Une importante partie de la population mondiale, notamment dans les pays en développement, utilise le bois de chauffe pour la cuisson des repas et pour le chauffage. Dans les familles pauvres des pays en développement, le bois, le charbon de bois et d’autres combustibles solides (résidus agricoles et charbon principalement) sont souvent brûlés dans des feux ouverts ou des fourneaux inefficaces. Pour cela, un simple feu de camp entre 3 pierres, ou des foyers simples en terre cuite et peu efficaces sont utilisées. Selon le Dr Mahamady Yarbanga du district sanitaire de Tougan, dans la province du Sourou, au Burkina, suite à la combustion incomplète, se dégagent dans l’environnement domestique, de petites particules et d’autres éléments reconnus nuisibles à la santé humaine. « Les pièces consacrées à la cuisson des aliments ont tendance à être mal ventilées et la plupart des habitations ne possèdent pas de cuisine séparée. On vit autour de l’aire de cuisson et c’est là que les femmes passent la majeure partie de leur temps. Les fourneaux sont généralement rudimentaires – une fosse ou quelques briques – et ils brûlent les biocombustibles de manière très peu efficace », a-t-il indiqué. Les populations, notamment les femmes et les jeunes enfants, sont donc souvent exposés à de fortes émanations de fumée de cuisson, à des taux bien supérieurs à ceux considérés comme sans danger par l’Organisation mondiale de la Santé. Le Dr Yarbanga a fait savoir que les foyers de cuisson dégagent une pollution de 1 000 mg de particules par m3 soit l’équivalent de 2 paquets de cigarettes par jour (quand les normes européennes limites sont de 50mg). Cette fumée de biocombustibles contient de nombreux composants nocifs, dont des particules en suspension respirables, de l’oxyde de carbone, des oxydes d’azote, du formaldéhyde et des hydrocarbures polyaromatiques comme le benzo(a)pyrène. L’exposition prolongée à ces composants toxiques est néfaste pour le système respiratoire, les yeux et le système immunitaire, et elle fragilise l’organisme face aux infections et aux maladies. « De récentes études indiquent que les personnes cuisant principalement leurs aliments aux biocombustibles sont deux ou trois fois plus susceptibles de souffrir de tuberculose active que celles utilisant des combustibles moins polluants », a-t-il affirmé. La fumée des feux de cuisson peut accroître les risques de tuberculose en réduisant la résistance à l’infection initiale ou en favorisant le développement de la tuberculose active chez les personnes déjà infectées – ou encore en associant les deux. La tuberculose pulmonaire, la forme la plus courante de la maladie, se transmet par la toux, qui est aggravée par la fumée. Par ailleurs, il a déclaré que les infections respiratoires aiguës constituent la première cause de morbidité et de mortalité dans le monde et font chaque année 3 millions de victimes chez les enfants de moins de cinq ans – et représenteraient 9 % du fardeau mondial de la maladie. En outre, le Dr Yarbanga prévient que la fumée risque d’aggraver des maladies comme l’asthme. « Un lien a été établi entre l’exposition aux fines particules de fumée et l’augmentation des symptômes asthmatiques et des visites aux urgences. Même s’il n’a pas été formellement établi que la fumée des feux de cuisson provoquait de l’asthme, elle contient certains polluants présents dans l’air pollué ambiant ou la fumée de cigarette, dont les liens avec la maladie ont été prouvés », a-t-il précisé. Le Dr Mahamady Yarbanga a reconnu qu’Il n’existe pas d’étude empirique liant la fumée des feux de cuisson à l’anémie, mais on sait qu’elle nuit à la croissance fœtale et qu’elle est responsable d’insuffisances de poids à la naissance et de décès périnataux. Quand à la cataracte, première cause mondiale directe de cécité absolue, elle est provoquée par une lésion de l’œil, qui peut être le fait, entre autres facteurs, d’une pollution due à la fumée. Il est également possible que la fumée aggrave les trachomes et la conjonctivite, eux aussi responsables de cécité. La fumée des feux de cuisson, comme celle du tabac, contient de nombreux hydrocarbures aromatiques polycycliques comme le benzo(a)pyrène, susceptibles de provoquer des cancers. Les études empiriques ont fait apparaître un lien entre l’exposition à la fumée de charbon et le cancer du poumon, mais les preuves liant la fumée de biocombustibles au cancer du poumon restent limitées. C’est pourquoi, il est important de favoriser l’usage des foyers améliorés fonctionnant aux biocombustibles, efficaces et bon marché, qui fument moins et dotés de conduit d’évacuation ou de hotte empêchant les polluants de se libérer à l’intérieur des habitations. Pour ceux qui ont les moyens, le gaz butane ou les cuiseurs solaires peuvent être également des alternatives crédibles.
Raphaël KAFANDO