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Amour en peine (ou peine d’amour, c’est selon…) - 4e partie

Publié le 12 mai 2008 par Comeinmyworld

… A ce nouveau voyage qui se dessinait devant moi je vis que je n’en reviendrais pas … Tous les murs sont tombés, tout ce qui, vaille que vaille faisait une demeure s’effondrait.

Un papillon de nuit passa près de moi et me dit :
Si tu veux vivre, il faut arrêter de fuir, d’arranger, de réprimer ou de renforcer.
Il faut …  que tu puisses traverser.

post-4.jpgLe papillon m’apprenait que pour survivre en cette nuit, je devais laisser tomber tout costume, tout personnage, car cette réalité exigeait de moi ma complète nudité. Un dévoilement sans temps, sans espace. Un désert inscrit dans l’état présent.

Mais voilà, tout ce qu’exige l’instant présent c’est de suspendre les saisons, d’oublier son passé. De par cette réalité l’on renonce à diriger le cours des choses, à être son propre maître. C’est abdiquer tout pouvoir et perdre tout orgueil. Je devais donc enlever tout l’inutile et même le nécessaire. Le seul nécessaire c’était ma vie, mais qu’elle était le sens de « vie » alors que cette sensation m’apprenait qu’il fallait être en perpétuelle naissance ?

Il fallait que je me déshabille entièrement pour nager. Pour aspirer à ma vérité, je me devais d’être nu, défait de toute ma vêture intime, de mes pensées, de mes idées, de moi.

Je voyais désormais que l’allure de mes pas ne dépendait pas de mon bon plaisir et que d’ailleurs, il ne l’avait jamais été.

Dans l’état où j’étais, chaque seconde était comme une vie entière qui commence par la naissance et s’achève par le deuil. L’éternel cycle se jouait maintenant de moi et sa pâture était la persistance même de mon moi à garder cette peine entre mes doigts : je ne voulais pas laisser partir Emilie.

Je préférais au moins garder cette peine, si immense qu’elle puisse être, que de devoir affronter cette terre inconnue.

N’étais-je pas déjà dépouillé devant cette chose … ?

Et tout se passait à l’intérieur de moi. Théâtre des théâtres, le lac aux miroirs se faisait toujours de plus en plus insistant, pénétrant. Et j’entendis la voix sèche et sanglotante de la solitude :”Je ne vais pas me résigner si aisément, Goûte à ma vérité et je te libérerai des chaînes que tu t’es toi-même confectionnées”.

Suite à ces paroles, je compris que le monde qui m’habitait et pour lequel je croyais qu’il était le seul où il n’y avait aucun danger, abritait pourtant un combat plus mystique que le sage des sages n’aurait jamais été en mesure de me persuader. Ici se jouait plus que ma vie. Ici se jouait l’innommable.

J’aurais vécu des milliers de vies avec une sorcière comme femme pour ne pas avoir à regarder ce paysage qui habitait en moi ; pour passer outre cette singulière solitude. A cet endroit je n’avais plus aucune arme de l’ancien monde. Mes mains étaient vides de bruit. Sans télévision, radio, livres. Sans projection, sans rien où me perdre et m’oublier … sans amour pour me réfugier. Moi qui me croyais achevé … ou du moins pas habité.

Le juste et nécessaire n’étaient plus de restreindre et d’exténuer, ils devenaient une seule exhortation :  « Aller jusqu’au bout ». Mais au bout de quoi ? Et murmurant la solitude ajouta : « Parvenu au bout, il faut aller plus loin encore ».

Plus aucune carte ne pouvait m’indiquer l’artère à prendre et tous les nouveaux personnages allaient être des étrangers.

Et bizarrement, je sentis que le tout premier personnage que j’allais rencontrer, allait être moi. Plus que celui-ci frappait contre les murs de la nuit et plus qu’un impénétrable travail s’accomplissait.

Chaque crissement d’ongle appelait un insolite battement de tambour qui rythmait d’une musique l’ouverture d’une fraîche possibilité de vie, une naissance musicale. Une brillance émergeait du silence. Un pont se déployait devant mon petit moi qui n’avait plus de vessie tellement il avait tremblé son incompétence à osciller devant son imberbe chair.

La véracité du moment me sculptait une autre monture. Un candide nom se gravait sur l’impalpable.

Ici, en cet instant, se préparait mon jugement. Cet emplacement se formait grâce à un je ne sais quoi, mais un je ne sais quoi qui me connaissait par-delà moi-même. Un je ne sais quoi orchestré par la solitude. Je lui donnai le nom de Mila.

Qu’est-ce que le jugement sinon l’affrontement du sens, du poids des mots qui remettent en scène les postures passées, les gestes échappés. La première fois que l’on se regarde par les lettres du jugement de la raison, la sensation est alors opprimante. Il manque d’air. Le pont de la respiration est rompu et les yeux s’épuisent à scruter cet espace. C’est que les yeux cherchent plus de lumière …  

A suivre…


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