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Municipales de 2014 : les leçons du scrutin de 2001

Publié le 24 janvier 2014 par Delits

Malgré une légère remontée en ce début d’année, la cote de popularité du président de la République reste à des niveaux historiquement bas sous la Vème République : entre 17% et 31% des Français jugent positivement F. Hollande ou son action selon les divers instituts de sondage. Des niveaux bien inférieurs à ceux de ses prédécesseurs juste avant les précédents scrutins municipaux : avec une popularité moyenne d’environ 23% en agrégeant les différents instituts, F. Hollande se situe largement sous N. Sarkozy en mars 2008 (environ 39%), J. Chirac en juin 1995 (56%), F. Mitterrand en mars 1989 (53%) et mars 1983 (47%) ou encore V. Giscard d’Estaing en mars 1977 (45%) (cf. graphique).

Malgré cette impopularité, les sondages indiquent que le parti socialiste devrait conserver des villes aussi symboliques que Paris, Lyon, Lille, Toulouse, Strasbourg ou Montpellier et même qu’il pourrait prendre à la droite Marseille ou Avignon.

L’évolution de la cote de popularité des présidents pendant leur premier mandat

graph 1

Ce paradoxe entre une impopularité jamais vue et une bonne tenue dans les intentions de vote peut s’expliquer par les motivations locales du vote aux élections municipales : 66% des Français déclarent ainsi faire leur choix en fonction de considérations purement locales, contre 18% qui souhaitent s’opposer au président de la République et le gouvernement et 6% qui désirent les soutenir. Ainsi, l’impopularité de la majorité n’aurait qu’un impact très limité sur le choix des électeurs au niveau local. Une situation renforcée par la popularité des maires sortants : 53% des sondés estiment qu’il vaut mieux « continuer l’action municipale telle qu’elle est menée actuellement » dans leur commune, un chiffre qui atteint même 62% dans les communes ayant un maire de gauche. D’autre part, la victoire de la gauche dans de nombreuses communes en 2008 assure aux maires sortants un bonus non-négligeable, les maires en fin de premier mandat bénéficiant d’une prime électorale non-négligeable. Plus largement, l’évolution sociologique des grandes villes marquée par la montée parallèle de nouvelles couches sociales (revenus élevés, diplômés, mobiles, bien intégrées dans le processus de mondialisation) et d’une population immigrée est favorable à la gauche. Or, ce sont essentiellement les résultats dans ces grandes villes qui sont observées à la loupe au soir des élections. Un scenario particulièrement favorable à la gauche semble donc se dessiner à deux mois du scrutin.

Pour autant, un retour sur les précédentes élections municipales s’étant déroulées alors que la majorité gouvernementale était de gauche incite à une certaine prudence. En effet, en 2001, les sondages pré-électoraux avaient systématiquement surestimés les candidats socialistes, et dans des proportions parfois impressionnantes. Ainsi, dans les 20 arrondissements de Paris (tous interrogés du fait de l’enjeu symbolique du passage à gauche de la capitale), les listes socialistes avaient été largement surévaluées : entre 2,5 points de trop par rapport aux résultats réels dans le 8ème arrondissement et 13 points dans le 10ème arrondissement. Le constat est le même dans la grande majorité des villes de province : sur les 18 testées en 2001, 16 présentaient une surestimation des listes socialistes, avec parfois des écarts très forts entre les sondages et les résultats : 12,8 points à Aix-en-Provence, 12,7 points à Nancy, 11,9 points à Strasbourg, 7,3 points à Caen ou encore 6,5 points à Clermont-Ferrand. Cette surestimation des listes conduites par des socialistes semble avoir profité aussi bien aux candidats de la gauche plurielle (communistes et surtout Verts) quand ils étaient présents qu’aux listes issues de la droite modérée (UDF, RPR). On note que ce phénomène ne semble pas être lié à un institut ou à une méthodologie particulière, pas plus qu’à la taille de la ville ou à la couleur politique du maire sortant.

On peut en revanche expliquer cet écart entre les sondages et les résultats par le climat économique et politique très différent de l’époque. En s’inspirant de la théorie socio-psychologique de la « spirale du silence », on peut faire l’hypothèse que dans le contexte globalement positif pour le gouvernement de L. Jospin, les individus dont les opinions se trouvaient à contre-courant de celle qu’ils imaginaient être majoritaire avaient tendance à dissimuler leurs intentions de vote, et disait donc qu’ils allaient voter pour les listes socialistes. Le climat actuel rend cette théorie très peu opérationnelle pour 2014, et il reste donc tout à fait possible que les bons sondages actuels pour la majorité de gauche ne seront cette fois pas contredits par les résultats. Pour autant, cette comparaison entre les sondages de 2001 et ceux de 2008 devrait inciter à observer les intentions de vote publiées récemment avec une grande prudence.


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