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La redécouverte de la nature humaine par la biologie évolutionniste (2)

Publié le 26 décembre 2013 par Copeau @Contrepoints
Analyse

La redécouverte de la nature humaine par la biologie évolutionniste (2)

Publié Par Damien Theillier, le 26 décembre 2013 dans Philosophie

Quels sont les enjeux politiques et économiques d’une redécouverte de la nature humaine par la nouvelle biologie évolutionniste ?

Par Damien Theillier.

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Alors que cinq cents entreprises ont été mises en demeure ces derniers mois pour n’avoir pas respecté l’égalité professionnelle hommes-femmes (communiqué du ministre des droits des femmes Najat Vallaud-Belkacem), nous publions la seconde partie de notre article sur la négation de la nature humaine. Cette partie est consacrée au féminisme et à l’égalitarisme.

La « table rase », c’est l’idée que notre esprit serait vide de toute prédisposition, de toute organisation préétablie et qu’il n’y aurait pas de nature humaine. (Voir la première partie ici). Cette idée est contestée par les récentes recherches scientifiques en biologie et apparaît de plus en plus comme un mythe. Quels sont donc les enjeux politiques et économiques d’une redécouverte de la nature humaine par la nouvelle biologie évolutionniste ?

L’impasse du féminisme

Si les enfants étaient des « tables rases » à la naissance, comme l’enseignent les sciences sociales, nous pourrions les modeler afin qu’ils soient conformes à nos projets. Mais si nous sommes nés avec certaines aptitudes physiques et mentales, les réformes sociales pourraient bien être des utopies. C’est le cas précisément de la parité. Les différences entre les sexes font que les mesures visant à instaurer une parité rigide entre les sexes dans tous les secteurs de la vie est une utopie féministe tout aussi néfaste qu’irréaliste.

Les femmes ont en moyenne, un profil d’aptitudes et d’émotions différent de celui des hommes. La compétition économique ou politique n’est pas leur priorité. La supériorité hiérarchique et la perspective de gagner de plus gros salaires les intéressent moins. La plupart des femmes ont des buts multiples dans leur vie et elles souhaitent continuer à s’impliquer dans leur famille, leur communauté, leur vie sociale et privée.

C’est pourquoi, contrairement à l’idée reçue, les inégalités de salaires ne sont pas toujours le produit d’une discrimination1. Beaucoup de femmes acceptent volontiers un salaire moindre pour un emploi qui correspond mieux à leurs attentes : travailler avec des gens qu’elles respectent, accomplir des activités socialement utiles, bénéficier d’horaires flexibles. De plus, les métiers qui attirent davantage les femmes, comme l’enseignement ou les soins, ne sont pas les mieux payés, ce qui explique en partie les différences de salaires. Dans le domaine médical, par exemple, on constate que les femmes sont attirées par des spécialités comme la médecine généraliste et la pédiatrie qui sont moins bien rémunérées que celles qui attirent les hommes : chirurgie, pathologie ou radiologie.

L’échec des politiques égalitaristes

L’échec des politiques inspirées de l’idéal égalitariste repose d’abord sur l’idée erronée que les comportements peuvent être façonnés indépendamment de la nature et de la volonté des individus. L’idéal égalitariste de la gauche tend nécessairement à réduire le libre arbitre. En effet, la liberté d’agir selon ses propres projets est à l’origine même des inégalités économiques et sociales que l’État-providence cherche à supprimer.

Ainsi l’intérêt personnel fait que les systèmes économiques compétitifs fonctionnent mieux que les monopoles d’État tandis que le désir de dominance fait que les bureaucraties puissantes deviennent facilement la proie de politiciens autocrates et ambitieux. De même l’ethnocentrisme naturel de notre espèce peut pousser les mouvements nationalistes à la guerre et au génocide.

Mais dire que c’est le mobile de l’intérêt égoïste qui commande les relations d’échange, ne veut pas dire que l’intérêt seul suffise à harmoniser et à pacifier les rapports sociaux. La morale ne disparaît pas pour autant des rapports interindividuels. Cela veut dire que toute tentative d’éradiquer l’intérêt personnel pour le remplacer par une solidarité forcée est vouée à l’échec. Ceux qui continuent à penser que toute caractéristique humaine peut être modifiée par l’impact de « bonnes » institutions sociales ne sont pas crédibles.

Science et morale : attention à la confusion

Si la biologie nous montre que l’homme est naturellement plus infidèle que la femme, cela implique-t-il qu’il soit moins immoral pour un homme d’être infidèle ? Si les pulsions sexuelles sont naturelles, faut-il en conclure que le viol est une bonne chose ? Non, évidemment. Ce type de raisonnement est appelé « sophisme naturaliste » et il consiste à penser que tout ce qui est dans la nature serait bon et que ce qui est inné ne pourrait pas être moralement mauvais.

De même, si le viol est immoral, faut-il penser que la pulsion sexuelle n’est pas naturelle ? Si la fidélité est une attitude vertueuse, faut-il en conclure qu’elle est naturelle ? Bien que, moralement parlant, l’adultère soit coupable, cela n’a aucune incidence sur l’aspect naturel du désir ou du besoin. Un autre sophisme est donc le « sophisme moraliste », qui consiste à penser que si un comportement est immoral, il ne doit pas se trouver dans la nature.

Ces sophismes résultent d’une confusion entre science et morale, entre les faits et les valeurs. L’objet de la science est de décrire ce qui est. La morale se distingue de la science en ce qu’elle produit des jugements normatifs, donc non testables. De son côté, la science produit des constats positifs, donc réfutables. La morale ne peut se fonder sur des assertions réfutables. On ne peut fonder l’idée que les hommes et les femmes sont également respectables sur le fait qu’ils ont le même QI moyen, par exemple. Et inversement, les découvertes scientifiques ne peuvent pas réfuter des assertions morales. En d’autres termes, ce que nous devrions faire ou ne pas faire (selon les normes morales), n’est pas identique à ce que nous sommes biologiquement incités à faire ou à ne pas faire

Conclusion

Cette nouvelle approche de l’esprit humain par la théorie évolutionniste a le mérite de réactiver un certain nombre de questions philosophiques ancestrales sur la nature humaine. Les hommes sont-ils fondamentalement bons ou mauvais ? Sont-ils naturellement égoïstes ou altruistes ? Sont-ils des animaux sociaux ? Sont-ils des individus rationnels qui ne cherchent qu’à maximiser leur utilité ? Si l’inné et l’acquis façonnent nos caractères et déterminent notre destin, quelle est la part exacte de chacun ? Avons-nous une volonté libre ? La moralité est-elle innée ou acquise ?

La nouvelle synthèse darwinienne nous permet de mieux comprendre quelles sont les inclinations naturelles et universelles que nous pouvons tenir pour raisonnables et celles dont nous devons au contraire nous méfier. De même que la science économique, nous éclaire sur les moyens nécessaires à l’accomplissement de nos fins, la compréhension de la nature humaine, envisagée à la lumière de la théorie de l’évolution, peut nous aider à mieux discerner la viabilité et les coûts de nos décisions politiques.

L’idée que l’homme est un produit de l’évolution permet également de rejeter l’utopie d’un perfectionnement indéfini de l’homme par la révolution, par des changements sociaux ou par l’éducation. Ce que nous apprend la nouvelle biologie, ce n’est pas que tout serait déterminé, c’est que le relativisme culturel n’a aucune base scientifique.


Publié initialement sur 24hGold.

  1. Warren Farrell, Why Men Earn More: The Startling Truth Behind the Pay Gap. Voir aussi cet article du Wall Street Journal, There Is No Male-Female Wage Gap. À lire aussi, en français : Égalité homme-femmes : de qui se moque-t-on ? par Cécile Philippe.
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