C’est plutôt la stupidité qui devrait être « interdite »…
Si comme moi, dimanche soir dernier, vous étiez affalé dans le canapé à zapper ce qui pouvait se regarder à la télé, peut-être avez vous regardé l’émission Zone Interdite sur M6 dont le sujet s’intitulait « Un an chez les fous les plus dangereux« . Avec un titre comme celui-là, j’aurai déjà dû me douter que j’étais tombé sur l’un des pires reportages « journalistiques » (si on peut encore appeler ça du journalisme) que j’ai vu de ma vie. Sans déconner.
Alors c’est vrai, j’ai été alléché par le trailer du reportage, montrant quelques « fous dangereux » comme ils aiment les appeler (les journalistes de seconde zone) ces gens malades psychologiquement aux comportements étranges. Généralement, « enquêtes exclusives », « capital », « zone interdite » sont des émissions que je ne regarde jamais, parce que les sujets ne m’intéressent pas, de prime abord, parce que je connais légèrement le niveau d’impact factor, que les journalistes nous montrent que ce qu’ils veulent bien nous montrer et pour terminer parce que si on suivait à la lettre ce qu’ils y disent, on ne sortirait plus jamais de chez nous.
Exception faite (et pour moi je pense que cela sera l’une des dernières, sauf si je dois monter une compil des meilleurs amalgames du monde), je me suis calé devant ce reportage de Zone Interdite et l’émission « un an chez les fous les plus dangereux« , curieux de savoir ce que je pourrais apprendre sur le monde des maladies psychiatriques. Quel naïf d’avoir pu croire que j’apprendrais quelque chose d’intelligent ce soir là.
Où comment l’information flirt avec la désinformation, pendant les heures de grandes écoutes.
Au contraire, le reportage qui déjà s’intitule « un an chez les fous les plus dangereux » impose déjà par son manque de respect envers les familles et les personnes qui sont atteintes par les maladies psychiatriques. Évidemment, si déjà la production avait prit le parti de les appeler « fous dangereux », on pouvait s’attendre à quel public l’émission était destinée : le débilos moyen pas plus malin que celui qui est stigmatisé à la télé. Le pouvoir aux cons. Bah oui.
« Oh, regardez moi cet animal, regardez le comme il est pas beau, ouh, la honte, regardez, regardez, vous le voyez bien là? »
Voici comment en quelques mots ce reportage gerbant pourrait être décrit. On y suit 3 malades, Samir, Clément et Gérard, tous atteint d’une maladies psychiatrique grave, obligeant les autorités compétentes (préfecture et médecin psy) à les enfermer dans une UMD (Unité pour Malade Difficile). Ah bah voilà M6. Votre titre aurait déjà dû être « Reportage sur les malades psychiatriques dans une Unité pour Malade Difficile », ou s’en approcher. Juste par respect. La justification du pognon et de la course à l’audimat permettent finalement toutes les bassesses.
Les auteurs de cette merde audiovisuelle sont une honte pour la profession [...].
On passe très vite sur les comportements très étrange des malades psychiatriques (et s’ils n’en avaient pas, ils y seraient pas…) sans même essayer d’en expliquer la cause, parce que non, madame, monsieur, on fait pas dans le journalisme scientifique, on fait dans le journalisme à sensation. On cherche pas d’explication, on cherche juste les images les plus chocs pour faire le plus de recette. On est là pour ça, alors on a pas peur de rester 1 an sur les lieux pour avoir les perles rares. L’avis du médecin on s’en branle, nous squ’on veut, c »est d’la baston.
Exactement, je pense que les auteurs de cette merde audiovisuelle sont une honte pour la profession et pour ceux qui font ce travail honnêtement. « Gérard, malade psychiatrique et placé sous-tutelle, nous a donné l’autorisation de le filmer à visage découvert », et comme on a aucun respect pour ce qu’on fait et pour les personnes qu’on interview, on le fait. En plus il a une bonne gueule de psychopathe quand il sourit et ça c’est bon pour le français moyen. « Regardez le comme il a l’air d’un psychopathe! Oubliez pas de le lapider quand il sortira de l’hôpital ».
Juste par principe les mecs, si un monsieur que vous qualifiez vous même de « fou dangereux », placé sous tutelle et n’ayant pas visiblement toute sa tête vous autorise à montrer sa gueule à la France entière, vous devriez même pas vous poser la question : vous floutez le visage et c’est tout. Bandes de rapaces!
Allez, pleure grosse pute.
Le reportage continue, on essaye de meubler les vides par des profondeurs intersidérales (finalement, faut pas croire, il s’est pas passé grand chose en 1 an de reportage dans l’une des quelques UMD de France), « tient et si là on interviewait la mère d’un des hommes placés dans l’UMD » ?
« Vous trouvez ça dur de voir votre fils dans cet établissement? » Allez pleure grosse pute, on veut du sensationnel là, vas-y, lâche toi, on en veut nous là, ho! « Bah oui que c’est dur, vous croyez quoi? » rétorqua la mère. On est loin des larmes, mais je pense que cette mère les pleure tous les jours en pensant à son fils. Dommage M6.
En définitive, je n’ai rien appris de ma soirée, sauf que : M6 (ou n’importe quelle autre chaine de télévision de tout façon) n’hésite pas une seule seconde à surfer sur les amalgames et les stigmatisations les plus foireuses pour faire grimper son audimat, qu’M6 n’hésite pas non plus entre faire du vrai journalisme et un feuilleton mal tourné faisant dans le sensationnel. Si j’avais voulu regarder un Zapping Choc, j’aurai zappé sur Direct 8. Franchement, vous m’avez déçu.