvrir...

Le soir, elle se trouvait à une table campagnarde, entourée de gens chaleureux, de couples, qui partageaient leur amour et leurs vins, qui se passaient la bonne chair et les bons mots - et sa solitude la faisait frissonner même là, où l'amitié éclairait les visages...

Vint le moment, où un des convives, venu d'une rivière, qui coule douce au milieu de la France, sortit un tout petit flacon et en versait une larme dans chaque verre - un liquide rare, épais, doré, presque ambré, qui coulait en chaudes larmes le long de la parois de son verre, quand elle le faisait légèrement tourner, pour mieux admirer cette couleur chaude et humer son odeur - et quand elle le prenait finalement sur sa langue, le miracle se produit - un bonheur, qu'elle n'avait plus cru réservé pour elle, dans cette vie terrestre, l'envahie, remplissait son palais, passait dans sa tête, emplissait son cœur - se prolongeait jusqu'au bout de ses doigts - et elle prenait son verre, sortait sur la pointe des pieds dans la nuit, les jeux à moitié clos pour se retrouver seule parmi les ombres du jardin, et lever les jeux aux milles étoiles, qui parsemaient le firmament - et elle sentait, qu'elle n'était pas seule ce soir, que toutes ces lumières lointaines et scintillantes communiait avec elle et que l'esprit de celui, qui l'avait quitté, était là, pour partager cet émerveillement, né d'une goutte de vin sur sa langue, de cette Essence, qui coulait sur sa langue, descendait doucement le long de sa gorge, pour lui aller tout droit au cœur - et une larme solitaire allait rejoindre la dernière .goutte de ce nectar au fond de son verre, quelle versait sur le sol, libation en honneur de celui, qui, comme elle, avait rêvé d'un jour créer ne serait ce que une fois, un vin, qui fasse pareil à celui, qui le croise sur son chemin - remplir son cœur de bonheur, faire rêver, rendre heureux dans un moment de communion avec un fruit de la terre, du soleil et de l'air, transformé par l'homme en toute humilité... et elle se sentait enrichie pour la vie par ce souvenir inoubliable depuis...

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et merci à David Farge du blog Abistodenas de m'avoir donné envie, de revivre ce moment miraculeux d'une rencontre avec un vin, qui m'a marqué, comme peu d'autres avant et depuis et qui pour moi incarne le Sens de tout travail de vigneron, qui ne trouvera son accomplissement que quand il fait rêver de la sorte et qui guide la quête de l'amateur du vin toujours en avant dans sa soif de découverte...