Magazine Poésie
Si en exécutant cet acte simple :
humer la chevelure de l’aimée
on ne risque pas sa vie
on n’engage pas son destin
du dernier atome de son sang
et de l’astre le plus lointain
si dans ce fragment de seconde
où l’on exécute n’importe quoi
sur le corps de l’aimée
ne se résolvent pas dans leur totalité
nos interrogations, nos inquiétudes
et nos aspirations les plus contradictoires
alors l’amour est en effet
ainsi que le disent les porcs
une opération digestive
de propagation de l’espèce
Pour moi les yeux de l’aimée
sont tout aussi graves et voilés
que n’importe quel astre
et c’est en des années-lumière
qu’on devrait mesurer les radiations
de son regard
On dirait que la relation de causalité
entre les marées
et les phases de la lune
est moins étrange
que cet échange de regards (d’éclairs)
où se donnent rendez-vous
comme dans un bain cosmique
mon destin
et celui de l’univers tout entier
Si j’avance ma main
vers le sein de l’aimée
je ne suis pas étonné
de le voir soudain
couvert de fleurs
ou que tout à coup il fasse nuit
et qu’on m’apporte une lettre cachetée
sous mille enveloppes
Dans ces régions inexplorées
que nous offrent continuellement
l’aimée
l’aimée, le miroir, le rideau
la chaise
j’efface avec volupté
l’œil qui a déjà vu
les lèvres qui ont déjà embrassé
et le cerveau qui a déjà pensé
telles des allumettes
qui ne servent qu’une seule fois
Tout doit être réinventé