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La rivière rouge

Publié le 01 février 2014 par Dukefleed
La rivière rougeRapport père fils dans la dureté de l'Ouest
Adapté d’un roman, cette histoire s’étend sur une période de 15 ans. Une caravane de plusieurs dizaines de chariots traverse les plaines désertiques américaines. Dunson dit au revoir à sa fiancée et quitte la caravane avec un accolyte, pas convaincu que la piste suivie par le reste de la troupe soit le meilleur choix. Quel homme ! Il laisse sa douce dans ce qu’il considère comme un mauvais choix. La suite lui donne raison. Une fumée au loin ; mais tiens, toute la caravane est en feu victime d’une attaque indienne. Dur et sans cœur, il décide de regarder la fumée au loin et tant pis pour sa bien aimée. Pragmatique peut être, à quoi bon avec son petit pistolet de partir bille en tête s’attaquer à une troupe d’indiens. En tout cas, il n’a pas l’air affecté. Le décor et surtout le personnage principal, Dunson, est planté. Pas tout à fait, car il prend sous son aile un jeune garçon survivant de l’assaut des indiens. Bienveillance ou tout simplement car il voie en lui son successeur, un mentor, quelqu’un à qui transmettre. Dunson est un personnage complexe, endurci par un Ouest américain rude. Et puis Howard Hawks qui réalise ici un premier western devenu référence du genre, use d’une ellipse hyper talentueuse considérée comme un modèle. Nous voyons Wayne (Dunson) se projeter dans le futur en exposant son rêve. De retour à la réalité, les personnages ont vieilli de 10 ans. Wayne a les cheveux blancs et le jeune garçon est devenu Montgomery Clift. Ce tourbillon spatio-temporel exprime à merveille la folle course du temps. Et puis c’est reparti, Dunson a bati une exploitation de grande taille ; mais devinez comment, en n’hésitant à abattre un homme pour s’approprier ses terres, en supprimant aussi tout les gênants et les personnes n’allant pas dans sons sens. Ce pays s’est bati sur la violence et à défaut d’une justice par encore présente sur tout le territoire, c’est la loi du plus fort qui prime. Paul Thomas Anderson montrera çà aussi dans «There will be blood ». Mais voilà, petit point historique: pendant la guerre de Sécession, la majorité des cow-boys texans s’étant enrôlée, le bétail négligé et livré à lui-même s’était accru plus que d’ordinaire et était estimé à plus de 5 000 000 de têtes à la fin du conflit. Les ‘Sudistes’ n’avaient plus les moyens de se payer de la viande de bœuf. En revanche dans le Nord, où les immigrants s’étaient multipliés, on en manquait cruellement. Vers la fin de 1865, un métis nommé Jesse Chilsom partit avec un chariot du Kansas pour se rendre à Fort Worth au Texas, marquant sa route par des monticules de terre, la fameuse ‘Chilsom trail’. C’est lui qui apporta dans le même temps aux Texans la nouvelle que le bétail atteignait jusqu’à 50 dollars la tête dans le Nord. La solution était toute trouvée et le récit narrait le destin de deux hommes dont l’importance fut immense pour l’économie et l’histoire de leur pays, ayant ouvert officiellement cette piste pour le bétail après avoir fait franchir la Rivière Rougeà 250 000 têtes en 1866. A travers ce long convoyage des bêtes, Dunson va à nouveau montrer sa brutalité ; mais là, il va se heurter à celui qui est devenu depuis près de 15 ans son fils adoptif. La rupture va être consommée lorsque le jeune va prendre un chemin différent de celui tracé par son aîné comme un pied de nez à la génèse de l’histoire où Dunson avait suivi sa route et s’en était sorti grâce à ce choix. Ce film montre bien le conflit de génération ; toute la difficulté à exercer une paternité responsable, ferme mais équilibrée. La folie autoritaire du père contredite par un fils romantique mais avisé abouti à des choix humains radicalement différents. Le jeune montrera même à son père adoptif qu’une autre voie est possible. Ce film est donc considéré par les spécialistes comme un « western adulte ». Pour nous montrer cette odyssée personnelle et cette entreprise démesurée, Hawks tourne pratiquement l’intégralité du film en extérieur : une prouesse. Et puis à la photo, il alterne avec beaucoup d’équilibre les scènes de jour et nuit. Au cadrage, les plans larges mobiles et les scènes intimistes serrées et fixes. Outre la psychologie des personnages, Hawks dresse un film documentaire sur la vie difficile des cow-boys avec le rapatriement des bêtes : une vie monotone mais dangereuse.Et puis le duo Wayne-Clift marche à merveille entre la dureté d’un Wayne déjà reconnu et un jeune premier à l’autorité plus évidente que présagée et à la finesse de jeu validée par la suite. Wayne-Hawks récidiveront dans deux autres westerns référence du genre : El dorado & Rio bravo.A voir… car beaucoup moins connu que bien d’autres… Celui-ci rivalise dans le genre western en N&B avec « La chevauchée fantastique » de John Ford.
Sorti en 1949

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