Là où la droite n’avait rien fait pendant dix ans, le gouvernement s’est battu pour renforcer les règles européennes qui contrôlent le détachement des travailleurs.
Le président de la République, le Premier ministre et Michel Sapin se sont fortement engagés ces dernières semaines pour rallier un par un les soutiens en Europe. Alors qu’il y a quelques semaines encore, les commentateurs nous disaient isolés, aujourd’hui une majorité d’Etats nous ont rejoints, et l’Europe a adopté un texte qui contient des avancées considérables :
Des coopérations seront mises en place entre Etats pour éviter les détournements :
- tous les pays européens devront adopter une définition commune des travailleurs détachés, afin d’éviter les trous dans le dispositif qui jouent sur des définitions différentes.
- les Etats européens se sont s’engagés à fournir rapidement toutes les informations sur la réalité de l’activité des sous-traitants pour combattre les sociétés-écrans, boites aux lettre ou coquilles vides et remonter les chaînes.
- Au-delà, les accords bilatéraux seront développés.
Les contrôles dans chaque pays seront rendus plus efficaces :
- il sera désormais possible d’exiger des travailleurs détachés eux-mêmes, et pas seulement des entreprises qui sont parfois des coquilles vides, les documents, en français donc facilement contrôlables, prouvant que leur rémunération et les conditions de travail respectent les règles.
- les donneurs d’ordre, partout en Europe, devront vérifier les pratiques de leurs sous-traitants et seront tenus responsables des agissements frauduleux de leurs sous-traitants : ce sera un levier puissant pour assurer le respect des règles, et ce sur toute la chaîne de sous-traitance.
Les sanctions décidées dans un pays seront appliquées dans toute l’Europe. Aucune impunité ne pourra persister.
- ainsi, une amende pourra être décidée en France à l’encontre d’une entreprise domiciliée dans un autre pays européen qui ne respecte pas le droit des travailleurs détachés. Son recouvrement pourra être effectué dans le pays d’origine.
Sans attendre l’adoption définitive de ce texte, le gouvernement va agir fermement et vigoureusement.
- aucune fraude ne sera tolérée
Le droit est clair : un travailleur détaché en France doit bénéficier des conditions de salaire et de travail du droit français. Autrement dit, le droit ne permet à aucun salarié de travailler 45 heures par semaine pour 3€ de l’heure, de dormir dans des hangars, de ne pas avoir accès à la médecine du travail…
Nous livrerons une lutte impitoyable contre les pratiques qui ne respectent pas la loi et organisent une concurrence déloyale au détriment des travailleurs.
- de premières condamnations ont déjà eu lieu
Une société a ainsi été condamnée, il y a 3 semaines, à 210 000€ d’amende pour « complicité de travail illégal » pour avoir confié un chantier en Haute-Savoie, à un prix de 25 % inférieur au prix du marché, à un sous-traitant qui ne respectait pas les règles. L’inspection du travail agira plus, plus vite, plus fort, multipliera les contrôles et les sanctions.
- Une loi sera examinée par le Parlement français loi pour accroître encore la lutte contre la fraude et les abus en matière de travail illégal
Elle permettra aux inspecteurs du travail de mieux cibler les contrôles en croisant les données.
Elle renforcera les sanctions financières et pénales contre ceux qui ne respectent pas les règles.
Elle créera une liste noire des entreprises condamnées pour travail illégal.
Le gouvernement souhaite que le Parlement européen qui va désormais se prononcer sur ce texte prenne la mesure des enjeux en question. Ce texte va être soumis au Parlement qui se prononcera puis sera soumis, dans sa dernière version, à un trilogue, réunion entre les principales institutions pour essayer de trouver un accord sur un compromis. Le gouvernement continuera à expliquer ses positions à chaque fois qu’il le faudra pour obtenir un texte final conforme à ses préoccupations.
Questions fréquentes
Pourquoi ne pas abroger la directive ?
Car si l’on abroge la directive, non seulement le détachement des travailleurs persiste (ce n’est pas la directive qui permet le détachement mais le Traité de Rome à travers la libre circulation) ; mais il persiste dans de plus mauvaises conditions, où n’importe qui peut faire n’importe quoi.
La directive est une protection, c’est elle qui pose la règle selon laquelle les travailleurs détachés doivent être payés et bénéficier des conditions de travail du pays d’accueil. C’est un filet de sécurité. Il n’est pas parfait : certaines mailles sont trop grosses ou cassées. C’est pourquoi nous voulons le réparer.
Quelle est la différence avec ce qu’on avait appelé la « directive Bolkestein » ?
Ces nouvelles règles sont l’exact contraire. Le premier projet de directive Bolkestein voulait légaliser cette concurrence déloyale entre les travailleurs. Il prévoyait que les travailleurs détachés soient payés selon les règles du pays d’origine : il aurait donc été légal de payer des salariés 3€ de l’heure en France. C’était inadmissible, et c’est pourquoi nous l’avions fermement combattue. La « directive détachement » vise à protéger les droits des salariés et à éviter le dumping. Elle précise notamment que le droit qui s’applique est celui du pays d’accueil. C’est pour cela qu’il faut multiplier les contrôles en France et la renforcer au niveau européen.
Cet accord met fin aux fraudes, mais ne règle pas tous les problèmes de concurrences déloyales :
La lutte contre les fraudes et le renforcement des législations en règle une très grande partie.
- Il restera un différentiel de cotisations sociales ? Mais si la concurrence ne se fait que sur ce point, elle sera supportable : les entreprises qui proposeront des travailleurs détachés pourront bénéficier de cotisations un peu moins élevées, mais devront en contrepartie payer le transport, l’hébergement, les frais etc. des travailleurs qu’elles font venir. Si elles respectent toutes les règles, le gain sera minime.
<>-il restera également le problème des abattoirs allemands ? (qui peuvent légalement payer leurs salariés 3€ de l’heure puisqu’il n’y a pas de salaire minimum en Allemagne). Il est en passe d’être réglé : l’Allemagne va bientôt mettre en place un salaire minimum.
De la part de Najat Vallaud-Belkacem